Question au Gouvernement n° 312 :
immigration

13e Législature

Question de : Mme George Pau-Langevin
Paris (21e circonscription) - Socialiste, radical, citoyen et divers gauche

Question posée en séance, et publiée le 17 janvier 2008

AVIS DE LA HALDE
SUR LA LOI RELATIVE À L'IMMIGRATION

M. le président. La parole est à Mme George Pau-Langevin, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
Mme George Pau-Langevin. Ma question s'adresse à M. Hortefeux, ministre de l'intégration, de l'identité nationale, et caetera, et caetera. (Rires sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine. - Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Monsieur le ministre, durant plusieurs mois, nous avons discuté dans cette assemblée votre projet de loi relatif à la maîtrise de l'immigration.
Le groupe socialiste vous a mis en garde contre les dérives et les dangers dont ce texte était porteur, notamment parce qu'il violait non seulement le principe d'égalité, auquel nous sommes tous très attachés, mais également nombre de conventions internationales qui engagent la France.
M. Arnaud Montebourg. Eh oui !
Mme George Pau-Langevin. Nous avons déposé des amendements, qui n'ont pas été retenus, et nous avons même dû saisir le Conseil constitutionnel. Celui-ci a notamment restreint sensiblement l'application de cette loi par des réserves d'interprétation et a censuré un de ses articles.
Mais votre chemin de croix n'est pas terminé (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) puisque, aujourd'hui, c'est la HALDE qui, saisie par le GISTI, Groupe d'information et de soutien aux travailleurs immigrés, se penche à son tour sur votre texte et estime que ce texte attente gravement aux lois contre la discrimination.
D'abord, elle souligne que vous vous êtes dispensé de la consulter, alors que la loi, compte tenu des dispositions du projet de loi, vous en faisait obligation.
M. Bernard Roman. Oui, c'est scandaleux !
Mme George Pau-Langevin. La HALDE considère ensuite que vous vous attaquez finalement aux plus vulnérables de notre pays puisque le droit au regroupement familial, et donc à une vie familiale normale, est restreint pour les handicapés, les personnes les plus faibles, les petits salaires, les retraités, ce qui rejaillit sur le droit à la vie familiale des enfants. Désormais, les personnes concernées par ce texte doivent savoir que, si elles saisissent les tribunaux, la loi sera censurée par les juridictions de notre pays et donc sera inapplicable.
Pouvez-vous nous dire, monsieur le ministre, ce que vous comptez faire aujourd'hui pour tenir compte de cet avis particulièrement courageux et éclairé de la HALDE ? Reconnaissez-vous qu'avec ce texte, votre gouvernement mène une politique discriminatoire dénoncée par la HALDE ? (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Qu'allez-vous faire pour remédier à ce constat implacable ? Consulterez-vous la HALDE sur les décrets d'application de la loi, comme elle le demande, ou allez-vous encore bafouer la Haute autorité contre les discriminations ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du codéveloppement.
M. Brice Hortefeux, ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du codéveloppement. Madame la députée George Pau-Langevin, comme ministre " et caetera " mais aussi comme ministre de l'immigration et de l'intégration...
M. Patrick Bloche. Et des expulsions !
M. Christian Paul. Des expulsions d'enfants !
M. le ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du codéveloppement. ...je vais essayer de vous répondre très précisément.
Je viens de prendre connaissance, comme vous, de l'avis que la HALDE a rendu public hier après-midi seulement. Je ne souhaite pas, vous l'imaginez, polémiquer avec cette instance...
M. François Lamy. Bien sûr...
M. le ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du codéveloppement. ...dont j'ai reçu dès ma prise de fonction le président, qui est, je le rappelle, M. Louis Schweitzer. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
Je cite son nom, c'est un hommage. (Mêmes mouvements sur les mêmes bancs.)
M. le président. Écoutez la réponse, je vous prie.
M. le ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du codéveloppement. Je voudrais simplement lever toute ambiguïté en rappelant très précisément le statut de la HALDE.
D'abord, la HALDE a été créée par une loi de décembre 2004 et je vous remercie, madame Pau-Langevin, de l'hommage que vous rendez ainsi à l'initiative prise par la majorité.
Ensuite, ce n'est pas insulter son président, avec lequel je suis en contact régulier, que d'indiquer qu'il s'agit d'une personnalité notoirement connue et reconnue, ancien directeur de cabinet du Premier ministre Laurent Fabius. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
M. le président. Écoutez la réponse de M. le ministre, s'il vous plaît.
M. le ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du codéveloppement. Enfin, chacun sait que la HALDE n'est pas d'un lieu de débat politique mais, juridiquement, une autorité administrative, ni plus ni moins. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
M. Julien Dray. C'est la chasse aux sorcières ! Cela s'appelle le maccarthysme !
M. le ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du codéveloppement. Cela signifie, madame Pau-Langevin, que ce n'est ni une juridiction ni, j'espère que vous en conviendrez, une cour suprême.
M. Julien Dray. La police des idées !
M. le ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du codéveloppement. Ce qui est aujourd'hui commenté par la HALDE, c'est une loi qui est issue d'un projet qui a d'abord été soumis par le Gouvernement à l'assemblée générale du Conseil d'État, qui a ensuite été longuement discuté, je vous rends bien volontiers hommage sur ce point, madame Pau-Langevin - près de soixante heures de débats dont je reconnais bien volontiers qu'ils étaient plus contradictoires que consensuels. Enfin, il s'agit d'une loi qui a été soumise à un examen précis du Conseil constitutionnel. Or, dans sa décision du 15 novembre dernier, le Conseil constitutionnel n'a fait aucune remarque sur aucun des dispositifs que la HALDE évoque dans son avis, aucun.
Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. Ce n'est pas vrai !
M. le ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du codéveloppement. Je rappelle simplement aux commentateurs qu'aux termes de l'article 62 de la Constitution, les décisions du Conseil constitutionnel ne sont susceptibles d'aucun recours et qu'elles s'imposent au pouvoir public et à toutes les autorités administratives et juridictionnelles.
M. le président. Merci, monsieur le ministre.
M. le ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du codéveloppement. Je conclurai en rappelant un principe sur lequel je ne transigerai pas : la France, au-delà du débat juridique, a le droit de choisir qui elle veut et qui elle peut accueillir sur son territoire. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
M. Julien Dray. C'est du maccarthysme !

Données clés

Auteur : Mme George Pau-Langevin

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Étrangers

Ministère interrogé : Immigration, intégration, identité nationale et codéveloppement

Ministère répondant : Immigration, intégration, identité nationale et codéveloppement

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 17 janvier 2008

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