hebdomadaires
Question de :
Mme George Pau-Langevin
Paris (21e circonscription) - Socialiste, radical, citoyen et divers gauche
Question posée en séance, et publiée le 3 novembre 2011
CHARLIE HEBDO
M. le président. La parole est à Mme George Pau-Langevin, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gaucheMme George Pau-Langevin. Ma question s'adresse à M. le Premier ministre. Je souhaite, au nom du groupe socialiste, radical et citoyen, apporter notre soutien et exprimer notre solidarité à la rédaction de Charlie Hebdo, récemment installée dans le XXe arrondissement, qui a été touchée cette nuit par un acte inquiétant pour notre démocratie, inquiétant pour la liberté de la presse et contraire à cette pluralité qui s'incarne dans notre arrondissement. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Cet acte est inquiétant pour la liberté de la presse. Nous ne pouvons tolérer qu'un journal soit ainsi attaqué. Quelle que soit sa ligne éditoriale, quelle que soit la teneur de ses caricatures, même si on n'est pas sensible à son style d'humour, Charlie Hebdo doit être défendu, justement parce que la démocratie a besoin de satire, de dérision et d'ironie, sans lesquelles elle ne peut pas vivre.
Cet acte est inquiétant pour notre démocratie, car il nous rappelle que les menées obscurantistes peuvent encore s'exprimer dans la violence. On ne connaît pas encore les responsables de cet incendie et l'on ne peut exclure une manipulation ; mais, si on peut comprendre que certains puissent se sentir blessés ou vexés par les caricatures de Charlie Hebdo, pour autant il n'existe pas de délit de blasphème dans notre pays. C'est par le débat d'idées, par la discussion, par la justice s'il le faut, que l'on doit combattre des idées ou des caricatures, en aucun cas par la violence, en détruisant l'outil de travail des journalistes. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Cet acte est enfin inquiétant pour notre République, car il nourrit les préjugés. Aucun amalgame ne doit être fait entre ces intégristes pyromanes d'un soir et la grande majorité des musulmans de France, qui pratiquent leur culte dans le respect de la loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et sur quelques bancs du groupe UMP.)
Je demande donc au Gouvernement ce qu'il compte faire pour retrouver les auteurs de cet acte odieux et renforcer la cohésion de notre société. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR et sur quelques bancs du groupe UMP.)
M. le président. La parole est à M. Frédéric Mitterrand, ministre de la culture et de la communication.
M. Frédéric Mitterrand, ministre de la culture et de la communication. Madame la députée George Pau-Langevin, le Gouvernement a vivement dénoncé les intimidations dont a fait l'objet Charlie Hebdo, ainsi que l'incendie criminel de sa rédaction, dont le journal a été victime cette nuit. Ce sont des attaques intolérables contre la liberté d'expression, qui témoignent d'une confusion totale sur le rôle dévolu traditionnellement à la satire et à la caricature dans la presse française.
Il n'y a pas de démocratie sans épreuve de l'irrévérence. Je condamne à nouveau devant vous, au nom du Gouvernement et avec la plus grande fermeté, ces agissements. Il appartient à l'État, donc à la police et à la justice, de faire respecter sans atermoiements les lois de la République.
J'exprime également ma profonde solidarité et celle du Gouvernement aux journalistes, à l'équipe de Charlie Hebdo et à ses lecteurs, en frémissant de surcroît à l'idée de ce qui aurait pu arriver au cours de l'incendie si des personnes avaient été présentes dans les locaux.
Charlie Hebdo avait déjà reçu des menaces lors de la publication des caricatures du prophète Mahomet. Poursuivi, le directeur de la publication de l'époque avait été relaxé, la justice ayant jugé que les caricatures ne constituaient pas une injure.
Pour l'intolérance et le non-respect d'un principe essentiel de notre république, les fondamentalistes se rejoignent. Ainsi, des groupuscules se revendiquant de la foi chrétienne perturbent actuellement les représentations du théâtre de la Ville. J'ai veillé personnellement à ce que leurs agissements soient empêchés, dès lors qu'ils risquaient de remettre en cause les programmes du théâtre. On notera qu'ils ont d'ailleurs été rejoints par des groupes salafistes, au prétexte que le Christ aussi était un prophète de la religion musulmane.
Salman Rushdie et Taslima Nasreen seront toujours protégés dans le pays de la liberté. C'est bien de cela qu'il s'agit. (Applaudissements sur l'ensemble des bancs.)
Auteur : Mme George Pau-Langevin
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Presse et livres
Ministère interrogé : Culture et communication
Ministère répondant : Culture et communication
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 3 novembre 2011