Birmanie
Question de :
M. Axel Poniatowski
Val-d'Oise (2e circonscription) - Union pour un Mouvement Populaire
Question posée en séance, et publiée le 14 mai 2008
SITUATION EN BIRMANIE
M. le président. La parole est à M. Axel Poniatowski, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.M. Axel Poniatowski. Ma question concerne la terrible situation que connaît aujourd'hui la Birmanie.
Monsieur le ministre des affaires étrangères et européennes, la junte militaire birmane est, jour après jour, de plus en plus coupable de non-assistance à peuple en danger.
Le bilan dévastateur du cyclone Nargis ne cesse de s'alourdir. La semaine dernière, on parlait de 60 000 morts ou disparus. On approche cette semaine le chiffre de 300 000 morts.
À partir de maintenant, les nouvelles victimes ne seront plus seulement celles du cyclone, mais relèveront aussi de la responsabilité de la junte militaire. Tout à leur crainte de perdre le pouvoir, les militaires freinent l'arrivée de l'aide internationale au bénéfice des victimes, quand ils ne se livrent pas à de sordides trafics, spéculant sur la flambée des prix.
Alors que les organisations internationales estiment que 1,5 million de rescapés pourraient trouver la mort dans les semaines à venir faute d'accéder aux vivres et à l'aide venue du monde entier, les généraux birmans s'emploient à légitimer constitutionnellement leur pouvoir, à travers un référendum dérisoire, et pour le moins contestable.
Que faut-il donc faire ? Il ne peut bien sûr y avoir d'ingérence de force. Elle tourne toujours au fiasco, et comporte un risque sérieux de désordres et de débordements régionaux incontrôlables et non maîtrisables.
En revanche, les cinq membres permanents du Conseil de sécurité de l'ONU doivent s'efforcer ensemble, s'ils en ont tous les cinq la volonté, de convaincre la Birmanie d'accepter la main tendue de la communauté internationale pour alléger les souffrances de son peuple.
Peut-être, alors, cette catastrophe, dont la Birmanie restera marquée pour des décennies, incitera-t-elle le régime à s'ouvrir au monde.
Monsieur le ministre quelles dispositions comptez-vous prendre à cette fin ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre.)
M. le président. La parole est à M. Bernard Kouchner, ministre des affaires étrangères et européennes.
M. Bernard Kouchner, ministre des affaires étrangères et européennes. Monsieur le député, les chiffres que vous citez, déjà terribles, seront peut-être encore dépassés demain. Le malheur est immense en Birmanie. Outre les morts pour lesquels nous ne pouvons plus rien, il y a une population qui souffre. Les gens attendent sous la pluie, sans logis, une nourriture qui ne vient pas. Ceux-là sont des millions. Que faire ?
Dès le premier jour, la communauté internationale a essayé de faire parvenir de l'aide. La junte birmane a refusé. Elle voulait bien de l'aide mais pas des sauveteurs. Elle ne voulait pas non plus que cette aide soit distribuée d'une façon massive et régulière aux personnes qui en avaient besoin. Surtout, elle voulait maintenir son référendum, qui a d'ailleurs eu lieu samedi. Ce référendum marquera de honte l'histoire de l'Asie : au milieu d'autant de victimes, essayer de tirer un avantage politique de ce référendum faussé, c'est vraiment ce qu'il y a de pire !
M. François Rochebloine. Très juste !
M. le ministre des affaires étrangères et européennes. Quelques avions - l'un venant de Suisse, un autre du PAM, un autre de Médecins sans frontières, et un autre, aujourd'hui même, venant du ministère des affaires étrangères français - ont réussi à atterrir, mais ce n'est rien du tout. Quelques sauveteurs appartenant aux ONG qui travaillent sur place pourront peut-être accompagner cette manne. Mais au regard des besoins, celle-ci est plus qu'insuffisante : elle est inexistante. Que faire d'autre ?
Nous avons déposé auprès des Nations unies un avant-projet de résolution, qui a reçu quelques soutiens mais pas celui de tous les membres permanents du Conseil de sécurité, en particulier ceux de la Chine et de la Russie ; l'Afrique du Sud, membre non permanent, a également refusé son soutien. En dépit de la résolution reconnaissant le principe de responsabilité de protéger, votée à l'unanimité de l'assemblée générale des Nations unies, nous n'avons pas de droit d'accès. C'est une vraie régression. Malgré le soutien de Mme Merkel, de M. Juncker et d'autres dirigeants européens, nous n'y parvenons pas.
Grâce à un bateau de sa marine qui croisait dans les eaux, la France est en mesure de faire parvenir prochainement 1,5 million de tonnes de nourriture. J'espère que nous ferons montre de suffisamment d'insistance pour que les portes du pays s'ouvrent à cette nourriture. Dans l'attente de ce moment, l'Europe, la France et les Nations unies font pression sans désemparer. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur quelques bancs du groupe Nouveau Centre.)
Auteur : M. Axel Poniatowski
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Politique extérieure
Ministère interrogé : Affaires étrangères et européennes
Ministère répondant : Affaires étrangères et européennes
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 14 mai 2008