agriculture
Question de :
M. Jean-Marc Ayrault
Loire-Atlantique (3e circonscription) - Socialiste, radical, citoyen et divers gauche
Question posée en séance, et publiée le 15 mai 2008
OGM
M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Ayrault, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.M. Jean-Marc Ayrault. Monsieur le Premier ministre, hier, l'Assemblée nationale a rejeté le projet de loi du Gouvernement sur les OGM. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. - Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
M. Jean-François Copé. C'est faux !
M. Jean-Marc Roubaud. Une voix !
M. Jean-Marc Ayrault. Je comprends que vous soyez tenté de relativiser l'événement et de plaider l'accident de parcours. (Rires sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.) Selon vous, ce ne serait qu'un nouvel aléa de la vie parlementaire.
M. Michel Herbillon. C'est exactement cela !
M. Jean-Marc Ayrault. La réalité est tout autre : le vote d'hier, présenté par certains comme une surprise, n'en est pas une ! En première lecture, ici même, le résultat du scrutin avait déjà fait apparaître un doute profond. Je rappelle, et personne ne peut contester ces chiffres, que lors du vote solennel, 57 % des députés ont refusé d'approuver le projet de loi sur les OGM, soit en s'abstenant soit en votant contre.
N'ayez pas la mémoire courte, monsieur le Premier ministre ! S'il est vrai que ce vote traduit la mobilisation des députés de toute la gauche, il reflète surtout une situation très particulière : ce projet de loi n'est ni compris ni accepté par l'opinion publique ! Une majorité de Français n'en veut pas ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.) Il n'est pas davantage soutenu à l'Assemblée nationale, y compris par une partie de votre majorité, et il divise votre gouvernement. N'est-ce pas, madame Kosciusko-Morizet, qui, pour avoir évoqué la " lâcheté " du ministre de l'environnement, avez ensuite été obligée, pour garder votre poste, de faire de plates excuses ? (Applaudissements sur quelques bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.) Voilà la réalité politique à laquelle vous êtes confronté !
Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. C'est lamentable !
M. Jean-Marc Ayrault. Pour en finir, monsieur le Premier ministre, vous avez cédé à votre tentation en convoquant d'urgence, par un communiqué guerrier de Matignon, une commission mixte paritaire, composée de députés et de sénateurs...
M. Patrick Ollier. C'est la Constitution !
M. Jean-Marc Ayrault. ...qui va décider pour tout le monde à l'issue d'un conciliabule. C'est grave ! C'est pourquoi, avec mon collègue Jean-Claude Sandrier, j'ai sollicité du Président de la République qu'il nous accorde une audience pour évoquer avec lui la situation politique née de ce vote et lui demander d'ouvrir une discussion sur un nouveau projet de loi permettant de traduire les conclusions du Grenelle de l'environnement qui, il faut le rappeler, sont très positives. À l'heure où je vous parle, monsieur le Premier ministre, il n'a même pas été accusé réception de cette demande d'audience et de dialogue ! (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
M. le président. Merci !
M. Jean-Marc Ayrault. Ma question est simple, monsieur le Premier ministre : elle porte sur le fonctionnement de nos institutions. Dans une semaine va s'ouvrir à l'Assemblée nationale, en séance publique, le débat sur la réforme des institutions de la Ve République. Or, les institutions, ce ne sont pas seulement des écrits, ce sont aussi des actes !
M. Claude Goasguen. La question !
M. Jean-Marc Ayrault. Quelle est votre conception de la démocratie et des institutions ? Nous attendons de vous non seulement une réponse claire, mais aussi des actes et un engagement. Sinon, ne comptez pas sur nous pour vous servir de faire-valoir ! (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et sur quelques bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)
M. le président. La parole est à M. François Fillon, Premier ministre.
M. François Fillon, Premier ministre. J'en conviens, monsieur Ayrault, la gauche a réussi hier, bien malgré elle, un coup politique qui n'est ni significatif ni constructif ! (Rires et exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et du groupe divers gauche et de la Gauche démocrate et républicaine.)
Il n'est pas significatif parce qu'il intervient après le rejet de toutes les motions de procédure déposées en première lecture et le vote du texte, à l'Assemblée nationale comme au Sénat, et le rejet de l'exception d'irrecevabilité que vous avez vous-même déposée en deuxième lecture.
Il n'est pas non plus constructif, puisqu'il interrompt le débat pourtant nécessaire en deuxième lecture. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) En réalité, hier, vous avez porté un mauvais coup au développement durable, lequel suppose un équilibre entre le respect de l'environnement et le progrès scientifique ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Vives protestations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
M. Christian Bataille. Respectez l'Assemblée nationale !
M. le Premier ministre. Et vous avez porté un mauvais coup porté au Grenelle de l'environnement qui avait permis d'atteindre un équilibre que vous-même n'avez jamais obtenu ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur quelques bancs du groupe Nouveau Centre.) Au lieu d'accepter le dialogue et de rechercher le consensus, vous préférez faire de la procédure et de l'obstruction systématique. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.) C'est votre droit, et je comprends d'autant mieux votre position que vous avez beaucoup à vous faire pardonner !
Mme Marylise Lebranchu. C'est la règle parlementaire !
M. le Premier ministre. Qu'avez-vous fait pour réglementer la culture des OGM dans notre pays ? (" Rien ! " sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Rien ! Qui a autorisé le maïs Monsanto 810 en 1998 ? C'est vous ! (Huées sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Qui a négocié la directive européenne à Bruxelles ? C'est vous ! (" Eh oui ! " sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Enfin, qui a déclaré qu'il ne fallait pas " tomber dans un obscurantisme qui arrêterait toutes les recherches " ? C'est Mme Ségolène Royal ! (Huées sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
Quant aux droits de l'opposition, ils n'ont jamais été autant respectés. Qui a décidé de confier la présidence de la commission des finances à l'opposition ? Ce n'est pas votre majorité lorsqu'elle était au pouvoir, c'est la nôtre ! Lorsque vous étiez aux affaires, avez-vous proposé une réforme de la Constitution visant à donner de nouveaux pouvoirs au Parlement ? Jamais !
Alors, monsieur Ayrault, je réponds à votre question : il n'y a pas d'institutions démocratiques qui consistent à donner à la minorité le pouvoir que le peuple a confié à la majorité ! (Mmes et MM. les députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre se lèvent et applaudissent.)
Auteur : M. Jean-Marc Ayrault
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Environnement
Ministère interrogé : Premier ministre
Ministère répondant : Premier ministre
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 15 mai 2008