établissements
Question de :
M. Rémi Delatte
Côte-d'Or (2e circonscription) - Union pour un Mouvement Populaire
Question posée en séance, et publiée le 16 octobre 2008
SUICIDE D'UN PRISONNIER MINEUR À METZ
M. le président. La parole est à M. Rémi Delatte, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.M. Rémi Delatte. Madame la garde des sceaux, la semaine dernière, un mineur s'est suicidé à la prison de Metz. Un autre mineur, transféré de Metz à Strasbourg, est décédé hier soir, suite à une tentative de suicide. Ces événements, outre le caractère émotionnel qu'ils suscitent, rappellent combien le suicide, en particulier chez les jeunes, est, en France, un vrai problème de santé publique qui touche également le milieu carcéral.
Nous savons que vous avez réagi rapidement. Vous vous êtes rendue à la prison de Metz et vous avez rencontré aussitôt les magistrats et les personnels pénitentiaires. Vous avez également demandé à l'inspection générale judiciaire de vous faire un rapport pour comprendre les raisons qui avaient pu conduire ces mineurs au suicide.
Pouvez-vous, madame la ministre, nous indiquer qu'elles ont été les conclusions de ces inspections et quelles mesures ont été prises afin de limiter le risque de suicide en prison et faire en sorte que ces drames ne se reproduisent pas ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)
M. le président. La parole est à Mme Rachida Dati, garde des sceaux, ministre de la justice.
Mme Rachida Dati, garde des sceaux, ministre de la justice. Tout d'abord, je souhaite m'associer à la douleur des parents des deux adolescents qui se sont suicidés.
Le suicide d'un adolescent est un drame non seulement pour la société, mais aussi pour l'institution judiciaire. Je souhaite d'ailleurs rendre hommage à l'ensemble de l'administration pénitentiaire, souvent confrontée à de tels drames, qui exerce une mission difficile dans des conditions non moins difficiles. Je veux également témoigner tout mon soutien aux magistrats qui jugent tous les jours, et souvent dans l'urgence, des réalités complexes, notamment s'agissant de la délinquance des mineurs.
Après le drame, une inspection, dont je viens de recevoir les conclusions, a été diligentée pour connaître les circonstances ayant conduit au suicide. Tous les acteurs de l'institution judiciaire ont été auditionnés - non seulement les membres de l'administration pénitentiaire, les magistrats, notamment les plus hauts d'entre eux, mais également les gendarmes - afin de prendre toutes les mesures utiles pour prévenir le suicide, en particulier en prison. Ces auditions ont permis d'élaborer de nouveaux outils juridiques pour mieux aider les magistrats à prévenir la délinquance des mineurs. Le jour même, j'ai pris un décret faisant obligation de présenter à un magistrat du parquet tout mineur sur le point d'être placé en détention, obligation qui existe déjà pour une prolongation de garde à vue.
Après plusieurs condamnations et après avoir été interpellé par les gendarmes dans une cave, le mineur qui s'est suicidé à Metz avait été condamné à six mois d'emprisonnement. Le jour de l'audience, il n'était pas comparant. Ses parents ne se sont pas manifestés ; il n'avait pas d'environnement familial, pas d'adulte référent. Nous avons souhaité savoir si les magistrats avaient demandé à ce qu'il comparaisse avant de l'incarcérer, car ce n'est pas une obligation. Désormais, cela en sera une, car il est important que le magistrat puisse expliquer au jeune les raisons pour lesquelles il entre en prison et les conditions dans lesquelles il sera incarcéré.
Avec Roselyne Bachelot, nous avons souhaité anticiper la loi pénitentiaire et nous allons élaborer une " grille d'évaluation des risques suicidaires " adaptée aux mineurs, qui comportera des indicateurs de détection et sera diffusée dans l'ensemble des établissements pénitentiaires à compter du 1er novembre. Une telle grille existe aujourd'hui pour les adultes et c'est l'administration pénitentiaire qui l'adapte aux mineurs.
Je rappelle également que 6 000 agents sur 23 000 surveillants de l'administration pénitentiaire sont formés régulièrement à la prévention du suicide. En cinq ans, le taux de suicide a diminué de 20 % et nous souhaitons qu'il baisse encore.
Lorsqu'un suicide a lieu, c'est un échec pour tout le monde. C'est un problème douloureux pour la société et nous devons tous nous mobiliser pour éviter que de tels drames ne se reproduisent en prison. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)
Auteur : M. Rémi Delatte
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Système pénitentiaire
Ministère interrogé : Justice
Ministère répondant : Justice
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 16 octobre 2008