Question au Gouvernement n° 898 :
perspectives

13e Législature

Question de : M. Jean-Marc Ayrault
Loire-Atlantique (3e circonscription) - Socialiste, radical, citoyen et divers gauche

Question posée en séance, et publiée le 7 janvier 2009

SITUATION ÉCONOMIQUE

M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Ayrault, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
M. Jean-Marc Ayrault. Monsieur le Premier ministre, je veux vous faire part de l'état d'esprit des députés socialistes en ce début d'année 2009. (" Ah ! " sur les bancs des groupes UMP et NC.)
Ce qui nous saisit, c'est la gravité de la crise économique et sociale. Les enjeux sont gigantesques.
M. Michel Herbillon. Les socialistes ne sont pas à la hauteur de ces enjeux !
M. Jean-Marc Ayrault. Le chômage ne cesse d'augmenter depuis plusieurs mois. En novembre, on comptait ainsi plus de 64 000 chômeurs supplémentaires. Le pays est inquiet et attend de sa classe politique qu'elle se montre à la hauteur. (Rires et vives exclamations sur les bancs des groupes UMP et NC.)
M. Richard Mallié. C'est la meilleure !
M. Jean-Marc Ayrault. C'est vrai pour vous, mais c'est vrai pour l'opposition également. Les Français attendent des solutions.
M. Richard Mallié. Des solutions, pas des amendements !
M. Jean-Marc Ayrault. Le 25 septembre dernier, le Président de la République a exprimé son souhait de " refonder le capitalisme " ; tels étaient les mots qu'il a employés le 25 septembre à Toulon. Nous sommes le 6 janvier à Paris ; quelles sont ses solutions ?
Beaucoup a été fait pour les banques, sans exiger de contrepartie de leur part. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR. - Exclamations sur les bancs des groupes UMP et NC.)
M. Richard Mallié. Scandaleux !
M. Jean-Marc Ayrault. Si 350 milliards ont été engagés, l'accès au crédit, tant pour les particuliers que pour les entreprises - en tant que députés, vous le constatez aussi, chers collègues - est chaque jour plus difficile.
Nous étions en droit d'espérer un plan de relance comparable pour les Français, mais ce qui nous est proposé aujourd'hui n'est tout simplement pas à la hauteur de l'enjeu. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC.) Alors que les Allemands viennent de compléter leur premier plan par le déploiement de 50 milliards d'euros, la France présente un plan de 26 milliards, dont 5 ou 6 à peine sont des crédits nouveaux, le reste correspondant à des dépenses déjà engagées. (Exclamations sur les bancs des groupes UMP et NC.)
Face à un tel constat, nous proposons de stimuler la croissance par deux moyens : la relance du pouvoir d'achat et celle de l'investissement.
Pour relancer la consommation, comme va l'entreprendre dès les prochains jours le président américain Barack Obama, nous vous proposons de baisser la TVA, ainsi que les Anglais viennent de le faire, sur les produits de première nécessité, de revaloriser la prime pour l'emploi, les minima sociaux, les pensions de retraite et le SMIC.
Pour encourager l'investissement, nous vous demandons de moduler l'impôt des entreprises en privilégiant celles qui réinvestissent leurs bénéfices et en pénalisant celles qui ont pour priorité la rémunération de leurs actionnaires. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe SRC.)
M. le président. Veuillez poser votre question.
M. Jean-Marc Ayrault. Il ne faut pas non plus oublier l'aide aux collectivités locales par des subventions concrètes, afin qu'elles financent de nouveaux équipements et de nouvelles infrastructures. Ces propositions sont claires et simples, et auront un effet massif et immédiat.
M. Richard Mallié. La question !
M. Jean-Marc Ayrault. Alors ma question est simple, monsieur le Premier ministre. (" Ah ! " sur les bancs des groupes UMP et NC.) Allez-vous écouter l'opposition (" Non ! " sur les bancs du groupe UMP), qui apporte sa pierre à l'édifice et ne demande d'autre faveur que celle de mieux aider le pays à surmonter la crise ? Allez-vous vous attaquer à la racine des problèmes plutôt qu'aux droits des parlementaires, qui sont là pour les soulever ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et sur plusieurs bancs du groupe GDR.)
M. le président. La parole est à M. François Fillon, Premier ministre.
M. François Fillon, Premier ministre. Monsieur le président Ayrault, oui, j'écoute, ainsi que le Gouvernement, l'opposition.
M. Alain Gest. Et il faut avoir de la patience !
M. François Fillon, Premier ministre. Je l'écoute quand elle tente de discréditer l'action du Gouvernement français lorsque, le premier, celui-ci se bat pour lutter contre la crise économique et financière. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe UMP.)
À quoi sert de décrier les 360 milliards que nous avons mis à la disposition du système bancaire, alors même que l'ensemble des grands pays développés ont fait de même (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.) et que le quotidien Le Monde montre, dans un article publié ce soir, que ce plan a permis d'éviter les faillites bancaires et a donc atteint son objectif premier ? (Applaudissements sur quelques bancs du groupe UMP.)
À quoi sert de minimiser le plan de relance français, dont Patrick Devedjian a eu raison de rappeler à l'instant qu'il vient s'ajouter aux 40 milliards déjà consentis par le biais du fonds stratégique et du plan de soutien au PME ?
Vous faites une comparaison intéressante avec l'Allemagne. Alors qu'elle a adopté un modeste plan de 19 milliards, qui n'est pas encore mis en oeuvre, et qu'elle discute en ce moment d'un plan de 50 milliards, nous avons, quant à nous, déjà mis en oeuvre le plan de sauvetage des banques, le fonds stratégique, le plan de soutien aux PME, et nous allons très bientôt débattre du plan de relance.
J'en viens à présent aux propositions du parti socialiste, que je suis naturellement prêt à examiner avec la plus grande attention.
La première est la baisse de la TVA. C'est intéressant ! Nous avons déjà eu l'occasion d'en débattre ici. Cette proposition aurait pour conséquence immédiate de favoriser les importations et de déséquilibrer notre balance des paiements, sans aucun résultat pour l'emploi français. (Protestations sur les bancs des groupes SRC et GDR. - Approbations sur les bancs du groupe UMP.) C'est d'ailleurs une solution qu'aucun autre État européen n'a adoptée à l'exception de la Grande-Bretagne, qui est elle-même dans une situation économique et financière beaucoup plus grave que celle que nous connaissons.
M. Jean Glavany. Arrêtez la mauvaise foi !
M. François Fillon, Premier ministre. La seconde proposition est la modulation de l'impôt sur les sociétés en fonction de l'investissement. C'est intéressant quand on connaît l'urgence de la situation ! Alors que nous avons besoin de soutenir l'investissement et l'emploi immédiats, vous proposez une mesure qui aura de l'effet dans un ou deux ans sans en avoir aucun sur l'investissement aujourd'hui. (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR. - Applaudissements sur de nombreux bancs des groupes UMP et NC.)
Monsieur Ayrault, oui, nous sommes prêts à discuter avec l'opposition, mais je souhaiterais que vous puissiez renouveler vos idées, en particulier au regard des initiatives que nous avons prises.
Vous nous demandez ainsi de revaloriser la prime pour l'emploi, alors que nous venons, avec le revenu de solidarité active, de réaliser un effort considérable, qui aboutira, dès cette année, à l'augmentation du pouvoir d'achat des plus défavorisés. (Vifs applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Données clés

Auteur : M. Jean-Marc Ayrault

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Politique économique

Ministère interrogé : Premier ministre

Ministère répondant : Premier ministre

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 7 janvier 2009

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