gouvernement
Question de :
M. Jean Glavany
Hautes-Pyrénées (3e circonscription) - Socialiste, radical, citoyen et divers gauche
Question posée en séance, et publiée le 5 février 2009
PUBLICATION DU LIVRE DE PIERRE PÉAN
Le monde selon K
M. Jean Glavany. Monsieur le ministre des affaires étrangères, vous savez de quoi je veux vous parler puisque, pour des raisons républicaines, j'ai souhaité vous en prévenir. Un livre paru ce matin contient des allégations contre vous qui pourraient, si elles sont avérées, être extrêmement lourdes dans la mesure où elles révèleraient une confusion grave entre vos activités politiques et d'autres activités, plus privées.
Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Charognard !
M. Jean Glavany. C'est animé du sens des responsabilités que je veux vous interroger, ...
Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Où est donc Julien Dray !
M. Jean Glavany....car nous devons toujours veiller ici au respect des personnes et de leurs droits, ce qui n'a pas toujours été le cas dans cet hémicycle : chacun devrait balayer devant sa porte. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC. - Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
M. Richard Mallié. Vous le premier !
M. Jean Glavany. Nous ne sommes pas des juges, encore moins des procureurs.
Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Alors pourquoi cette question ?
M. Jean Glavany. Nous sommes des élus de la nation et la démocratie a des exigences : la transparence, le contrôle de l'action du Gouvernement par le Parlement.
Monsieur le ministre, je pense qu'il est de votre intérêt, de celui du Gouvernement et de celui de la représentation nationale que vous puissiez nous donner maintenant des explications. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
M. François Sauvadet. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Bernard Kouchner, ministre des affaires étrangères et européennes.
M. Bernard Kouchner, ministre des affaires étrangères et européennes. Je remercie tout d'abord M. le Premier ministre de me laisser répondre. Pour une fois, mesdames, messieurs les députés, vous me permettez de m'appuyer sur un texte afin de n'omettre aucun mot.
Monsieur Glavany, vous avez fait allusion à un livre qui met en cause mon honneur, mon intégrité, l'engagement de toute une vie, l'engagement d'un homme libre au service de son pays. Aujourd'hui, devant la représentation nationale, je souhaite répondre à vos questions et défendre mon honneur.
De quoi m'accuse-t-on dans ce livre de trois cent vingt pages à charge, qui n'apporte aucune preuve et dont l'auteur n'a malheureusement jamais cherché à me rencontrer, un livre qui fait de moi, ligne après ligne, un agent de l'étranger, un mauvais Français aux origines douteuses, âpre au gain ?
Qu'ai-je fait depuis quarante ans, monsieur le député ? Qu'ai-je fait au Biafra, en Bosnie, au Vietnam, en mer de Chine, au Rwanda, au Kosovo, au Darfour ? Qu'ai-je fait ? Ai-je bradé les intérêts de notre pays ? Ai-je servi un pays étranger ? Ai-je été à la solde de l'ennemi ? À entendre certains, j'aurais trafiqué des armes, blanchi de l'argent. Mais les Français savent ce que j'ai fait : j'ai simplement été aux côtés des victimes, et je le serai toujours !
Avant d'avoir l'honneur d'être appelé au Gouvernement par le Président de la République et le Premier ministre, oui, j'ai travaillé. J'ai exercé en tant qu'expert dans de nombreux pays, en Europe et en Afrique, afin d'aider au développement de la santé publique, ma spécialité.
Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. Au Gabon !
M. Bernard Kouchner, ministre des affaires étrangères. Eh bien, au Gabon, avec les Gabonais, j'ai travaillé pendant trois ans à un beau projet de création d'un système d'assurance maladie dans un pays où la moitié de la population était indigente et n'avait pas accès aux soins. Est-ce immoral ? Est-ce indigne ? Est-ce déshonorant ? Ce travail, je l'ai fait pendant trois ans en toute transparence, en toute légalité. J'ai payé mes impôts en France. Les chiffres, vous les connaissez déjà, ils sont publiés. Je les tiens à votre disposition ainsi que ma déclaration de patrimoine, si vous le souhaitez.
On me parle de conflits d'intérêts. Mais à aucun moment, ni au Gabon ni ailleurs, monsieur Glavany, je ne me suis servi de mes fonctions ministérielles. Je n'en avais pas besoin. À aucun moment, je n'ai fait de mélanges des genres. À aucun moment, je le répète. Mes actions en faveur de la santé publique furent légales, légitimes, transparentes et, pardonnez-moi de le dire, morales.
Quant à ESTHER - Ensemble pour une solidarité thérapeutique hospitalière en réseau -, c'est moi qui l'ai fondé et j'ai été, après d'autres, président du conseil d'administration, qui prenait les décisions avec les représentants des associations. Je tiens les documents à votre disposition, y compris la réaction ce matin des associations de lutte contre le sida. Le président bénévole n'avait aucun pouvoir, si ce n'est d'administrer ce conseil d'administration, si vous voulez bien me pardonner ce pléonasme.
Monsieur Glavany, ce n'est pas vous qui m'accusez sans preuve. C'est ce livre, et je comprends votre réaction. Je la comprends parce que j'en souffre.
Vous me parlez aussi de Jean-Marie Bockel. Jamais je n'ai demandé son changement d'affectation. (Murmures sur les bancs du groupe SRC.)
M. Jean Glavany. Je n'ai absolument pas évoqué Jean-Marie Bockel !
M. Bernard Kouchner, ministre des affaires étrangères. Mais d'autres en parlent... Vous avez oublié quelque chose, excusez-moi de le rappeler ! C'est un lapsus sans doute !
M. Bruno Le Roux. Un dérapage.
M. Bernard Kouchner, ministre des affaires étrangères. Ce travail, je l'ai fait pendant trois ans en toute transparence et en toute légalité, je le répète.
Permettez-moi de conclure maintenant.
Tout au long de ce livre fait d'amalgames, d'insinuations et d'allusions insidieuses, il y a des expressions très précises, qui ne sont pas là par hasard : elles m'accusent de personnifier la contre-idée de la France, c'est-à-dire l'anti-France, le cosmopolitisme.
L'accusation de cosmopolitisme, en des temps difficiles, mesdames, messieurs les députés, ça ne vous rappelle rien ? (Murmures sur les bancs du groupe SRC.) Moi, si. Et je vais vous le dire : cela dépasse très largement ma personne.
Je vous remercie, monsieur le député, du ton que vous avez employé pour poser cette question grave. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et sur quelques bancs du groupe NC.)
Auteur : M. Jean Glavany
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : État
Ministère interrogé : Affaires étrangères et européennes
Ministère répondant : Affaires étrangères et européennes
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 5 février 2009