lignes à haute tension
Question de :
M. Guénhaël Huet
Manche (2e circonscription) - Union pour un Mouvement Populaire
M. Guénhaël Huet interroge M. le ministre d'État, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat, sur la construction d'une ligne à très haute tension (THT) de 400 kV à travers le département de la Manche. Destinée à acheminer l'électricité produite par le réacteur nucléaire de troisième génération, dit "EPR" pour european pressurized reactor, actuellement en construction sur le site du centre nucléaire de production d'électricité (CNPE) de Flamanville et dont la mise en service est prévue en 2012, cette ligne traversera de part en part la Manche pour continuer vers la Mayenne. Confiée à RTE, gestionnaire du réseau de transport d'électricité, sa réalisation soulève de nombreuses oppositions liées aux larges incertitudes qui subsistent quant à son incidence sur l'environnement et ses conséquences sur la santé humaine et animale. Il lui demande donc s'il envisage de répondre favorablement à la demande d'une étude épidémiologique indépendante, formulée par de nombreuses associations et élus. Il lui demande aussi quelles mesures il lui apparaît possible de prendre en faveur de l'enfouissement, dans les zones sensibles et particulièrement dans le sud de la Manche, susceptible de minorer les atteintes à l'environnement et à la santé des populations et des cheptels.
Réponse en séance, et publiée le 28 avril 2010
LIGNE À TRÈS HAUTE TENSION DANS LA MANCHE
Mme la présidente. La parole est à M. Guénhaël Huet, pour exposer sa question, n° 1019.M. Guénhaël Huet. Madame la secrétaire d'État auprès du ministre de l'écologie, je voulais attirer l'attention du ministre de l'écologie ainsi que la vôtre sur la construction de l'EPR à Flamanville dans le département de la Manche. Cette décision a été prise il y a quelques années, le chantier est bien avancé et vous imaginez qu'il a soulevé une vive opposition des lobbies anti-nucléaires un peu partout.
Il y a dans le département de la Manche mais également dans ceux du Calvados et de la Mayenne un certain nombre d'élus et de riverains qui ne sont pas nécessairement des anti-nucléaires mais qui s'inquiètent beaucoup du tracé de la ligne THT et du mépris avec lequel RTE traite les populations des communes traversées.
L'enquête publique a eu lieu à l'automne dernier. Les commissaires enquêteurs ont rendu leurs conclusions au mois de novembre, ils ont émis de fortes réserves, indiquant précisément que, si elles n'étaient pas levées, leur avis devait être considéré comme défavorable.
Or M. le préfet de la Manche, préfet coordonnateur, vient de rendre son avis, qu'il a transmis à votre ministère il y a quelques jours. Il écarte d'un revers de la main les deux principaux sujets : la demande d'une étude épidémiologique indépendante pour voir très précisément quels peuvent être les risques pour la santé humaine et animale, et le problème de l'enfouissement partiel que nous sommes très nombreux à réclamer, et j'associe à cette question Philippe Gosselin, député de la Manche, Jean-Yves Cousin, député du Calvados, et Yannick Favennec, député de la Mayenne. Nous n'avons pas de demandes extraordinaires, mais nous souhaiterions que soit bien regardée la possibilité de l'enfouissement partiel, et le ministre doit absolument demander une étude épidémiologique indépendante.
J'aimerais avoir votre sentiment sur ces deux sujets sur lesquels nous sommes vraiment très attendus par les populations dont les communes sont traversées par ces lignes THT.
Mme la présidente. La parole est à Mme Valérie Létard, secrétaire d'État auprès du ministre de l'écologie.
Mme Valérie Létard, secrétaire d'État auprès du ministre de l'écologie. Monsieur le député, le projet de construction d'une ligne électrique à très haute tension, dit projet Cotentin-Maine, est avant tout nécessaire pour assurer la stabilité du réseau de transport de l'électricité de l'Ouest de la France, où il existe des risques de rupture de synchronisme dus à la forte augmentation des transits d'électricité sur l'axe Nord-Sud de la région.
Ce projet a fait l'objet d'une concertation approfondie et d'une enquête publique qui s'est déroulée mi-2009.
Au cours de cette concertation, les deux points évoqués par votre question, à savoir les effets sur la santé des champs électromagnétiques émis par les lignes et la possibilité de mise en souterrain partielle de la ligne ont largement été évoqués. Un cabinet indépendant a même été missionné par le Gouvernement pour étudier les différentes options techniques envisageables.
À l'issue de cette étude, il est apparu que la mise en souterrain de la ligne de 400 kilovolts ne constitue pas une solution envisageable tant du fait des très forts surcoûts qui limitent cette possibilité à des distances très faibles qu'en raison de ses impacts environnementaux : immobilisation totale d'une bande de quinze mètres de large, destruction de haies, de talus, très grand impact du chantier, mise en place de postes aérosouterrains très impactants. L'environnement de la ligne étant relativement homogène, le choix du ou des tronçons à mettre en souterrain aurait en outre un caractère arbitraire qui ne correspondrait pas au principe d'équité.
Cependant, en droite ligne avec les ambitions du Grenelle de l'environnement, le Gouvernement a décidé de prendre des mesures ambitieuses en vue d'améliorer l'insertion environnementale du projet.
Le tracé de la ligne a été étudié pour s'éloigner autant que possible des habitations, exploitations agricoles et sites sensibles et éviter tout surplomb d'habitations et de bâtiments d'élevage ; 270 kilomètres de lignes électriques basse, haute et très haute tension seront mis en souterrain sur les territoires concernés, soit le double de la longueur de la nouvelle ligne en site nouveau, pour un coût total de 140 millions d'euros. Cet objectif va très au-delà de la stabilisation du kilométrage des lignes aériennes que prévoit le contrat de service public de RTE.
Les particuliers qui souhaitent vendre leurs biens immobiliers pourront demander à RTE de compenser la différence. En outre, dans une bande de cent mètres de chaque côté de l'axe de la nouvelle ligne, RTE devra, en cas de demande en ce sens des riverains concernés, acquérir les habitations.
Un contrôle renforcé et régulier des champs électromagnétiques devra être réalisé selon un protocole agréé avec l'administration, les populations riveraines étant étroitement associés à la définition des modalités de ce contrôle.
Ainsi, en réponse aux interrogations formulées par les populations, chaque riverain pourra faire réaliser gratuitement des mesures de champ magnétique avant et après la mise en service de la ligne, et un suivi sanitaire des personnes vivant à proximité de la ligne sera réalisé sur la base du volontariat.
Ces dispositions très ambitieuses, et inédites pour un tel ouvrage, semblent à même de répondre pleinement à vos interrogations. J'ai bien entendu vos deux questions sur l'étude épidémiologique et la partie des lignes enterrées, et j'en tiendrai informé le ministre d'État pour qu'il veille à ce que ces préoccupations soient prises en considération le mieux possible.
Mme la présidente. La parole est à M. Guénhaël Huet.
M. Guénhaël Huet. Madame la secrétaire d'État, merci tout de même. Je dis " tout de même " parce que vous imaginez bien que cette réponse n'est pas à la hauteur des attentes des populations. Je vous demande instamment d'intervenir pour qu'il y ait un traitement politique - au bon sens du terme - de ce dossier parce que les populations attendent autre chose que ce qui leur est dit depuis quelques mois par RTE et le préfet de la Manche. Au nom de MM. Philippe Gosselin, Yannick Favennec, Alain Cousin et d'autres élus, je vous demande d'organiser le plus rapidement possible un rendez-vous au ministère avec M. Borloo et vous-même. C'est un sujet extrêmement important pour nous.
Auteur : M. Guénhaël Huet
Type de question : Question orale
Rubrique : Énergie et carburants
Ministère interrogé : Écologie, énergie, développement durable et mer
Ministère répondant : Écologie, énergie, développement durable et mer
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 20 avril 2010