lutte contre l'exclusion
Question de :
Mme Catherine Génisson
Pas-de-Calais (2e circonscription) - Socialiste, radical, citoyen et divers gauche
Mme Catherine Génisson attire l'attention de M. le secrétaire d'État chargé de l'emploi sur la situation en péril de l'insertion par l'activité économique dans le Nord-Pas-de-Calais. Les coupes budgétaires, la fin des contrats aidés suscitent de grandes inquiétudes de la part des structures spécialisées. Elles estiment qu'elles ne seront, dès 2010-2011, plus en mesure de remplir leurs missions, et ce malgré l'importance des besoins liés au contexte économique et social régional.
Réponse en séance, et publiée le 23 juin 2010
SITUATION FINANCIÈRE DES STRUCTURES D'INSERTION PAR L'ACTIVITÉ ÉCONOMIQUE DANS LE NORD-PAS-DE-CALAIS
M. le président. La parole est à Mme Catherine Génisson, pour exposer sa question, n° 1130.Mme Catherine Génisson. Monsieur le secrétaire d'État chargé de l'emploi, je souhaite vous interroger sur l'insertion par l'activité économique.
Les besoins d'accompagnement dans l'emploi sont particulièrement criants en période de crise, notamment dans le Nord-Pas-de-Calais où, malgré le dynamisme et l'engagement des acteurs économiques et politiques locaux, des difficultés préexistantes se sont largement aggravées ces derniers mois. Ainsi, si l'augmentation du chômage sur un an est inférieure à la moyenne nationale, on observe sur la même période une hausse considérable du chômage de longue durée - près de 25 % -, dont les effets destructeurs sont hélas bien connus.
Or, et vous ne pouvez que souscrire à ce constat, l'insertion par l'activité économique permet à des dizaines de milliers de personnes chaque année de retrouver un emploi grâce à un parcours d'insertion adapté. En effet, avec un taux d'insertion en CDD ou CDI à l'issue de leur contrat de près de 40 % de ses bénéficiaires, ce dispositif, auquel je vous sais très attaché, est une solution pertinente et efficace pour répondre à la souffrance économique et sociale des plus exclus du marché du travail.
Malgré cette indéniable réussite, l'insertion par l'activité économique est aujourd'hui le parent pauvre des politiques publiques de l'emploi. Le budget de l'État dans ce domaine s'élève à 207 millions d'euros, dont 140 millions pour les entreprises d'insertion pour l'exercice budgétaire 2010. Permettez-moi de vous rappeler que le coût du bouclier fiscal est plus de deux fois supérieur à ce montant, pour un nombre de bénéficiaires et une utilité sociale que je laisse à votre appréciation.
Comme dans un bon nombre de régions, les acteurs de l'insertion par l'activité économique du Nord-Pas-de-Calais, expriment leur grande inquiétude face à un manque de moyens criant. Dans notre région, les 145 postes supplémentaires réalisés dans le cadre du plan de relance n'ont, à ce jour, pas de solution de financement claire. Les entreprises d'insertion craignent d'être dans l'obligation de se séparer des bénéficiaires de ces contrats, ou encore, en raison du caractère fongible des enveloppes budgétaires, de voir ces contrats financés au détriment d'autres projets. Elles dénoncent aujourd'hui un manque de 1,2 million d'euros pour assurer sereinement leurs missions.
Plus grave encore, il existe un risque de détournement des crédits de l'insertion par l'activité économique vers le contrat unique d'insertion, et notamment le contrat initiative-emploi, qui concerne le secteur marchand. Ce contrat, destiné aux chômeurs directement employables et qui ne bénéficie donc pas aux plus exclus du marché de l'emploi, a été largement surconsommé. Or il apparaît que la délégation générale de l'emploi et de la formation professionnelle opère actuellement des transferts budgétaires afin de couvrir cette surconsommation au détriment de l'insertion par l'activité économique.
M. le président. Je vous prie de conclure.
Mme Catherine Génisson. À cela vient s'ajouter le problème récurrent de l'absence de revalorisation de l'aide au poste. Son montant est identique depuis dix ans, ce qui revient à mettre directement à la charge de l'entreprise d'insertion l'augmentation de 41 % du SMIC sur la même période. Cette situation n'est plus tenable pour ces entreprises.
Un poste d'insertion en moins, c'est un exclu en plus, c'est la dette sociale qui s'aggrave. Je souhaite, monsieur le secrétaire d'État, connaître vos décisions à cet égard.
M. le président. La parole est à M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État.
M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État. Je connais bien votre région, madame la députée, et je sais que vous êtes très vigilante sur les questions d'emploi et notamment d'insertion par l'activité économique.
Pour ma part, je crois à l'insertion par l'activité économique, vous avez eu la gentillesse de le rappeler. Dans les fonctions bénévoles que j ai précédemment exercées, je me suis en particulier occupé d'une entreprise d'insertion.
Je ne crois pas à la mise en concurrence avec le secteur concurrentiel. En effet, l'insertion par l'activité économique permet, en se donnant le temps, de ramener des personnes très éloignées de l'emploi vers le marché normal du travail.
Le sujet est très délicat. L'insertion par l'activité économique est une vraie activité dans le secteur concurrentiel ; cependant, on s'y occupe de personnes en difficulté, ce qui nécessite un accompagnement qui prend du temps, mais qui est indispensable pour que le processus d'insertion réussisse.
Les moyens de l'insertion par l'activité économique n'ont pas été diminués. Ils ont au contraire été augmentés dans des proportions considérables. Depuis 2005, l'enveloppe consacrée à l'insertion par l'activité économique a augmenté de 60 %. Pour 2010, elle est passée à 200 millions d'euros, dont 140 millions pour le financement de l'aide au poste, 13 millions pour le financement de l'aide à l'accompagnement, 23,5 millions pour le financement de l'aide dans les ateliers et chantiers d'insertion, 21 millions pour les fonds départementaux d'insertion. En outre, dans le cadre du plan de relance, j'ai veillé personnellement à ce que l'insertion par l'activité économique en bénéficie à hauteur de 25 millions d'euros.
Tout cela a été renforcé par une fongibilité qui est positive, notamment pour les fonds départementaux d'insertion, ce qui leur permet désormais de soutenir les structures en difficulté, alors qu'auparavant l'étanchéité des dispositifs empêchait de nombreux départementaux de faire face aux urgences.
Une enveloppe de 14,9 millions d'euros a été affectée à la région Nord-Pas-de-Calais, à laquelle il convient d'ajouter les crédits du Fonds social européen - 1,7 million - et les 3,5 millions du plan de relance.
Il ne me semble pas que l'on doive opposer l'utilisation des contrats aidés et l'insertion par l'activité économique, car des passerelles existent entre les deux.
Je m'engage à me pencher sur la situation dans le Nord-Pas-de-Calais en demandant à mes services de faire rapidement le point, et je reviendrai vers vous, madame la députée, pour que nous puissions avancer conjointement.
M. le président. La parole est à Mme Catherine Génisson.
Mme Catherine Génisson. Je vous remercie, monsieur le secrétaire d'État, d'avoir répondu de façon aussi précise sur un sujet qui nous mobilise l'un et l'autre, comme du reste la plupart d'entre nous.
Il semble qu'il y ait des nouvelles alarmantes concernant le Fonds social européen. Je vous remercie de regarder dans le détail la situation de la région Nord-Pas-de-Calais, où le public concerné augmente, malheureusement, en cette période de crise.
Auteur : Mme Catherine Génisson
Type de question : Question orale
Rubrique : Politique sociale
Ministère interrogé : Emploi
Ministère répondant : Emploi
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 15 juin 2010