Question orale n° 1193 :
pêche

13e Législature

Question de : M. Gilbert Le Bris
Finistère (8e circonscription) - Socialiste, radical, citoyen et divers gauche

M. Gilbert Le Bris rappelle à M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche, de la ruralité et de l'aménagement du territoire, que depuis l'été 2010, les armateurs à la pêche ont reçu des demandes de remboursement pour trois aides : Erika, contrats bleus et Fonds de prévention des aléas de la pêche (FPAP), déjà perçues mais déclarées non eurocompatibles. Première remarque : l'Europe se montre sourcilleuse pour des aides indispensables à la survie des pêches maritimes alors qu'elle a su faire preuve de grande mansuétude, lors de la récente crise financière, pour des appuis forts et étatiques à d'autres secteurs économiques. Deuxième remarque : cette interdiction d'aide pour compenser des conjonctures difficiles (prix du carburant, pollutions accidentelles) est une aubaine, pour la Commission européenne, permettant ainsi d'atteindre l'objectif affiché de réduction de la flotte de pêche à moindre coût. Troisième remarque : comment comprendre qu'au même moment et pour les mêmes motifs, d'autres États (l'Espagne ou la Belgique) ont pu soutenir leurs pêches par le biais de prêts bonifiés, de diminution de cotisations sociales ou même d'embarquement avec salaires dérisoires de marins étrangers ? Un constat : l'État français n'a pas voulu ou pas su se battre pour ses pêcheurs dans ce dossier. Aucun recours n'a été formé contre la décision de la Commission du 14 juillet 2004 déclarant les aides illégales et contre la décision de la Commission du 20 mai 2008 déclarant aussi illégales les aides du FPAP. Une piètre présentation des dossiers, aucune mise en garde française sur l'eurocompatibilité, un risque de demandes reconventionnelles sur d'autres aides, des atermoiements sur le recouvrement et l'exigence malgré tout d'intérêts moratoires : on ne peut pas dire que l'État ait brillé par son intérêt porté à nos pêches maritimes dans ce contentieux. Il semble que désormais le Gouvernement s'oriente vers un recouvrement inéquitable, ciblant particulièrement les armements de pêche hauturière, c'est-à-dire les entreprises les plus consommatrices en carburant mais aussi les plus stratégiques économiquement par la démultiplication d'emplois et de valeur ajoutée qu'elles génèrent. Il lui demande s'il va respecter l'engagement pris par Nicolas Sarkozy lui-même auprès des équipages et des armements de les exonérer du remboursement des aides gazole. Il lui demande aussi quelle attention il va porter aux entreprises encore en vie (pour celles déjà liquidées le problème ne se pose même plus malheureusement) et dont la viabilité économique est hypothéquée par cette véritable épée de Damoclès de demande de remboursement.

Réponse en séance, et publiée le 8 décembre 2010

AIDES AUX ARMEMENTS DE PÊCHE

Mme la présidente. La parole est à M. Gilbert Le Bris, pour exposer sa question, n° 1193.
M. Gilbert Le Bris. Depuis l'été 2010, les armateurs à la pêche ont reçu des demandes de remboursement pour trois aides : Erika, contrats bleus et fonds de prévention des aléas de la pêche - FPAP -, aides déjà perçues mais déclarées non eurocompatibles. Première remarque : l'Europe se montre brutalement sourcilleuse pour des aides indispensables à la survie des pêches maritimes, alors qu'elle a su faire preuve de grande mansuétude, lors de la récente crise financière, pour des appuis étatiques forts à d'autres secteurs économiques.
Deuxième remarque : cette interdiction d'aide pour compenser des conjonctures difficiles - prix du carburant, pollutions accidentelles - est une aubaine pour la Commission européenne, lui permettant ainsi d'atteindre l'objectif affiché de réduction de la flotte de pêche à moindre coût.
Troisième remarque : comment comprendre qu'au même moment et pour les mêmes motifs, d'autres États - je pense à l'Espagne ou à la Belgique - ont pu soutenir leurs pêches par le biais de prêts bonifiés, de diminution de cotisations sociales ou même d'embarquement, avec salaires dérisoires, de marins étrangers ? Je ne peux que constater que le gouvernement français n'a pas voulu ou pas su se battre pour ses pêcheurs dans ce dossier. Aucun recours n'a été formé contre la décision de la Commission du 14 juillet 2004 déclarant les aides illégales et contre la décision de la Commission du 20 mai 2008 déclarant également illégales les aides du FPAP. Une piètre présentation des dossiers, aucune mise en garde française sur l'eurocompatibilité, un risque de demandes reconventionnelles pour d'autres aides, des atermoiements pour le recouvrement et l'exigence d'intérêts moratoires : on ne peut pas dire que l'État ait brillé par l'intérêt qu'il a porté à nos pêches maritimes dans ce contentieux ! Il semble que, désormais le Gouvernement s'oriente vers un recouvrement inéquitable, ciblant particulièrement les armements de pêche hauturière, c'est-à-dire les entreprises les plus consommatrices en carburant, mais aussi les plus stratégiques économiquement par la démultiplication d'emplois et de valeur ajoutée qu'elles génèrent.
L'engagement pris par Nicolas Sarkozy lui-même auprès des équipages et des armements de les exonérer du remboursement des aides gazole sera-t-il respecté ? Quelle attention sera portée aux entreprises encore en vie - pour celles déjà liquidées, le problème ne se pose malheureusement même plus ! -, dont la viabilité économique est hypothéquée par cette véritable épée de Damoclès de demande de remboursement ?
Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Anne Montchamp, secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la cohésion sociale.
Mme Marie-Anne Montchamp, secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la cohésion sociale. Monsieur Gilbert Le Bris, je vous prie tout d'abord de bien vouloir excuser l'absence de mon collègue Bruno Le Maire qui, comme vous le savez, accompagne le Président de la République dans son déplacement en Inde.
Vous l'avez interrogé sur les conséquences du recouvrement des aides allouées aux entreprises de pêche par le Fonds de prévention des aléas à la pêche, des aides dites " Erika " et, enfin, de certaines aides versées au titre des contrats bleus.
Les aides dites Erika et celles du FPAP, d'une part, les contrats bleus, d'autre part, s'inscrivent dans deux problématiques différentes. Les aides Erika et les aides du FPAP ont été déclarées illégales et incompatibles avec le marché commun par la Commission, qui en a ordonné le remboursement. Les aides Erika étaient des allégements de charges sociales consenties entre avril et octobre 2000 à des entreprises de pêche situées dans les départements autres que les six directement touchés par la marée noire provoquée par L'Erika. Le FPAP était un mécanisme vertueux destiné à aider les professionnels à se prémunir contre les hausses du gazole. Cependant, la hausse ininterrompue du gazole entre 2004 et 2008 a conduit à l'échec de ce dispositif et les avances consenties par l'État pour aider à son démarrage ont finalement pris le caractère de subventions.
Depuis sa prise de fonction, Bruno Le Maire n'a eu de cesse de négocier avec la Commission européenne pour réduire au maximum l'étendue de ces remboursements. Il a ainsi obtenu une application rétroactive du principe dit de minimis qui permet d'exonérer du remboursement la grande majorité des entreprises ayant reçu ces aides. Le recouvrement des aides est la seule attitude responsable. Agir autrement conduirait la France à se voir infliger une très lourde amende assortie d'astreintes sans qu'elle soit exonérée de l'obligation de remboursement par les entreprises. Les préfets du littoral assurent un suivi individuel des entreprises concernées et les accompagnent en mobilisant tous les moyens légaux pour les aider à passer ce cap difficile.
Les contrats bleus, en revanche, relèvent d'un dispositif notifié à la Commission, qui a validé vingt-quatre des vingt-six mesures présentées. Les mesures invalidées représentent moins de 10 % des sommes versées dans ce cadre et les montants correspondants seront, autant que possible, déduits des versements à venir.
Telles sont, monsieur le député, les précisions que Bruno Le Maire souhaitait vous apporter en réponse à votre question.

Données clés

Auteur : M. Gilbert Le Bris

Type de question : Question orale

Rubrique : Aquaculture et pêche professionnelle

Ministère interrogé : Agriculture, alimentation, pêche, ruralité et aménagement du territoire

Ministère répondant : Agriculture, alimentation, pêche, ruralité et aménagement du territoire

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 30 novembre 2010

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