énergie photovoltaïque
Question de :
Mme Catherine Coutelle
Vienne (2e circonscription) - Socialiste, radical, citoyen et divers gauche
Mme Catherine Coutelle interroge Mme la ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement sur la réflexion conduite à la suite du décret n° 2010-1510 du 9 décembre 2010 suspendant l'obligation d'achat de l'électricité produite par certaines installations utilisant l'énergie radiative du soleil. Elle signale les conséquences importantes pour l'activité économique, les projets en cours et les emplois liés à ce secteur. Elle souhaite connaître les intentions du Gouvernement pour répondre aux inquiétudes des professionnels, d'une part, et pour atteindre, d'autre part, l'objectif de production, par des énergies renouvelables, de 23 % de l'énergie consommée en France (Grenelle de l'environnement).
Réponse en séance, et publiée le 2 février 2011
CONSÉQUENCES DE LA SUSPENSION DE L'OBLIGATION D'ACHAT D'ÉLECTRICITÉ D'ORIGINE PHOTOVOLTAÏQUE
Mme la présidente. La parole est à Mme Catherine Coutelle, pour exposer sa question, n° 1260.Mme Catherine Coutelle. En septembre 2009, l'entreprise Solaire Direct, soutenue par la région Poitou-Charentes, décidait de créer à Châtellerault une usine de fabrication de panneaux solaires photovoltaïques dont la production devait commencer au début de l'année 2011 avec quatre-vingts emplois annoncés.
Solaire Direct, qui, avec Photowatt en Isère, se positionne de plus en plus en amont de la chaîne, avait levé des fonds propres importants. Cette annonce était donc très attendue à Châtellerault, ville dont le bassin d'emploi est fortement touché par la crise. Toutefois, après Blanquefort en Gironde, où l'américain First Solar a décidé d'ajourner l'implantation d'une usine, Solaire Direct a gelé l'investissement de 11 millions d'euros à la fin de l'année 2010.
C'est un exemple, parmi de nombreux autres, de projets stoppés nets par le moratoire de trois mois décidé par le Gouvernement sur le rachat de l'électricité d'origine photovoltaïque.
La filière photovoltaïque est en plein doute : elle perd des emplois ou ne crée pas ceux annoncés. Et pourtant cette filière existe bel et bien dans notre pays : elle compte déjà 25 000 emplois, dont 7 000 en recherche et développement et en production, et elle ne demande qu'à s'étoffer pour nous permettre de sortir de notre situation de dépendance à l'égard de la Chine, du Japon ou de l'Allemagne.
À la veille de la fin du moratoire, fixée au 11 février, après avoir auditionné dans le cadre de la commission des affaires économiques des acteurs de la filière photovoltaïque, après avoir été interpellée par des acteurs locaux - élus, professionnels, agriculteurs et même particuliers envers lesquels les banques se montrent désormais frileuses -, après avoir écouté les propositions de Geneviève Fioraso, députée de l'Isère et membre de la mission Charpin, je souhaitais interroger le Gouvernement sur l'avenir de cette production d'énergie.
Après un emballement, la filière retient son souffle dans l'attente des décisions du Gouvernement. Celui-ci va-t-il la rassurer et la conforter en lui permettant de sortir de l'impasse par le haut ?
Cette filière a besoin de règles claires et pérennes de financement pour éviter la spéculation mais aussi pour avoir des perspectives dans la durée.
Elle a besoin de poursuivre la recherche et le développement en matière de segments - matériaux, composants, systèmes - indispensables à l'innovation pour un meilleur rendement et une production soucieuse de l'environnement ce qui rend nécessaire l'établissement d'un bilan carbone.
Elle a également besoin d'objectifs de production ambitieux pour le pays. Nous nous sommes engagés à ce que d'ici à 2020, 23 % de l'énergie consommée provienne d'énergies renouvelables. Les 5 400 mégawatts prévus pour les installations solaires d'ici à 2020 paraissent bien modestes au regard de l'objectif de 50 000 mégawatts fixé par l'Allemagne, qui ira sans doute bien au-delà.
Cette filière a besoin d'une certification effective des panneaux. Promise depuis plus de deux ans par M. Borloo, celle-ci assurerait en effet une production et un recyclage soucieux de l'environnement.
Elle a enfin besoin d'une simplification des procédures. En Allemagne, quinze jours suffisent pour obtenir le raccordement de panneaux quand, en France, trois mois sont nécessaires, avec un délai beaucoup plus long encore pour faire aboutir les projets.
Mme la présidente. Madame Coutelle, il faut conclure.
Mme Catherine Coutelle. Il s'agit de conforter le savoir-faire de nos entreprises en ce domaine, pour faire en sorte que la France soit fidèle aux engagements du Grenelle et que cette filière connaisse le développement qu'elle mérite.
Mme la présidente. Madame Coutelle, permettez-moi de vous rappeler que vous disposez de trois minutes au total pour poser votre question et pour répondre au ministre. Vous avez déjà dépassé l'ensemble de votre temps de parole.
Mme Catherine Coutelle. Veuillez m'excuser, madame la présidente, je croyais disposer de six minutes.
Mme la présidente. Six minutes, c'est le temps total prévu pour l'orateur et le Gouvernement.
La parole est à M. Thierry Mariani, secrétaire d'État chargé des transports.
M. Thierry Mariani, secrétaire d'État chargé des transports. Madame la députée, je vous prie d'accepter les excuses de Nathalie Kosciusko-Morizet, qui aurait aimé pouvoir répondre à votre question.
Comme vous le soulignez, nous avons souscrit dans le cadre du Grenelle de l'environnement et du paquet " énergie-climat " l'engagement de porter à 23 % la part des énergies renouvelables dans notre consommation d'énergie finale d'ici à 2020. Cet objectif a été décliné dans la programmation pluriannuelle des investissements. Du point de vue quantitatif, le photovoltaïque occupe une place relativement modeste, compte tenu des spécificités de cette énergie et de notre pays par rapport aux réseaux de chaleur, aux biocarburants, à l'éolien terrestre et en mer ou à la biomasse.
L'enjeu du solaire est en réalité surtout environnemental et industriel. Or nos objectifs en matière environnementale et en matière de création d'une filière industrielle ne sont pas atteints. Nous avons des acteurs tout le long de la chaîne ou presque, mais deux tiers des emplois recensés se situent à l'aval, avec 20 % de la valeur ajoutée. De plus les panneaux installés, dont beaucoup viennent d'Asie, ne profitent pas comme on le voudrait à l'environnement.
Par ailleurs, vous le savez, madame la députée, le secteur a connu ces derniers mois de très fortes baisses des coûts de production, qui ont conduit à des effets d'aubaine. In fine, ce système pèse sur la facture d'électricité du consommateur.
Le Gouvernement a donc décidé de suspendre par décret - partiellement et pour une durée de trois mois - l'obligation d'achat de l'électricité photovoltaïque à compter du 10 décembre 2010.
Des travaux de concertation sont en cours sous l'égide de Jean-Michel Charpin, inspecteur général des finances, et Claude Trink, ingénieur général des mines, dans le cadre d'une démarche constructive et transparente associant les élus, les représentants des consommateurs et les organisations environnementales. Cette concertation devrait permettre d'aboutir d'ici à la mi-février à une proposition de nouveau cadre de régulation de la filière photovoltaïque ainsi qu'à l'élaboration d'un plan permettant de faire émerger les technologies photovoltaïques les plus innovantes et les plus performantes sur le plan environnemental.
Le Gouvernement souhaite promouvoir une filière d'excellence dans le domaine de l'énergie solaire. C'est pourquoi, au-delà de ce réajustement du dispositif d'obligation d'achat, il a lancé le 11 janvier dernier deux appels à manifestation d'intérêt dans le cadre des investissements d'avenir pour soutenir le développement de solutions innovantes, développer des avantages concurrentiels en matière de performance énergétique et environnementale et réduire les coûts de fabrication.
Auteur : Mme Catherine Coutelle
Type de question : Question orale
Rubrique : Énergie et carburants
Ministère interrogé : Écologie, développement durable, transports et logement
Ministère répondant : Écologie, développement durable, transports et logement
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 25 janvier 2011