Question orale n° 1473 :
tribunaux pour enfants

13e Législature

Question de : M. Marcel Rogemont
Ille-et-Vilaine (3e circonscription) - Socialiste, radical, citoyen et divers gauche

M. Marcel Rogemont attire l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés, sur les conséquences pour le département d'Ille-et-Vilaine de la suppression du tribunal de Dinan et du transfert de tous les dossiers d'enfants admis à l'aide sociale à l'enfance de la juridiction dinanaise vers le tribunal de grande instance de Saint-Malo. Selon l'article L. 228-4 du code de l'action sociale et des familles, les dépenses relatives aux enfants confiés à l'aide sociale à l'enfance, devraient être prises en charge par le département du siège de la juridiction qui a prononcé la mesure en première instance. Ce transfert de « dossiers » correspondrait à un transfert de charges qu'ils évaluent entre 10 millions et 13 millions d'euros. Par ailleurs, il convient de préciser que les mesures d'actions éducatives en milieu ouvert ordonnées par le juge sont mises en oeuvre par des agents du conseil général dans les Côtes-d'Armor, alors qu'en Ille-et-Vilaine, ces mesures sont confiées à des associations habilitées. C'est pourquoi il sollicite son intervention afin de trouver en concertation avec les autorités judiciaires, une solution qui permette de déroger à l'application de l'article L. 228-4 du code de l'action sociale et des familles. Il s'agit ici de permettre que le département d'Ille-et-Vilaine ne supporte que les dépenses afférentes à la prise en charge des enfants d'Ille-et-Vilaine confiés par le juge.

Réponse en séance, et publiée le 20 mai 2011

PRISE EN CHARGE DES ENFANTS ADMIS
À L'AIDE SOCIALE À L'ENFANCE EN ILLE-ET-VILAINE

Mme la présidente. La parole est à M. Marcel Rogemont, pour exposer sa question, n° 1473, relative au financement de la prise en charge des enfants admis à l'aide sociale à l'enfance en Ille-et-Vilaine.
M. Marcel Rogemont. Ma question s'adresse à M. le garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés.
La réforme de la carte judiciaire a des conséquences parfois imprévisibles. Ainsi, le rapprochement des tribunaux de Dinan dans les Côtes d'Armor et de Saint-Malo en Ille-et-Vilaine a des conséquences sur les finances des conseils généraux d'Ille-et-Vilaine et des Côtes d'Armor.
La suppression du tribunal de Dinan et son transfert à Saint-Malo font que désormais tous les dossiers des enfants admis à l'aide sociale à l'enfance de la juridiction dinanaise sont traités par le tribunal de grande instance de Saint-Malo. Selon l'article L 228-4 du code de l'action sociale et des familles, les dépenses relatives aux enfants confiés à l'aide sociale sont prises en charge par le département du siège de la juridiction qui a prononcé les mesures en première instance.
Il en est ainsi pour des enfants des Côtes d'Armor, qui sont alors pris en charge par le département d'Ille-et-Vilaine, ce qui correspond tout de même à un transfert de charges évalué entre 10 et 13 millions d'euros.
Par ailleurs, il convient de préciser que les mesures d'action éducative en milieu ouvert ordonnées par le juge sont mises en oeuvre de façon différente par les deux conseils généraux. Ces mesures sont appliquées par des personnels du conseil général dans les Côtes d'Armor alors qu'elles sont confiées à des associations habilitées en Ille-et-Vilaine, ce qui complique un peu les choses.
C'est pourquoi je sollicite l'intervention du ministère afin que soit trouvée une solution pour que le département d'Ille-et-Vilaine ne supporte que les dépenses afférentes à la prise en charge des enfants d'Ille-et-Vilaine confiés par le juge, et pour que le département des Côtes d'Armor supporte la prise en charge des enfants de son ressort.
À défaut, comment le garde des sceaux envisage-t-il de prendre en compte cette situation, qui découle de décisions ne devant pas avoir d'impact sur celles du conseil général d'Ille-et-Vilaine ?
Mme la présidente. La parole est à Mme Jeannette Bougrab, secrétaire d'État chargée de la jeunesse et de la vie associative.
Mme Jeannette Bougrab, secrétaire d'État chargée de la jeunesse et de la vie associative. Monsieur Rogemont, je vous prie de bien vouloir excuser l'absence du garde des sceaux, actuellement retenu au Sénat.
L'extension du ressort du tribunal de grande instance de Saint-Malo, consécutive à la réforme de la carte judiciaire, aboutit effectivement à ce que les dépenses liées à la prise en charge des mineurs admis à l'aide sociale à l'enfance relevant du ressort de l'ancien tribunal de grande instance de Dinan soient désormais assumées par le conseil général d'Ille-et-Vilaine.
Comme vous l'avez rappelé, l'article L. 228-4 du code de l'action sociale et des familles prévoit que les dépenses d'aide sociale à l'enfance soient prises en charge par le département du siège de la juridiction qui a prononcé la mesure en première instance.
En l'état actuel du droit, il n'est pas possible de déroger à ce principe, à moins de modifier l'article précité. Le juge des enfants ne peut donc pas écarter les dispositions législatives pour mettre à la charge d'une autre collectivité locale les frais engendrés par ses décisions, et un accord entre départements ne paraît pas pouvoir bénéficier de la sécurité juridique requise.
Il pourrait être envisagé de modifier le code de l'action sociale et des familles s'agissant des cas spécifiques des ressorts de tribunaux de grande instance s'étendant sur plusieurs départements. Il s'agirait alors de prévoir que, dans ce cas, les dépenses sont prises en charge par le conseil général dans le ressort duquel se trouve soit le lieu de placement du mineur, soit le lieu de résidence de ce dernier au moment du placement.
Toutefois, une telle modification nécessiterait au préalable une concertation entre les acteurs concernés, en particulier les conseils généraux des départements d'Ille-et-Vilaine et des Côtes d'Armor.
Michel Mercier, le garde des sceaux, m'a demandé de vous indiquer que la chancellerie est prête, pour sa part, à mettre en place un groupe de travail avec les élus des deux départements et les ministères concernés, afin d'examiner la situation que vous soulevez dans votre question et de trouver une solution.
Mme la présidente. La parole est à M. Marcel Rogemont.
M. Marcel Rogemont. J'ai bien noté la bienveillante attention du ministère et le fait qu'une solution allait être recherchée dans le cadre d'une commission qui va être créée, ce dont je me réjouis.
Il n'en demeure pas moins que ce sont les décisions du ministère qui ont des conséquences sur les finances d'un conseil général. Nous sommes tout à fait d'accord pour participer aux réunions que vous nous proposez. Il n'en demeure pas moins que, dans l'intervalle, il est tout à fait normal que le fauteur de trouble, celui qui a pris la décision engendrant des dépenses supplémentaires pour un conseil général, les supporte.
Je ne vois pas pourquoi le conseil général d'Ille-et-Vilaine devrait supporter une décision qu'il n'a pas prise et qui a des conséquences sur le plan financier. D'ailleurs, madame la présidente, vous qui connaissez le sujet, ne pensez-vous pas que le conseil général pourrait se tourner vers le Conseil d'État ?
Au garde des sceaux, je pose la question suivante : dans l'attente d'une réforme qui doit intervenir le plus rapidement possible, envisage-t-il d'assumer les conséquences financières de ses décisions pour que le conseil général n'ait pas à le faire à sa place ?
Mme la présidente. Cher collègue, en tant que présidente de séance, je ne suis pas habilitée à vous répondre. Mais, madame Bougrab, vous qui étiez membre du Conseil d'État avant d'entrer au Gouvernement, peut-être pourriez-vous le faire ?
Mme Jeannette Bougrab, secrétaire d'État. Comme vous le savez, il s'agit d'une disposition législative, et le Conseil d'État n'est pas habilité à écarter une disposition de cette nature, sauf par application d'un principe de droit constitutionnel ou de droit international. Ajoutons que c'est un sujet difficile qui concerne des mineurs. On ne peut pas rejeter sur un autre département la charge de ces mineurs en difficulté.
M. Marcel Rogemont. Ce n'est pas le sujet !

Données clés

Auteur : M. Marcel Rogemont

Type de question : Question orale

Rubrique : Justice

Ministère interrogé : Justice et libertés

Ministère répondant : Justice et libertés

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 10 mai 2011

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