exploitants
Question de :
M. Charles-Ange Ginesy
Alpes-Maritimes (5e circonscription) - Union pour un Mouvement Populaire
M. Charles-Ange Ginesy interroge M. le ministre de l'agriculture et de la pêche sur le mécanisme et la procédure de demande d'aide aux exploitants des Alpes Maritimes. Le plan de développement rural hexagonal, entré en vigueur en octobre 2007, est prévu pour 2007-2013. En novembre 2006, le conseil général des Alpes-maritimes a créé le programme « AIME » (Aide à l'investissement et à la modernisation des exploitations). Mis en place pour une durée d'un an, il était construit pour entrer dans le régime d'exemption. « AIME » est un programme efficace et essentiel. Efficace, parce que 1 737 000 euros d'autorisations de programmes ont été délivrées en 2007. Efficace aussi, parce que l'on observe un taux de réalisation de 80 %, contre seulement 33 % en 2006. Mais AIME est aussi essentiel. Dans les Alpes-Maritimes, le développement rural signifie préservation des restanques, des terrasses d'oliviers, conservation de nos traditions gastronomiques, protection de notre paysage et de nos montagnes. Le développement est l'un des moteurs de l'économie globale de la Côte d'Azur, face à une pression foncière qui s'intensifie, pour des exploitations qui peinent à trouver un équilibre économique. En avril 2007, des dossiers de subvention ont fait l'objet d'une transmission à l'État pour suites à donner. Cet été, les services de l'État nous ont demandé d'attendre le cadre défini par le DRDR (document régional de développement rural). Il se trouve que ce DRDR oblige les demandeurs de subvention à remplir une fiche par demande (PMBE, PVE, ateliers de transformation, pastoralisme...). Ce DRDR crée aussi un guichet unique géré par l'État. Cet effort de centralisation complexifie notre contexte local. Avec AIME, un seul dossier transversal était demandé. Le choix nous est aujourd'hui donné : soit entrer dans le DRDR, soit conserver AIME en notifiant à l'État. Par ailleurs, les Alpes maritimes comptent près de 20 « Maisons du département ». Elles contribuent sur place à régler les problèmes des citoyens (bourse, APA, visioconférence ANPE...) et sont une nouvelle preuve que la proximité est appréciée. Ces « Maisons du département » sont de bons relais de services publics, et rencontrent un fort succès. Or, avec les modifications évoquées, la suppression de la proximité semble menacée. Il lui demande si l'on ne pourrait envisager que ces « Maisons du département » servent également de premier guichet unique géré par le conseil général pour donner aux exploitants une première porte d'entrée pour obtenir leurs aides facilement, rapidement, et simplement.
Réponse en séance, et publiée le 30 janvier 2008
GESTION DES AIDES AUX EXPLOITANTS AGRICOLES DANS LES ALPES-MARITIMES
M. le président. La parole est à M. Charles-Ange Ginesy, pour exposer sa question, n° 149, relative à la gestion des aides aux exploitants agricoles dans les Alpes-Maritimes.M. Charles-Ange Ginesy. Monsieur le ministre de l'agriculture et de la pêche, l'activité agricole des espaces ruraux français a été profondément modifiée ces dernières années. Le département des Alpes-Maritimes est peut-être plus frappé qu'ailleurs, pour au moins trois raisons : une raison conjoncturelle, avec l'exode rural qui a durement frappé nos montagnes, du fait notamment du très fort attrait de la Côte d'Azur ; une raison structurelle ensuite, avec des exploitations azuréennes de petite taille, sujettes à une très forte pression immobilière ; enfin, nos exploitations centrées sur des productions de niche, de faible volume, n'ont que rarement été soutenues dans le cadre de la PAC. Cette situation, conjuguée au faible soutien financier national et européen et à un régime très complexe de notification des aides, a abouti, dans notre département des Alpes-Maritimes, à une très forte déprise agricole.
Le Conseil général des Alpes-Maritimes, conscient de la nécessité de maintenir une activité agricole sur son territoire pour entretenir la qualité des espaces et des paysages, lutter contre les risques d'incendie, majeurs dans notre département, et surtout répondre à une demande agritouristique croissante, a décidé en novembre 2006 de créer le programme AIME - un beau vocable qui désigne l'aide à l'investissement et à la modernisation des exploitations.
Ce programme offre aux exploitants un financement de tous leurs investissements, à hauteur de 40 %. AIME a démontré son efficacité : depuis son lancement, 1,75 million d'euros d'autorisations de programmes ont été financées, contre 500 000 euros en 2006. Les crédits engagés ont été consommés à 80 %, contre 33 % seulement avant ce dispositif.
La profession agricole joue donc pleinement le jeu de l'investissement lorsqu'on lui propose un soutien cohérent et des démarches administratives simples.
Absente du financement de ce programme, l'action de l'État en matière agricole a complètement disparu dans le département en raison de la complexité du système français de notification des aides. La demande faite auprès de vos services pour adapter le dispositif AIME au cadre défini par le document régional de développement rural - le DRDR - nécessiterait de le redécouper en autant de mesures qu'il y a de systèmes d'aide de l'État. Or, l'un des atouts du dispositif du Conseil général est précisément de ne donner lieu qu'à un seul dossier transversal.
Ma première question est donc de savoir si le ministère de l'agriculture et de la pêche peut s'engager à travailler avec les services de ce département pour que le dispositif AIME, tel qu'il est, puisse bénéficier de cofinancements nationaux et européens. Cette expérimentation pilote pourrait se faire par un assouplissement ou par une dérogation, totale ou partielle, aux règles françaises en matière d'aides notifiées.
De son côté, l'État a créé un guichet unique pour gérer le DRDR. Cet effort de simplification est louable. Le conseil général des Alpes maritimes a par ailleurs lancé un programme de " maisons du département ", qui seront à terme au nombre d'une vingtaine et qui, en zone rurale, sont labellisées " relais de services publics ". Nous sommes en effet persuadés que l'efficacité de nos services passe par une plus grande proximité.
Ma seconde question est donc de savoir si ces " maisons du département " pourront également servir de premier guichet unique, géré par le Conseil général, en matière d'aides agricoles.
Je vous remercie, monsieur le ministre, de l'intérêt que vous portez à ma question.
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.
M. Michel Barnier, ministre de l'agriculture et de la pêche. Monsieur Charles-Ange Ginesy, les innovations et les initiatives du conseil général des Alpes-maritimes - maisons du département, système AIME - me donnent l'occasion de lui tirer mon chapeau. J'ai aussi pu apprécier dans un autre domaine, mais qui me concerne lui aussi, celui de la protection civile, le volontarisme et l'intelligence de nombre d'actions innovantes venant du terrain, et j'en suis d'autant plus admiratif que j'ai moi-même exercé les fonctions de président de conseil général durant pas mal d'années.
Vous avez eu raison de souligner que tout le dispositif d'aides est un peu complexe, notamment pour les bénéficiaires. S'agissant des crédits européens, c'est encore plus compliqué ; pas toujours d'ailleurs seulement à cause des règles européennes, mais aussi de l'application que l'on en fait sur le terrain.
M. Charles-Ange Ginesy. Bien sûr.
M. le ministre de l'agriculture et de la pêche. Le dispositif d'aides à l'investissement et à la modernisation des exploitations, qui porte le beau nom de " AIME " développé par votre conseil général, ne peut pas, c'est vrai, bénéficier dans son intégralité d'un co-financement par le FEADER - le Fonds européen agricole pour le développement rural -, en raison des contraintes réglementaires régissant l'intervention de ce fonds.
La partie du dispositif AIME ne s'intégrant pas au programme de développement rural hexagonal - le PDRH - devra faire l'objet d'une notification auprès de la Commission européenne en vue de sa mise en conformité avec les lignes directrices communautaires relatives aux aides d'État. C'et un préalable incontournable.
La partie du dispositif susceptible d'émarger au FEADER doit répondre aux modalités d'organisation prévues en région, en application du cadre fixé par la circulaire du Premier ministre. Ce cadre a notamment pour ambition de simplifier les démarches des bénéficiaires d'aides européennes, dans un contexte souvent marqué par une multiplicité de financeurs : État, région, départements, etc. Un guichet unique est donc prévu pour chaque dispositif. Dans le cas du dispositif AIME, il s'agit de la direction départementale de l'agriculture et de la forêt des Alpes-Maritimes. Ce guichet a pour tâche de réceptionner les dossiers, de les retransmettre à tous les co-financeurs potentiels, puis de les instruire. Sa mise en place constitue une mesure forte de simplification qui devrait éviter au bénéficiaire de s'adresser à plusieurs services, de courir d'une porte à l'autre pour assurer son plan de financement.
Pour autant, cela ne signifie pas que les maisons de département, au même titre que les chambres d'agriculture ou d'autres organismes, ne puissent pas conserver une forte implication dans le dispositif : outre leur rôle d'information auprès des bénéficiaires, elles pourraient également les aider à constituer leurs dossiers et en assurer la transmission auprès de la direction départementale de l'agriculture et de la forêt pour la partie du projet pouvant bénéficier du FEADER. Ces dispositions doivent permettre d'assurer une complémentarité entre les maisons de département, les services de l'État et des collectivités afin de parvenir à payer les aides facilement, rapidement et simplement.
Cependant, j'ai bien entendu que, compte tenu de procédures qui restent complexes, vous souhaitiez un rapprochement avec mes propres services. Suite à votre interpellation, je vais donc demander à mon directeur départemental, et au directeur régional s'il le faut, de se rapprocher de vous pour bien vérifier que notre souhait se concrétise sur le terrain, c'est-à-dire que l'argent soit utilisé efficacement, et qu'il soit versé dès notification à Bruxelles. Vous savez que j'ai géré pendant plusieurs années les aides européennes à Bruxelles en tant que commissaire, et que j'en gère une partie aujourd'hui au titre du FEADER, en tant que ministre de l'agriculture ; je souhaite donc que cette Europe du concret, cette Europe proche du terrain soit une réalité. Je vous assure de la disponibilité de mes services pour le vérifier avec vous.
Auteur : M. Charles-Ange Ginesy
Type de question : Question orale
Rubrique : Agriculture
Ministère interrogé : Agriculture et pêche
Ministère répondant : Agriculture et pêche
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 29 janvier 2008