ordre du jour
Question de :
M. Jean-Jacques Candelier
Nord (16e circonscription) - Gauche démocrate et républicaine
M. Jean-Jacques Candelier attire l'attention de M. le ministre de la culture et de la communication sur la réponse du 16 août 2011 à la question n° 112019 de M. Marc Dolez. La politique menée par le Gouvernement est en-deçà des attentes qui s'expriment. Le projet de loi-cadre promis par lui sur l'usage des langues régionales n'est pas évoqué, ce qui est inquiétant. Il lui demande donc si un tel projet va être présenté au Parlement, afin d'encourager les initiatives et développer notre patrimoine linguistique, et ce dans le respect du français, langue officielle de la République qui doit continuer à être imposée en toutes circonstances.
Réponse en séance, et publiée le 1er février 2012
PROMOTION DES LANGUES RÉGIONALES
M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Candelier pour exposer sa question, n° 1660, relative à la promotion des langues régionales.M. Jean-Jacques Candelier. Ma question s'adresse à M. le ministre de la culture et de la communication.
Notre Constitution veut que la sauvegarde des langues régionales ne soit pas seulement l'affaire de leurs locuteurs mais de la nation tout entière : ces langues sont le patrimoine de la France. Or le Gouvernement mène une politique de valorisation de ce patrimoine à mes yeux insuffisante.
Il est nécessaire de construire une véritable stratégie de soutien à ces langues combinant outils juridiques, institutionnels, financiers et associatifs. Une telle politique doit être mise en oeuvre sans pour autant porter atteinte au statut de la langue française, c'est-à-dire sans reconnaître un statut officiel aux langues régionales.
Il y a urgence. L'UNESCO indique, par exemple, que le picard et le chti sont en danger. Si rien n'est fait, dans deux ou trois générations, il ne restera rien de nos racines.
Actuellement, le code de l'éducation prévoit que les autorités académiques ont seulement la faculté d'inclure les langues régionales dans l'enseignement, les modalités de cette inclusion étant laissées à leur appréciation et précisées par de simples circulaires.
Les collectivités territoriales ainsi que les associations ont, pour leur part, toute liberté d'agir mais rien n'est fait pour les encourager et fédérer leurs initiatives.
L'académie patoisante des Tiots Pères du Douaisis, dans ma circonscription, souhaite renforcer l'identité linguistique nordiste avec l'aide de l'éducation nationale. En contact avec l'inspecteur d'académie, elle voudrait faire entrer le chti dans les cours d'école et obtenir la reconnaissance de ce " parlache " comme langue fragile, à l'instar du breton ou du basque, ce qui constituerait pour elle une avancée à même de déboucher sur des politiques volontaristes.
Ma question est double.
Le Gouvernement avait prévu un projet de loi-cadre sur les langues régionales. Peut-on savoir quand celui-ci sera déposé afin de donner un coup de fouet et un cadre législatif aux politiques de soutien aux langues régionales ?
Par ailleurs, le Gouvernement compte-t-il reconnaître le chti comme langue fragile pour oeuvrer à son développement en lien, notamment, avec les associations culturelles et le service public de l'éducation ?
M. le président. La parole est à M. le ministre chargé de l'industrie, de l'énergie et de l'économie numérique.
M. Éric Besson, ministre chargé de l'industrie, de l'énergie et de l'économie numérique. Il y a peu de liens entre votre question, monsieur le député, et les responsabilités qui sont les miennes. (Sourires.) C'est la raison pour laquelle je vous lirai la réponse qu'a préparée pour vous Frédéric Mitterrand, que je vous prie de bien vouloir excuser.
Le Gouvernement avait envisagé de déposer un projet de loi relatif aux langues régionales pour inscrire leur usage dans un cadre juridique adéquat, mais avant la réforme constitutionnelle de juillet 2008. La modification de notre loi fondamentale a créé un contexte nouveau : l'article 75-1 de la Constitution dispose désormais que " les langues régionales font partie du patrimoine de la France ".
Pas moins de quatre propositions de loi ont été déposées depuis devant le Parlement. Lors de la discussion de l'une d'entre elles, le ministre de l'éducation nationale, Luc Chatel, a indiqué au Sénat que le Gouvernement n'était pas favorable à l'adoption d'un texte et a rappelé la jurisprudence du Conseil constitutionnel : les principes constitutionnels d'indivisibilité de la République et d'égalité devant la loi interdisent que soient conférés des droits spécifiques à des groupes de locuteurs de langues régionales ou minoritaires à l'intérieur de territoires où ces langues sont pratiquées.
Dans ces conditions, l'État a préféré envisager la recherche de solutions adaptées à chaque cas, à élaborer avec les collectivités territoriales et les associations. En la matière, il faut faire du sur mesure. C'est ce à quoi travaille la Délégation générale à la langue française et aux langues de France.
L'expression et la mise en valeur des langues régionales de notre pays s'appuient déjà sur plusieurs textes tels la loi d'orientation et de programme pour l'avenir de l'école du 23 avril 2005, la loi du 5 mars 2009 relative à la communication audiovisuelle ou encore l'article 21 de la loi du 4 août 1994, qui prévoit que les mesures garantissant l'emploi de la langue française s'appliquent sans préjudice de la législation et de la réglementation relatives aux langues régionales de France et ne s'opposent pas à leur usage.
Notre cadre juridique offre donc aux langues régionales de larges possibilités d'expression encore insuffisamment exploitées. Ainsi, les actes officiels des collectivités territoriales peuvent être publiés en langue régionale s'ils le sont aussi en français. Les maires peuvent célébrer les mariages en breton, en corse, en créole, en basque, parallèlement au français. Qu'il s'agisse des programmes culturels, des sites internet ou des services d'information au public, les occasions de manifester un bilinguisme associant le français et une langue régionale sont d'ores et déjà très nombreuses.
Lors de son discours de clôture des états généraux du multilinguisme dans les outre-mer, le 16 décembre dernier, le ministre de la culture et de la communication a pu annoncer la création en Guyane d'un pôle linguistique et du patrimoine immatériel. Voici un exemple d'initiative que l'État propose pour valoriser la pluralité linguistique de notre pays.
Auteur : M. Jean-Jacques Candelier
Type de question : Question orale
Rubrique : Parlement
Ministère interrogé : Culture et communication
Ministère répondant : Culture et communication
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 24 janvier 2012