commerce électronique et ventes par correspondance
Question de :
M. Bernard Gérard
Nord (9e circonscription) - Union pour un Mouvement Populaire
M. Bernard Gérard appelle l'attention de M. le secrétaire d'État chargé de l'industrie et de la consommation sur l'application des articles 28, 29 et 31 de la loi du 3 janvier 2008 pour le développement de la concurrence au service des consommateurs. Ces articles, qui créent de nouvelles obligations pour le secteur de la vente à distance, doivent entrer en vigueur le premier juin 2008. Veillant à un renforcement de la protection du consommateur, les nouvelles mesures issues de ces articles imposent au secteur de la vente à distance la mise en oeuvre d'adaptations rapides et coûteuses ainsi que de nouvelles obligations difficiles à mettre en oeuvre, alors que ce secteur oeuvre à rester compétitif dans un contexte économique en pleine mutation. Aussi, s'il est essentiel de favoriser la compétitivité de ces entreprises face à nos voisins européens et s'il est primordial d'assurer la pleine satisfaction du consommateur, il demeure néanmoins prioritaire de permettre aux entreprises concernées de disposer du temps nécessaire pour la mise en oeuvre de telles adaptations. En outre, l'article 31, en renforçant les obligations pour la vente à distance en matière de remboursement, représente un coût financier difficilement supportable. Il lui demande, par conséquent, d'apporter des précisions quant à l'interprétation de ces obligations et quant aux possibilités d'obtenir un délai d'application qui irait au-delà du 1er juin 2008.
Réponse en séance, et publiée le 26 mars 2008
RÉGLEMENTATION DE LA VENTE À DISTANCE
M. le président. La parole est à M. Bernard Gérard, pour exposer sa question, n° 168.M. Bernard Gérard. Ma question s'adresse à M. Luc Chatel, secrétaire d'État chargé de l'industrie et de la consommation, porte-parole du Gouvernement.
Permettez-moi tout d'abord, monsieur le secrétaire d'État, de vous adresser mes très sincères félicitations pour les nouvelles fonctions qui vous ont été dévolues. Car on n'a rien inventé de mieux, dans le fond, que l'industrie pour créer de l'emploi, et rien de mieux que l'emploi pour garantir la consommation.
Or nous avons adopté depuis l'été dernier plusieurs textes en faveur de la protection du consommateur et du pouvoir d'achat. Ces dispositions répondent aux engagements que nous avons pris devant les Français, et nous pouvons nous en réjouir.
Dans cette dynamique a été promulguée le 3 janvier dernier une loi pour le renforcement de la concurrence au service du consommateur, dont vous êtes l'auteur.
Ce texte, porteur d'avancées majeures favorables aux consommateurs, contient cependant plusieurs mesures pénalisantes pour un secteur économique cher à ma région du Nord, celui de la vente à distance.
Berceau historique de cette activité, la région du Nord compte en effet une centaine d'entreprises spécialisées dans la vente à distance, qui emploient 47 % des effectifs totaux liés à ce secteur.
Aujourd'hui, ces entreprises, en pleine phase de mutation, doivent faire face à de lourdes restructurations afin de relever pleinement la nouvelle donne Internet. Nombre d'entre elles éprouvent de sérieuses difficultés.
Aux efforts considérables déjà entrepris viennent s'ajouter, au titre de la loi du 3 janvier 2008, de nouvelles obligations qui doivent entrer en vigueur le 1er juin prochain.
Ces obligations, contenues dans les articles 28, 29 et 31 de ce texte, imposent le recours à des développements, notamment informatiques, complexes, lourds et coûteux, alors même qu'ils n'étaient pas prévus dans les budgets.
Les entreprises sont confrontées à des problèmes d'application du texte.
La profession craint donc d'être fragilisée et fait part de son incapacité à mettre en oeuvre ces nouvelles mesures d'ici au 1er juin. En effet, une mise en oeuvre respectueuse des délais risquerait de pénaliser l'activité et de fragiliser l'emploi.
Vous le savez, monsieur le secrétaire d'État, les professionnels de ce secteur ont conscience du caractère essentiel de la relation de confiance avec le consommateur et sont prêts à oeuvrer pour le maintien de leur compétitivité face à nos voisins européens.
Néanmoins, les mesures les concernant nées de la loi du 3 janvier ne doivent pas être contre productives en pénalisant un secteur en pleine restructuration. Un juste équilibre doit être trouvé. Ma question comporte donc deux volets.
Tout d'abord, je souhaiterais connaître les possibilités d'obtenir un assouplissement de certaines mesures, notamment celle qui figure à l'article 31 et qui prévoit qu'en cas de rétractation du client, la totalité des sommes versées lui sera remboursée, y compris, donc, les frais initiaux d'envoi, ce qui paraît inéquitable.
Cette mesure représente un coût considérable. La participation forfaitaire aux frais devrait donc être exclue de cette nouvelle obligation.
En second lieu, dans quelle mesure peut-on envisager de reporter le délai d'application des dispositions concernées, afin de laisser le temps nécessaire aux entreprises de vente à distance d'opérer les adaptations préalables à la mise en oeuvre de la loi ?
M. le président. La parole est à M. Luc Chatel, secrétaire d'État chargé de l'industrie et de la consommation.
Je tiens, monsieur le secrétaire d'État, à m'associer aux compliments qui vous ont été adressés par notre collègue Gérard.
M. Luc Chatel, secrétaire d'État chargé de l'industrie et de la consommation. Merci, monsieur le président, pour ces compliments.
Monsieur le député, je vous remercie de cette question, vous qui êtes si attaché à tout ce qui concerne la vente à distance. Vous êtes directement concerné, compte tenu du nombre d'entreprises de ce secteur présentes dans votre département, et plus particulièrement dans votre circonscription.
Nous avons eu récemment plusieurs échanges sur ces questions, qui vous préoccupent. Je vais m'efforcer de vous donner la réponse la plus précise possible par rapport à vos inquiétudes.
Comme vous le savez, la vente à distance intéresse particulièrement nos concitoyens. D'une part, elle constitue un moyen d'accéder à un certain nombre de biens et services, notamment dans les départements les plus reculés, comme celui dont je suis un élu. D'autre part, elle apporte une réponse en matière de pouvoir d'achat, car les produits et services vendus à distance sont souvent moins chers que dans d'autres circuits de distribution.
Vous savez que si nous voulons développer ce secteur, c'est aussi en renouant avec la confiance des consommateurs. Plus ceux-ci se sentiront en confiance, plus les clients finaux auront envie d'acheter parce qu'ils se sentiront dans de bonnes conditions, et plus ce secteur se développera, créera de l'activité économique et de l'emploi.
Or, aujourd'hui, les consommateurs, et nous en avons eu l'occasion d'en parler ensemble, monsieur le député, ressentent certaines difficultés vis-à-vis de la vente à distance. J'observe que 36 % des quelque 65 000 réclamations de consommateurs reçues par la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes au second semestre 2007 dans le cadre du nouveau " baromètre des plaintes " que nous avons mis en place faisaient suite à une vente à distance. Et pour les deux premiers mois de l'année 2008, les réclamations faisant suite à une vente à distance sont à nouveau en augmentation, de 20 %.
Vous le savez, monsieur le député, les associations de consommateurs se sont beaucoup mobilisées sur ce sujet, et se sont investies dans un travail approfondi de réflexion et de concertation dans le cadre du Forum des droits sur l'Internet, dont les conclusions ont été remises à la fin du mois d'août dernier et qui avait émis un certain nombre de recommandations pour l'adaptation du droit de la consommation au commerce électronique.
C'est dans ce cadre qu'ont été adoptés des amendements, lors de l'examen par le Parlement de la loi pour le développement de la concurrence au service des consommateurs. Ces amendements étaient, je le rappelle, d'initiative parlementaire, aussi bien au Sénat qu'à l'Assemblée nationale.
C'est ainsi qu'a été introduite dans ce texte une disposition permettant l'amélioration de la communication en ce qui concerne la date limite de livraison. De même a été instaurée l'interdiction de surtaxer les consommateurs qui appellent pour résoudre un incident intervenu lors de la commande. Enfin, les consommateurs exerçant leur droit de rétractation seront dorénavant remboursés par un véritable moyen de paiement.
Ces avancées sont conformes aux demandes formulées dans le cadre du Forum des droits sur l'Internet. Elles ont donc été considérées comme autant d'avancées importantes, qui devraient permettre de renforcer la confiance des consommateurs vis-à-vis de la vente à distance, et profiter ainsi, comme je l'ai dit, à l'ensemble des acteurs, notamment les plus importants.
En même temps, nous devons être vigilants sur la question du développement de l'activité économique de ces entreprises. À cet égard, j'ai bien entendu votre message, monsieur le député. Vous proposez d'envisager de décaler dans le temps la mise en application de ces dispositions, ou d'être vigilants quant à leur mise en oeuvre.
Le Parlement a voté un décalage pour l'entrée en vigueur de la loi, puisque celle-ci ne sera applicable que le 1er juin prochain.
J'ai donné instruction à la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes d'être particulièrement souple au moment de l'entrée en vigueur de cette loi, notamment afin que les entreprises de vente par correspondance, qui travaillent sur du long terme, qui émettent souvent des catalogues d'une année sur l'autre, ne soient pas prises au dépourvu.
Vous le voyez, nous rechercherons le plus grand équilibre possible. Il nous faut renforcer la protection des consommateurs, mais sans trop obérer la liberté d'entreprendre. Car, comme vous l'avez fort bien dit, c'est parce que ces entreprises se développeront qu'elles permettront, au total, de créer de l'activité économique, de l'emploi, et de la consommation.
M. le président. La parole est à M. Bernard Gérard.
M. Bernard Gérard. Je vous remercie beaucoup de ces précisions, monsieur le secrétaire d'État. L'inquiétude est réelle dans ce secteur d'activité, dont les entreprises ne doivent pas tout à fait être mises sur le même plan que celles qui travaillent d'ores et déjà exclusivement sur Internet. Celles qui travaillent sur catalogue sont aujourd'hui en période de pleine mutation. Il leur faut un peu de temps. Mais je pense que nous nous sommes bien compris, monsieur le secrétaire d'État. Il convient que nous poursuivions notre travail avec ce secteur d'activité afin qu'il ne soit pas pénalisé, ce qui nuirait à l'emploi.
Auteur : M. Bernard Gérard
Type de question : Question orale
Rubrique : Ventes et échanges
Ministère interrogé : Industrie et consommation
Ministère répondant : Industrie et consommation
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 25 mars 2008