fonctionnement
Question de :
M. Jean-Claude Flory
Ardèche (3e circonscription) - Union pour un Mouvement Populaire
M. Jean-Claude Flory appelle l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur les conséquences de la carte judiciaire en Ardèche, s'agissant particulièrement du pôle d'instruction. Le décret n° 2008-54, paru au Journal officiel du 18 janvier 2008, fixe en effet pour l'Ardèche le pôle d'instruction en Avignon. Or, de l'avis des professionnels de la magistrature, Privas, ville préfecture de l'Ardèche, répond aux critères énoncés par le ministère de la justice. Tous relèvent que le fait qu'il n'y ait que deux juges d'instruction à Privas n'est pas un handicap dans le cadre de la réforme, tel que ce fut communément accepté dans d'autres départements présentant des caractéristiques rurales et géographiques similaires à l'Ardèche. En effet, le critère qui fixe à trois juges le nombre nécessaire ne parait pas a priori déterminant car plusieurs TGI en France auront un pôle avec seulement deux juges. Dans une récente rencontre à son cabinet, les bâtonniers de l'Ardèche avaient été de surcroît invités à réfléchir sur un éventuel rattachement à une autre cour d'appel, pour éventuellement rapprocher ainsi le pôle d'instruction référent. Cette option mériterait en effet d'être étudiée en détail. Il lui demande donc quelle suite concrète est susceptible d'être donnée à cette rencontre et à cette proposition émanant de la chancellerie.
Réponse en séance, et publiée le 9 avril 2008
CONSÉQUENCES DE LA RÉFORME DE LA CARTE JUDICIAIRE EN ARDÈCHE
M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Flory, pour exposer sa question, n° 194, relative aux conséquences de la réforme de la carte judiciaire en Ardèche.M. Jean-Claude Flory. Ma question s'adresse à Mme la garde des sceaux.
Véritable séisme judiciaire, l'affaire d'Outreau a fait l'objet d'une commission d'enquête parlementaire. Analysant les causes des dysfonctionnements de la justice dans cette triste affaire, cette commission avait proposé à l'unanimité d'instaurer la collégialité de l'instruction.
C'est ainsi que, sous l'impulsion du garde des sceaux et pour répondre aux attentes des justiciables, des pôles de l'instruction ont été récemment créés. En brisant la solitude du juge d'instruction, cette collégialité représente une garantie supplémentaire d'efficacité et d'impartialité pour les justiciables. Tous les professionnels de la justice en conviennent, même si des ajustements opérationnels paraissent nécessaires sur le terrain.
Tel est le cas pour l'Ardèche - département que je représente - où le pôle d'instruction a été fixé en Avignon, par décret paru au journal officiel, le 18 janvier 2008. La crainte de l'éloignement est ici certaine. Il faut en effet près d'une heure trente pour rejoindre Avignon à partir de Privas. Or, de l'avis des professionnels de la magistrature, Privas, ville préfecture de l'Ardèche, répond aux critères énoncés par le ministère de la justice pour être reconnue comme pôle de l'instruction. Le fait d'avoir deux juges d'instruction à Privas n'est pas a priori un handicap dans le cadre de la réforme, puisque cette situation semble parfois admise dans d'autres départements présentant des caractéristiques rurales et géographiques similaires à l'Ardèche.
À la suite d'une réunion récente avec le cabinet du garde des sceaux, des pistes de réflexion ont été avancées dans ce sens. Le rattachement de l'Ardèche à une autre cour d'appel - Grenoble éventuellement - a aussi été évoqué, cette seconde hypothèse permettant de rapprocher le pôle d'instruction référent. Si cette hypothèse est toujours d'actualité, elle mérite d'être étudiée en détail, en pleine concertation avec les acteurs concernés.
Je demande donc au Gouvernement quelles suites concrètes sont susceptibles d'être données à ces différentes propositions.
M. le président. La parole est à Mme Christine Albanel, ministre de la culture et de la communication.
Mme Christine Albanel, ministre de la culture et de la communication. Monsieur le député, comme l'a déjà indiqué Mme la garde des sceaux, la réorganisation de l'instruction a été décidée par le Parlement lorsqu'il a adopté la loi du 5 mars 2007 tendant à renforcer l'équilibre de la procédure pénale, qui crée les pôles de l'instruction. Cette loi découle des propositions de la commission parlementaire mise en place suite à l'affaire d'Outreau.
Elle prévoit ainsi que ces pôles, constitués de deux magistrats et chargés de l'instruction des affaires criminelles et des affaires correctionnelles complexes, seront mis en place le 1er mars 2008. Elle dispose en outre que, à compter du 1er janvier 2010, toutes les affaires d'instruction seront confiées à un collège composé de trois juges d'instruction.
Aussi, la localisation des pôles de l'instruction a-t-elle d'emblée été décidée dans la perspective de la mise en oeuvre de la collégialité à partir de 2010. Le critère retenu pour localiser les pôles de l'instruction n'a pas été celui du nombre de postes de juges d'instruction de chaque tribunal de grande instance, mais celui de son activité, appréhendée sous l'angle du nombre de nouvelles instructions ouvertes au cours des trois dernières années.
Ainsi, les tribunaux de grande instance ayant, à eux seuls, une activité suffisante - soit plus de quatre cent quarante affaires nouvelles sur les trois dernières années, pour trois juges d'instruction - ont été retenus comme pôles de l'instruction.
Lorsque ce cumul représentait une activité insuffisante pour deux juges d'instruction, le tribunal ou les tribunaux de grande instance du département ont vu leur activité rattachée au pôle de l'instruction d'un département limitrophe et dépendant de la même cour d'appel.
Tel est le cas du tribunal de grande instance de Privas, seule juridiction de ce type dans le département de l'Ardèche. L'analyse de l'activité en matière de crimes et délits justifiant une instruction représente, pour les années 2004 à 2006, un équivalent temps plein moyen annuel de 1,55 juge d'instruction. C'est dans ces conditions, qu'il a été décidé de rattacher la juridiction de Privas au pôle d'instruction localisé à Avignon.
S'agissant de l'examen du rattachement de Privas au ressort d'une autre cour d'appel, soyez assuré que la garde des sceaux saisira ses services pour étudier cette question, si une proposition lui est faite en ce sens par le barreau de l'Ardèche.
M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Flory.
M. Jean-Claude Flory. Madame la ministre, merci pour votre réponse. Je prendrai contact, en lien avec les professionnels de la justice ardéchoise, avec les services de Mme la garde des sceaux, afin d'envisager cette hypothèse permettant de concilier tout à la fois efficience judiciaire et proximité.
Auteur : M. Jean-Claude Flory
Type de question : Question orale
Rubrique : Justice
Ministère interrogé : Justice
Ministère répondant : Justice
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 8 avril 2008