Question orale n° 200 :
éditions et imprimerie

13e Législature

Question de : M. Jean-Jacques Candelier
Nord (16e circonscription) - Gauche démocrate et républicaine

M. Jean-Jacques Candelier alerte Mme la ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi sur la gestion de la SA Imprimerie nationale. Des irrégularités sont constatées. Des méthodes de gestion des ressources humaines de casse de la masse salariale sont à déplorer, sur le site de Flers-en-Escrebieux, près de Douai, notamment. La direction entendait jusqu'à récemment dénoncer le PSE conclu en 2005. Il estime que les pratiques industrielles de l'État ne peuvent être les mêmes que celles de n'importe quelle entreprise privée. Il lui demande si la généralisation à toutes les fonctions publiques de l'indemnité différentielle est envisagée, afin d'assurer un meilleur reclassement possible de tous les salariés. L'État a un rôle social à jouer, et de transparence dans la gestion, afin de favoriser l'emploi et l'insertion, et il lui demande ses projets pour la SA Imprimerie nationale.

Réponse en séance, et publiée le 30 avril 2008

GESTION DE L'IMPRIMERIE NATIONALE

M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Candelier, pour exposer sa question, n° 200, relative à la gestion de l'Imprimerie nationale.
M. Jean-Jacques Candelier. Monsieur le président, madame la secrétaire d'État chargée du commerce extérieur, mes chers collègues, je suis préoccupé par la situation de l'Imprimerie nationale, notamment du site de Flers-en-Escrebieux, près de Douai.
Trois ans après le plan de restructuration, on peut dresser le bilan du reclassement des salariés licenciés. À ce jour, une trentaine d'entre eux, dont de nombreuses personnes de plus de cinquante ans, sont en congé de reclassement. Vous en conviendrez, ce chiffre correspond à autant de situations financières difficiles et de frustrations. Dans mon département, où le taux de chômage est très élevé, un emploi est un emploi, et le Gouvernement se doit de ne laisser personne sur le bord de la route.
Je sais que vous avez à coeur de rendre une bonne copie concernant ces reclassements. Vous dites aussi vouloir vous assurer de l'équilibre économique à court terme de cette entreprise. Pour ma part, j'estime que les deux vont de pair.
Le reclassement jusqu'au dernier salarié est une nécessité tant économique que sociale, et le pourrissement de la situation ne représente rien de bon pour personne. À l'heure actuelle, les offres proposées sont trop peu nombreuses et les formations quasiment inexistantes. D'après les déclarations de Mme la ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi, une dizaine de salariés n'a reçu aucune offre valable d'emploi, selon les critères fixés par le plan de sauvegarde de l'emploi. Les reclassements les plus difficiles sont ceux des anciens CDI et des salaires élevés.
Permettez-moi de remettre les pendules à l'heure. En effet, selon la mission de facilitation de l'accueil dans les fonctions publiques, chaque agent aurait reçu en moyenne quinze offres d'emploi. Cela constitue un abus de langage, car vous savez très bien que toutes ces offres provenaient de la fonction publique territoriale, où les salaires sont en général inférieurs aux critères de l'offre valable d'emploi du plan de sauvegarde de l'emploi.
Vous vous souvenez certainement que ce plan avait été arraché de haute lutte en 2005. Il était récemment question que la direction le dénonce, en dépit des promesses de Nicolas Sarkozy. Ces pratiques ne grandissent pas l'État. Au contraire, tout doit être mis en oeuvre pour reclasser intégralement les salariés. Je pense notamment à l'indemnité différentielle, prise en charge par l'État : j'estime qu'une généralisation de celle-ci à toutes les fonctions publiques, hospitalière ou territoriale, est indispensable. Cela permettrait de régler le cas des salaires les plus importants. Pour le moment, elle permet uniquement la prise en charge de la différence entre l'ancien salaire et celui escompté dans la fonction publique d'État.
Mieux vaut favoriser l'embauche par ce biais que de maintenir les anciens salariés dans leurs conditions de vie actuelles. Cette mesure est d'autant plus justifiée que ceux-ci ont chèrement payé les pots cassés de la gestion hasardeuse de l'entreprise publique. Ainsi, le Gouvernement serait bien avisé de ne plus cautionner la politique de casse de la masse salariale, qui se traduit par le remplacement, à des postes identiques, de salariés expérimentés par des plus jeunes.
De même, je constate que le dialogue social ne se fait pas entre les instances représentatives du personnel et la direction.
Il n'existe aucune visibilité sur la production du site de Douai et les propositions des salariés ne sont pas écoutées. Pourtant, dans son rapport public annuel de 2008, la Cour des comptes indique clairement que la descente aux enfers aurait pu être évitée si des choix de gestion différents avaient été faits.
Il me semble qu'une gestion différente devrait donc voir le jour dans cette entreprise, une gestion participative, où tous les avis comptent. Après les problèmes des retards de l'A380 et ceux de l'Imprimerie nationale, tout tend à démontrer que les travailleurs, au plus près de la production, identifient souvent aussi bien que les dirigeants ce qui va et ce qui ne va pas.
Ma question est la suivante. En tant qu'actionnaire de l'Imprimerie nationale, comment l'État compte-t-il pérenniser cette entreprise ? À cette fin, prévoit-il de modifier son mode de gouvernance ? Enfin, entend-il généraliser l'indemnité différentielle à toutes les fonctions publiques pour les salariés en reclassement ?
M. le président. La parole est à Mme Anne-Marie Idrac, secrétaire d'État chargée du commerce extérieur.
Mme Anne-Marie Idrac, secrétaire d'État chargée du commerce extérieur. Monsieur Candelier, voici les éléments de réponse que, au nom de Christine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi, je suis en mesure d'apporter à votre question sur la gestion de l'Imprimerie nationale.
Il faut d'abord évoquer les efforts considérables qu'a consentis l'État, qui a pleinement joué le rôle d'actionnaire que vous avez évoqué, pour accompagner l'entreprise dans son plan de restructuration. Je voudrais rappeler, en effet, le versement d'un apport en capital de 197 millions d'euros, qui a permis à l'entreprise de financer cette restructuration, notamment son volet social.
Par ailleurs, dès la conclusion des négociations du plan de sauvegarde de l'emploi au sein de l'entreprise, l'État s'est pleinement mobilisé pour favoriser le reclassement des salariés, en particulier des personnels sous statut, en leur permettant, par exemple, de bénéficier de contrats à durée indéterminée dans les administrations de l'État, territoriale et hospitalière.
La Mission de facilitation de l'accueil dans les fonctions publiques a été sollicitée dès 2005 et mène un travail actif de prospection au sein des administrations publiques pour proposer des offres d'emploi aux salariés de l'Imprimerie nationale.
Au début de l'année 2006, il a été décidé que le ministère de l'économie, de l'industrie et de l'emploi prendrait à sa charge une indemnité différentielle permettant aux salariés de l'entreprise reclassée dans les administrations de l'État de bénéficier d'une garantie de rémunération.
L'ensemble de ces efforts ont, en large partie, porté leurs fruits. En effet, aujourd'hui, sur les 178 personnes qui ont souhaité bénéficier du dispositif de reclassement, le taux de succès est de 75 %. Je voudrais vous informer de ce que la tendance du mois d'avril est favorable et que nous espérons une dizaine de reclassements supplémentaires dans les semaines à venir. L'État a contribué directement au reclassement de près de 75 salariés.
On ne peut toutefois éluder le fait que, malgré la restructuration très importante qu'elle a menée, l'Imprimerie nationale reste dans une situation financière fragile. À ce titre, elle se doit bien évidemment de chercher à minimiser les charges liées à la présence de personnels pour lesquels aucune solution de reclassement n'a pu être mise en place au sein du congé de reclassement.
Je voudrais toutefois vous indiquer, monsieur le député, que, contrairement aux craintes que vous avez exprimées, la dénonciation du plan de sauvegarde de l'emploi de 2005 n'est pas aujourd'hui la voie privilégiée par l'entreprise.
En outre, le Gouvernement réfléchit actuellement aux moyens juridiques nécessaires pour étendre la prise en charge par l'État de l'indemnité différentielle de garantie de salaire aux cas de reclassement dans les administrations territoriale et hospitalière. Je voudrais donc vous confirmer que l'État est fortement impliqué et souhaite faire preuve d'exemplarité en mettant en oeuvre un accompagnement social volontariste, à la hauteur des enjeux de cette restructuration inédite dans le secteur public.
M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Candelier.
M. Jean-Jacques Candelier. J'ai pris acte de vos propos, madame la secrétaire d'État. Sachez que je serai très vigilant quant à l'évolution de ce dossier. C'est dans les années soixante-dix que l'Imprimerie nationale et l'usine Renault ont été installées dans le Douaisis, pour compenser la disparition des mines. Le président connaît aussi bien que moi le secteur, puisque, tous les deux, nous sommes des Ch'tis. (Sourires.) Il n'est pas question pour la population et les élus de voir partir ou disparaître une telle entreprise, d'autant que la situation économique du Douaisis est très alarmante. Dans de nombreuses communes de la seizième circonscription, dont je suis l'élu, le taux de chômage atteint ou dépasse les 20 %. Nous resterons donc très vigilants, je le répète.

Données clés

Auteur : M. Jean-Jacques Candelier

Type de question : Question orale

Rubrique : Industrie

Ministère interrogé : Économie, industrie et emploi

Ministère répondant : Économie, industrie et emploi

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 29 avril 2008

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