Question orale n° 210 :
politique de l'éducation

13e Législature

Question de : M. William Dumas
Gard (5e circonscription) - Socialiste, radical, citoyen et divers gauche

M. William Dumas attire l'attention de M. le ministre de l'éducation nationale sur la suppression annoncée de 11 500 postes d'enseignants dans l'éducation nationale pour la rentrée 2008. Le président de la République avait promis l'excellence pour le système éducatif. Aujourd'hui, c'est une réduction drastique des moyens humains qui est imposée. Dans le département du Gard, près d'un millier d'élèves supplémentaires est annoncé pour la rentrée prochaine. Pourtant ce sont 25 postes d'enseignement et 240 heures de cours qui vont être supprimés. Quel va être l'avenir pour ces jeunes, dans un département déjà sinistré par les délocalisations industrielles de Well, Jallate, Perrier, Syngenta, etc. ? L'emploi agricole disparaît, l'emploi industriel est délocalisé, et après les fermetures des tribunaux, des casernes et bientôt des hôpitaux, il ne va pas rester grand-chose de la fonction publique. Avec 25 postes de moins pour 1000 élèves de plus, quel avenir peuvent espérer nos enfants ? L'accroissement des options, la prévention de la violence ou le suivi individualisé des élèves nécessitent un encadrement à la hauteur des enjeux d'aujourd'hui. A la question des moyens s'ajoute celle d'une politique éducative déraisonnable avec la suppression de la carte scolaire, la réduction de la durée du bac professionnel de quatre ans à trois ans et la suppression de la majorité des brevets d'enseignement professionnel. Il lui demande en conséquence quelles mesures il envisage de prendre.

Réponse en séance, et publiée le 30 avril 2008

SUPPRESSIONS DE POSTES À L'ÉDUCATION NATIONALE

M. le président. La parole est à M. William Dumas, pour exposer sa question, n° 210, relative aux suppressions de postes à l'éducation nationale.
M. William Dumas. Monsieur le ministre de l'éducation nationale, vous avez annoncé la suppression de 11 500 postes d'enseignant dans l'éducation nationale pour la rentrée 2008. Le Président de la République avait promis l'excellence pour notre système éducatif, mais, aujourd'hui, vous nous imposez une réduction drastique des moyens humains.
Selon vous, le système éducatif français coûte plus cher qu'ailleurs en Europe ; en réalité, votre vision comptable de l'école de la République fait du savoir un produit de consommation comme un autre et abandonne l'école au marché. Vous n'avez de cesse de mettre en avant votre révision générale des politiques publiques, mais il s'agit, en réalité, d'une politique de rigueur qui met en péril l'avenir de nos enfants.
Dans mon département du Gard, près d'un millier d'élèves supplémentaires sont annoncés pour la rentrée prochaine. Pourtant 25 postes d'enseignant et 240 heures de cours vont être supprimés. Quel va être l'avenir des jeunes dans un département déjà sinistré par les délocalisations industrielles de Well, de Jallate, de Perrier et de Syngenta, entre autres ?
Avec 25 postes de moins pour 1 000 élèves de plus, de nombreuses inquiétudes pèsent sur la pérennité des options, sur la prévention de la violence ou le suivi individualisé des élèves. Il faut aussi compter avec les conséquences de la suppression de la carte scolaire, de la réduction de la durée du bac professionnel de quatre à trois ans, et avec celles de la suppression de la majorité des brevets d'enseignement professionnel.
Notre Président avait promis l'excellence. Or c'est un nivellement par le bas que l'on nous propose. Aujourd'hui, face à la mobilisation des syndicats d'enseignants et des parents d'élèves, votre réponse est attendue par tout un département, et bien au-delà.
M. le président. La parole est à M. Xavier Darcos, ministre de l'éducation nationale.
M. Xavier Darcos, ministre de l'éducation nationale. Monsieur le député William Dumas, pouvons nous tenter de poser un regard objectif sur l'évolution du système éducatif ? Si la vision comptable dont vous parlez, qui a consisté depuis une vingtaine d'années à augmenter systématiquement le nombre de postes, avait produit des effets en termes d'efficacité, je serais évidemment le premier à la défendre.
Je vous rappelle qu'en une quinzaine d'années le budget de l'éducation nationale a doublé. Nous sommes aujourd'hui, et de loin, celui des pays de l'OCDE qui offre le meilleur encadrement éducatif. Parallèlement, nous ne cessons de perdre des places dans les classements internationaux et nous ne progressons pas dans la lutte contre les inégalités sociales. La moitié des étudiants qui entrent à l'université en sortent sans avoir obtenu de diplôme.
Après quarante ans d'expérience à l'éducation nationale, je ne crois donc pas du tout - je le dis de bonne foi, en vous regardant dans les yeux - que la réponse à ces questions consiste simplement à augmenter les crédits. Je pense même que nous avons trouvé là la meilleure façon depuis vingt ans pour ne pas penser la réforme. Il faut en finir avec cette bonne conscience qui nous pousse à toujours allouer des moyens supplémentaires et à dépenser plus. Il faut se poser la question de la manière dont nous travaillons. Ceux qui ont une vision comptable sont ceux qui croient qu'il suffirait d'ajouter mécaniquement des emplois pour tout régler, ce qui n'est évidemment pas vrai.
La majorité que je représente et le Gouvernement se sont investis dans la lutte contre l'échec scolaire, mais nous le faisons autrement qu'en créant des emplois. En finançant 150 000 heures supplémentaires, nous avons, par exemple, permis cette année aux élèves de l'éducation prioritaire de bénéficier d'études dirigées après les cours. Nous venons d'organiser 22 000 modules de stages pendant les vacances scolaires pour les élèves de CM1 et de CM2 en très grande difficulté. J'ai d'ailleurs constaté que ce dispositif donne entière satisfaction à tous. Nous avons réorganisé le temps scolaire pour que les professeurs puissent consacrer une partie de leur service aux élèves en plus grande difficulté. Nous avons revalorisé la filière professionnelle car, aujourd'hui, 50 % des lycéens en BEP - vous parlez à tort de suppression, monsieur le député, mais aucun BEP ne sera supprimé - ne poursuivent pas leurs études, et nous perdons chaque année 150 000 élèves avant même le baccalauréat professionnel ! Bref, il faut que nous pensions globalement la réforme du système plutôt que de nous contenter d'additionner des emplois.
Le département du Gard, et je comprends que vous évoquiez votre département, monsieur le député, connaît une augmentation des effectifs d'élèves. L'éducation nationale a ajusté ses emplois aux besoins réels. Ainsi, la hausse des effectifs des élèves est-elle bien compensée par la création d'emplois. Dans le primaire, aux 475 élèves supplémentaires correspond la création de 17 emplois dans le premier degré. Au collège, 295 élèves supplémentaires sont attendus à la rentrée 2008, et nous créons, pour eux, 9 emplois supplémentaires. Quant aux lycées généraux technologiques, ils perdront à la rentrée de 300 à 400 élèves - l'estimation actuelle est de 356 élèves. Nous avons donc ajusté nos moyens en conséquence, et un certain nombre de postes ne seront pas renouvelés.
Je vous confirme que tout cela ne remettra en cause ni l'accompagnement, ni le suivi, ni la qualité des enseignements. Nous avons simplement adapté l'offre éducative aux besoins, eu égard à la démographie.
M. le président. La parole est à M. William Dumas.
M. William Dumas. Monsieur le ministre, certains des chiffres que vous venez de citer concernant mon département correspondent à ceux dont je dispose, mais ce n'est pas toujours le cas. Dans le primaire, il y aura à ma connaissance, et selon les chiffres qui m'ont été fournis par l'académie de mon département, 31 ouvertures de classe pour 25 fermetures, soit seulement 6 créations de postes. En ce qui concerne les collèges, je compte bien 9 postes créés pour 295 élèves supplémentaires, mais 34 postes sont supprimés dans les lycées alors que 131 élèves supplémentaires sont attendus.
Peut-être mes chiffres sont-ils faux, mais votre réponse, monsieur le ministre, n'est, en tout cas, pas celle qu'attendaient les Gardois et les Gardoises. Ils suivent ce matin un mot d'ordre lancé par tous les syndicats d'enseignants et les fédérations de parents d'élèves pour mener une opération " département mort ". Je me suis renseigné tout à l'heure et le mouvement est particulièrement suivi. Ils sont nombreux ceux qui pensent, à juste titre, qu'il aurait sans doute mieux valu, avant de faire le " paquet fiscal " pour les plus aisés,...
M. Alain Ferry. Vous n'allez par recommencer !
M. William Dumas. ...penser à l'avenir de nos jeunes écoliers, collégiens et lycéens.

Données clés

Auteur : M. William Dumas

Type de question : Question orale

Rubrique : Enseignement secondaire

Ministère interrogé : Éducation nationale

Ministère répondant : Éducation nationale

Date : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue au Journal officiel du 29 avril 2008

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