Question orale n° 307 :
zones rurales

13e Législature

Question de : M. Henri Nayrou
Ariège (2e circonscription) - Socialiste, radical, citoyen et divers gauche

M. Henri Nayrou attire l'attention de M. le ministre d'État, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire, sur l'absence de cohérence des politiques d'aménagement du territoire, et les conséquences à venir sur les départements ruraux . Ces zones rurales et ces territoires de montagne subissent, en plus des effets de leurs handicaps naturels liés au relief ou à l'éloignement par rapport aux grands centres urbains, les conséquences de la déprise économique affectant des industries déjà anciennes, comme c'est le cas dans la commune de Saint-Girons où les papeteries sont en grande difficulté, notamment l'unité de Lédar issue du groupe Matussière et Forest qui vient de déposer le bilan. Sans les interventions de l'État garant de la solidarité nationale, sans une politique de zonages efficiente, le destin de ces territoires serait voué au désert. Les craintes des citoyens sont d'autant plus fondées que les exemples sont nombreux de désengagement de l'État en la matière. À titre d'exemple, en fin d'année 2008, ce sont des pans entiers de départements ruraux et montagnards qui vont disparaître des critères d'éligibilité du zonage AFR ( aide à finalité régionale 2007-2013 ) considérablement réduits sur décision du comité interministériel d'aménagement et de compétitivité des territoires du 6 mars 2006. Ainsi, le bassin de Saint-Girons, qui se situe en zone transitoire AFR, va perdre dans quelques mois, une arme essentielle dans l'aménagement du territoire et dans la localisation d'investissements et d'activités. En effet, le 1er janvier 2009, les dispositifs d'aides aux entreprises et à leurs projets d'investissements ne vont plus être possibles ou bien drastiquement réduits à partir de cette date. La conséquence immédiate sera qu'il va être encore plus difficile qu'aujourd'hui de voir se localiser sur le Saint-Gironnais des entreprises, des investissements productifs et donc des emplois nouveaux. Dans ces circonstances, il lui demande quelle politique le Gouvernement entend mener afin d'assurer aux territoires ruraux les moyens de mener de réelles politiques d'aménagement du territoire.

Réponse en séance, et publiée le 4 juin 2008

PERTINENCE DES CRITÈRES D'ÉLIGIBILITÉ AUX AIDES À FINALITÉ RÉGIONALE

M. le président. La parole est à M. Henri Nayrou, pour exposer sa question, n° 307, relative à la pertinence des critères d'éligibilité aux aides à finalité régionale.
M. Henri Nayrou. Madame la secrétaire d'État chargée de l'écologie, ma question s'adressait initialement au secrétaire d'État chargé de l'aménagement du territoire, M. Hubert Falco, car je souhaite attirer l'attention du Gouvernement sur l'absence de cohérence des politiques d'aménagement du territoire, et sur les conséquences qui en découlent pour les départements ruraux.
Les zones rurales et les territoires de montagne subissent, en plus des effets de leurs handicaps naturels liés au relief et à l'éloignement par rapport aux grands centres urbains, les conséquences de la déprise économique affectant des industries déjà anciennes. C'est le cas dans la commune de Saint-Girons où les papeteries sont en grande difficulté, notamment l'unité de Lédar issue du groupe Matussière et Forest, installé également en Alsace et dans l'Isère. Sans les interventions de l'État garant de la solidarité nationale, sans une politique de zonage efficiente, le destin de ces territoires serait voué à devenir un désert, sinon pour toujours, au moins pour longtemps.
Les craintes des citoyens de ma circonscription sont d'autant plus fondées que les exemples du désengagement de l'État sont nombreux. Ainsi, madame la secrétaire d'État, fin 2008, ce sont des pans entiers de départements ruraux et montagnards qui ne seront plus éligibles au zonage AFR - aide à finalité régionale - 2007-2013, considérablement réduit sur décision, non pas de l'Europe, mais du comité interministériel d'aménagement et de compétitivité des territoires du 6 mars 2006. Le 25 avril 2006, j'ai donc adressé un courrier à M. Christian Estrosi, le prédécesseur de M. Falco, pour lui signifier mon mécontentement de constater que 37 % de la population ariégeoise, et ses acteurs économiques dans des secteurs fragiles comme le Couserans pour les papeteries, le pays d'Olmes pour le textile, mais aussi les vallées de l'Arize et de la Lèze, allaient être, fin 2008, exclus de l'éligibilité à la prime d'aménagement du territoire - la PAT. M. Estrosi m'a répondu, le 22 juin suivant, que les décisions prises étaient irrévocables, mais qu'il existait " une réserve nationale permettant de faire face à d'éventuels sinistres industriels intervenant ultérieurement en dehors des territoires initialement zonés ".
Je me serais bien passé d'avoir vu le danger avant l'heure. En effet, la région de Saint-Girons vit actuellement dans la crainte de perdre 120 emplois, conséquence du dépôt de bilan de la société Matussière et Forest qui touche de plein fouet l'unité de production papetière de Lédar, située aux portes de Saint-Girons. Ainsi, le bassin du Couserans, qui se situe en zone transitoire AFR, va perdre dans quelques mois une arme essentielle dans l'aménagement du territoire et dans la localisation d'investissements et d'activités nouvelles ou à rétablir. En effet, à compter du 1er janvier 2009, les dispositifs d'aides aux entreprises et à leurs projets d'investissements ne vont plus être possibles, ou bien drastiquement réduits. Conséquence immédiate : il va être encore plus rare qu'aujourd'hui de voir se localiser sur le Saint-Gironnais des entreprises, des investissements productifs, et donc des emplois nouveaux.
Madame la secrétaire d'État, vous êtes en mesure de donner du corps à votre action si le Gouvernement décide de proroger les délais d'application des aides à finalité régionale dans les zones sacrifiées du département de l'Ariège et d'assurer aux territoires ruraux les moyens de mener de réelles politiques d'aménagement du territoire, leur permettant de se développer par l'activité au lieu de tomber dans la somnolence. Je vous remercie de parler ici du développement... durable, bien entendu.
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée de l'écologie.
Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, secrétaire d'État chargée de l'écologie. Monsieur Henri Nayrou, vous appelez l'attention du Gouvernement sur la situation de la commune de Saint-Girons, au regard du zonage des aides à finalité régionale et des difficultés économiques importantes rencontrées par ce territoire, ainsi que, plus largement, sur la politique à mener pour l'aménagement des territoires ruraux.
Le zonage AFR est imposé dans chaque État membre par la Commission européenne, dans le cadre de la politique communautaire de concurrence, pour délimiter les territoires sur lesquels il y a lieu de soutenir plus intensément les investissements des entreprises. Pour la période 2007-2013, le zonage a été établi sur un seuil de population éligible s'élevant à 9,3 millions d'habitants pour les zones permanentes. Cela représente une baisse de 55 % par rapport à la période précédente 2000-2006.
Pour limiter les effets de cette réduction, le Gouvernement a négocié auprès des autorités communautaires un zonage transitoire - vous l'avez évoqué - pour les communes qui perdent le bénéfice du zonage précédent. C'est la Commission qui a limité à deux années - 2007 et 2008 - le bénéfice de ce dispositif. La commune de Saint-Girons en bénéficie et a ainsi pu être intégrée dans la liste des zones transitoires. Mais il est vrai qu'elle en bénéficiera seulement jusqu'à la fin de l'année 2008, date à laquelle le dispositif ne pourra plus fonctionner.
Le Gouvernement a également négocié avec la Commission européenne une réserve nationale de population de zonage AFR de 250 000 habitants, afin de permettre à l'avenir le classement et l'inscription sur la carte des AFR des zones subissant un sinistre économique d'ampleur au cours de la période 2007-2013. C'est en quelque sorte une option de rattrapage. Cette mesure a été approuvée par la Commission dans sa décision du 7 mars 2007. Elle est donc opérationnelle.
Il convient maintenant d'examiner, en liaison avec les services du ministère de l'écologie, du développement durable et de l'aménagement du territoire, et ceux de la préfecture de région, si Saint-Girons répond aux critères d'utilisation de la réserve de zonage AFR, puisque c'est la seule possibilité qui reste. Mon collègue Hubert Falco est naturellement à votre disposition pour évoquer ces questions avec vous.
Je vous rappelle par ailleurs qu'en dehors des zones AFR, les pouvoirs publics peuvent mettre en place des dispositifs d'aide aux entreprises, notamment dans les PME, mais également dans les domaines de la recherche, de l'innovation ou de l'embauche des travailleurs défavorisés. De plus, la loi du 23 janvier 2005 a fortement renforcé les dispositifs fiscaux qui s'appliquent aux créations d'entreprise. La totalité du bassin de Saint-Girons est éligible puisqu'il est classé en zone de revitalisation rurale. C'est l'une des missions prioritaires d'Hubert Falco que de relever ces défis en se tenant à l'écoute des élus et des populations rurales. Il pourra, là aussi, évoquer avec vous les suites possibles.
M. le président. La parole est à M. Henri Nayrou.
M. Henri Nayrou. Madame la secrétaire d'État, nous avons parlé de zonage, de CIADT et d'autres mots abstraits alors que l'on devrait parler de vie à nos concitoyens. Vous avez répondu à ma question en soulignant l'impact du caractère irrévocable de la décision européenne visant à faire baisser le pourcentage des zones françaises éligibles aux aides à finalité régionale. J'observe que vous avez ouvert une autre voie en évoquant la réserve nationale, au cas où nous aurions besoin d'une aide si le délai de six mois ne s'avérait pas suffisant pour trouver une solution pour les papeteries Matussière et Forest.
M. Hubert Falco a donné vendredi dernier une interview aux Échos, dans laquelle il a parlé d'urbanisme et de compétitivité. J'aurais préféré qu'il utilise un mot qui rime avec compétitivité mais qui n'a pas la même signification : " solidarité ".

Données clés

Auteur : M. Henri Nayrou

Type de question : Question orale

Rubrique : Aménagement du territoire

Ministère interrogé : Écologie, énergie, développement durable et aménagement du territoire

Ministère répondant : Écologie, énergie, développement durable et aménagement du territoire

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 3 juin 2008

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