Question orale n° 348 :
CHU

13e Législature

Question de : M. Maxime Gremetz
Somme (1re circonscription) - Gauche démocrate et républicaine

M. Maxime Gremetz interroge Mme la ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative sur le devenir du CHU d'Amiens.

Réponse en séance, et publiée le 11 juin 2008

AVENIR DU CHU D'AMIENS

M. le président. La parole est à M. Maxime Gremetz, pour exposer sa question, n° 348, relative à l'avenir du CHU d'Amiens.
M. Maxime Gremetz. Ma question s'adressait à Mme la ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative.
Le conseil d'administration du CHU d'Amiens vient d'examiner son compte financier de 2007 ; seule une petite minorité a adopté ce budget... Au nombre de ceux qui ont voté contre : tous les représentants syndicaux et les élus, les abstentions étant bien plus nombreuses que les votes favorables. C'est dire que l'atmosphère était tendue ! Cette situation est inacceptable.
Malgré la diminution des dépenses de personnel et les conditions de travail insupportables imposées à celui-ci, malgré un manque criant d'appareils modernes indispensables, malgré une nourriture vivement décriée par les patients et malgré les restrictions imposées dans tous les services, le CHU d'Amiens présente un déficit cumulé de 46 millions d'euros. Son fonds de roulement est très faible et ses capacités d'autofinancement sont nulles. Tel est le résultat de la politique de tarification à l'activité.
Avec l'accord, à l'époque, de l'ARH de Picardie et du ministère de la santé, le CHU s'est lancé dans un projet de site hospitalier unique, regroupant notamment l'hôpital nord et l'hôpital sud, qu'il doit en partie autofinancer. Ce projet, bien qu'il ait été réduit, va se traduire par des dépenses considérables. Or, du fait de la réforme du financement des hôpitaux, 92 % des CHU sont aujourd'hui en déficit - alors qu'ils n'autofinancent pas de projet. Leurs directeurs réunis ont donné l'alerte dans un communiqué, qui fait savoir qu'un refus du Gouvernement d'aider financièrement leurs établissements les contraindrait à licencier du personnel, alors même qu'ils en manquent cruellement. Sachant que le CHU d'Amiens doit de surcroît financer, sur son budget propre, une part non négligeable du projet de site hospitalier unique, on mesure dans quelle situation financière dramatique il va se trouver. C'est pourquoi j'estime que le ministère et l'ensemble des parties concernées devraient réévaluer la contribution financière de l'État à cette réalisation.
Par ailleurs, pour pouvoir assurer ce financement, le CHU d'Amiens veut vendre au plus offrant tous les bâtiments de l'hôpital nord, alors qu'il faudrait garder un hôpital de proximité dans ce secteur de près de 50 000 habitants, le plus populaire et le plus sensible de la ville. Je vous le dis comme je le pense : c'est un gâchis humain considérable ! C'est même proprement insensé s'agissant d'une ville, d'un département et d'une région qui battent des records en matière de mortalité infantile, de maladies professionnelles et d'accidents du travail, où les besoins de santé sont loin d'être assurés, où le retard sanitaire est considérable et où le taux de chômage est très élevé, de même que le nombre de pauvres et de RMIstes.
C'est pourquoi je demande de façon pressante à Mme la ministre de faire en sorte que, sans remettre en cause le projet de site unique, l'hôpital nord d'Amiens demeure en activité et qu'on ne le vende pas n'importe comment, à n'importe qui. On pourrait installer dans les bâtiments existants des services de santé complémentaires à ceux qui seront hébergés sur le site principal. Obliger les habitants d'Amiens-nord, les plus pauvres et les plus démunis, qui vivent dans ce qu'on appelle des quartiers sensibles, voire hypersensibles, et ne disposent d'aucun moyen de locomotion, à faire vingt-cinq kilomètres - ce qui est à la fois coûteux et polluant - pour aller se faire soigner, voilà qui n'est ni sérieux, ni rationnel. Imaginez qu'on ferme l'hôpital d'une ville de 50 000 habitants : ce serait la révolte ! C'est d'ailleurs ce qui s'est produit à Carhaix, pourtant moins peuplée.
J'espère donc, monsieur le secrétaire d'État chargé des sports, obtenir des réponses claires à mes deux questions. D'une part, l'État va-t-il revoir sa participation au financement du site hospitalier unique ? Maintenant que le projet est lancé, il faut le réaliser mais, en raison de son déficit, le CHU ne peut manifestement plus tenir ses engagements d'autofinancement. D'autre part, conservera-t-on à l'hôpital nord sa vocation, qui est de proposer des soins, même si tous les services spécialisés sont transférés à l'hôpital sud ?
M. le président. La parole est à M. Bernard Laporte, secrétaire d'État chargé des sports, de la jeunesse et de la vie associative.
M. Bernard Laporte, secrétaire d'État chargé des sports, de la jeunesse et de la vie associative. Monsieur Gremetz, Roselyne Bachelot-Narquin m'a prié d'apporter la réponse suivante à votre question sur l'avenir du centre hospitalier universitaire d'Amiens.
Le projet de reconstruction et de restructuration du CHU d'Amiens vise à regrouper en 2012 les quatre sites actuellement dispersés dans l'ensemble de l'agglomération amiénoise, sur le site de l'actuel groupe hospitalier sud. Seules les unités de long séjour pour personnes âgées demeureront en centre-ville, au centre Saint-Victor.
Ce projet permettra en premier lieu d'offrir, sur un site unique, un ensemble hospitalier de conception moderne, en termes d'architecture comme de technologie. Il se substituera à des sites vétustes, dont la dispersion nuit à l'efficacité, suscite des difficultés d'accès pour les patients, et exige une organisation logistique complexe et coûteuse, ainsi que la multiplication des plateaux techniques.
Vous craignez que le choix d'implanter le futur hôpital au sud de la ville pénalise la population des quartiers nord. Mme Bachelot-Narquin est bien consciente qu'il s'agit d'une population sensible, qui a besoin d'un suivi médical et social attentif.
Cette dimension du projet fait donc l'objet d'un suivi particulier de la part du CHU d'Amiens et de l'agence régionale de l'hospitalisation de Picardie. Soyez assuré, monsieur Gremetz, que la permanence des soins est un enjeu essentiel de notre politique de santé. Il est ainsi envisagé de créer une maison médicale de garde, adossée à une maison pluridisciplinaire de santé, pouvant proposer une offre de soins d'urgence, de qualité et de proximité pour la population des quartiers nord. Une réflexion est également engagée sur la création d'un pôle pluridisciplinaire de santé, du type dispensaire, dont la vocation première serait la prévention et l'éducation thérapeutique.
Par ailleurs, la question de l'accueil aux urgences et des transports sanitaires pour la population des quartiers nord, sensiblement éloignée de l'emplacement du futur site, sera résolue en liaison avec la préfecture d'Amiens, qui élargira sa réflexion aux transports urbains, et notamment à la liaison routière nord-sud. Je rappelle que la construction du futur centre hospitalier durera jusqu'en 2012. Le ministère aura donc le temps de veiller à ce que la couverture sanitaire d'urgence des quartiers nord soit correctement assurée.
Le bilan du CHU d'Amiens est tout à fait positif. Nous sommes sur la voie de la réussite d'un projet qui propose une offre de soins également répartie sur l'ensemble de l'agglomération. Il faut en outre se féliciter de la démarche de retour à l'équilibre de ce CHU, qui s'est attaché à retrouver une stabilité budgétaire et financière.
M. le président. La parole est à M. Maxime Gremetz.
M. Maxime Gremetz. J'aurais préféré que Mme la ministre de la santé soit présente... Je vous ai d'ailleurs vu sursauter, monsieur le secrétaire d'État, en lisant qu'elle se félicitait du retour du CHU à l'équilibre budgétaire - alors que je viens de vous donner le résultat du rapport financier 2007, tel que le conseil d'administration l'a examiné. Un déficit cumulé de 46 millions d'euros, c'est un retour à l'équilibre financier tout à fait extraordinaire ! Mais peut-être est-ce pire dans les autres CHU...
Quoi qu'il en soit, cette situation ne peut pas durer, d'autant que, comme je l'ai rappelé, il est prévu que le CHU d'Amiens autofinance une partie du projet de site hospitalier unique, qui, bien que réduit, coûte extrêmement cher. C'est à ma connaissance le seul CHU qui autofinance ses projets. Or 92 % des CHU sont en déficit ; du fait de cet autofinancement, ce déficit sera encore plus important à Amiens.
Il ne s'agit pas de remettre en cause le projet mais, compte tenu des difficultés financières du CHU, de revoir les modalités de son financement, sous peine d'accroître encore le déficit de l'établissement, avec tout ce que cela implique. Il serait bon de pouvoir en discuter sérieusement.
Mme la ministre ne répond pas non plus à mon autre question. Il ne suffit pas de dire : " Ne vous inquiétez pas pour les quartiers sensibles d'Amiens-nord, on y assurera quelque chose " ! On n'y assurera rien du tout, puisque, lors du dernier conseil d'administration, le directeur du CHU m'a clairement indiqué ce qu'allaient devenir les bâtiments de l'hôpital nord...
M. le président. Il faut conclure, monsieur Gremetz.
M. Maxime Gremetz. J'en ai terminé, monsieur le président.
Ces bâtiments vont être vendus au plus offrant. Est-ce ainsi que l'on garantit la santé des gens ? C'est complètement absurde : on veut, d'un côté, vendre des bâtiments hospitaliers à n'importe qui, et, de l'autre, chercher des locaux pour installer de nouvelles structures médicales !
Je vous demande donc, monsieur le secrétaire d'État, de transmettre ces deux questions à Mme Bachelot - et je ne doute pas que vous le ferez - pour qu'on puisse étudier sérieusement ce problème particulièrement préoccupant.

Données clés

Auteur : M. Maxime Gremetz

Type de question : Question orale

Rubrique : Établissements de santé

Ministère interrogé : Santé, jeunesse, sports et vie associative

Ministère répondant : Santé, jeunesse, sports et vie associative

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 10 juin 2008

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