DSU
Question de :
M. Philippe Armand Martin
Marne (6e circonscription) - Union pour un Mouvement Populaire
M. Philippe Armand Martin attire l'attention de Mme la ministre du logement et de la ville sur les inquiétudes exprimées par certaines villes marnaises et notamment Epernay à propos de la réforme de la dotation de solidarité urbaine (DSU). Parmi les mesures évoquées, figure la suppression, dans son calcul, de la variable logement social, ainsi que la diminution de moitié du critère zone urbaine sensible (ZUS). Si de telles évolutions étaient retenues, cela pourrait emporter une réduction de moitié du montant de la DSU pour 2009 et une suppression totale pour 2010. Si la nécessité de réformer les finances locales pour réussir la politique de la ville est incontestable, il n'en demeure pas moins qu'une telle réforme priverait ces communes d'une importante dotation, et ce alors même qu'elles se sont engagées dans d'importantes opérations de rénovation urbaine et de cohésion sociale (exemple : quartier de Bernon à Epernay). En conséquence, il lui demande, d'une part, de bien vouloir lui préciser les contours de la réforme de la DSU envisagée par le Gouvernement et, d'autre part, de lui indiquer les mesures qui seront mises en oeuvre pour accompagner les villes qui mènent actuellement et effectivement une opération de rénovation urbaine.
Réponse en séance, et publiée le 8 octobre 2008
RÉFORME DE LA DOTATION DE SOLIDARITÉ URBAINE
M. le président. La parole est à M. Philippe Armand Martin, pour exposer sa question, n° 393, relative à la réforme de la dotation de solidarité urbaine.M. Philippe Armand Martin. Ma question, à laquelle s'associent mes collègues parlementaires marnais, s'adresse à Mme la ministre du logement et de la ville et porte sur les conséquences que pourrait emporter la réforme de la dotation de solidarité urbaine pour les villes d'Épernay et de Tinqueux.
Il apparaît que, parmi les mesures envisagées de réforme du mode de calcul de la DSU, figure la suppression de la variable logement social ainsi que la diminution de moitié du critère zone urbaine sensible - ZUS. Si cette perspective se confirmait, elle aurait de lourdes conséquences financières pour les deux villes précitées. En effet, pour l'année 2009 cela se traduirait par une réduction de moitié du montant de la DSU et, pour l'année 2010, par sa suppression totale.
Pour illustrer mes propos, je m'appuierai sur l'exemple de la ville d'Épernay.
En effet, au titre de l'année 2008, le montant de la dotation de solidarité urbaine s'élève à 883 903 euros, soit 2,21 % de recettes réelles de fonctionnement de la ville. Mme la ministre jugera sans doute que cette dotation n'est pas anodine, ce d'autant qu'elle est totalement réinvestie au profit d'actions sociales dans les quartiers d'Épernay.
L'affectation de cette somme se traduit ainsi par l'emploi d'éducateurs, la réalisation d'activités socio-éducatives, des opérations de tutorat scolaire ou encore le soutien à la Maison pour tous, véritable centre social et culturel du quartier de Bernon.
J'ajoute qu'Épernay s'est engagée dans une importante opération de renouvellement urbain et de cohésion sociale au sein du quartier de Bernon. Ainsi, la réduction de moitié de la DSU pour 2009 et son absence pour 2010 ne feraient que traduire des ambitions politiques moindres en matière de rénovation de ce quartier. Une telle décision serait d'autant plus regrettable qu'elle s'opposerait à la volonté du Président de la République de mener une grande politique de rénovation urbaine et de cohésion sociale en faveur des quartiers.
En conséquence, je souhaite connaître, d'une part, les intentions du Gouvernement quant à la réforme de la dotation de solidarité urbaine et, d'autre part, les mesures qui garantiront la poursuite des opérations de renouvellement urbain et de cohésion sociale ainsi que les actions sociales menées par les villes en faveur des quartiers qui sont actuellement en cours.
M. le président. La parole est à Mme Fadela Amara, secrétaire d'État chargée de la politique de la ville.
Mme Fadela Amara, secrétaire d'État chargée de la politique de la ville. Monsieur le député, je vous remercie d'avoir posé cette question.
Mme Christine Boutin, ministre du logement et de la ville, m'a demandé de bien vouloir l'excuser auprès de vous et de préciser la logique et l'esprit du projet gouvernemental de la réforme de la dotation de solidarité urbaine.
Comme vous le savez, la dotation de solidarité urbaine est une dotation de péréquation. Elle a pour but de compenser le surplus de charges des collectivités qui n'ont pas suffisamment de moyens pour accompagner leurs populations en difficulté. Elle a dépassé, en 2008, le milliard d'euros.
A ce jour, 800 communes bénéficient de cette dotation, parmi lesquelles des villes très fortement marquées par des difficultés socio-urbaines - celles dont les quartiers populaires souffrent depuis trop longtemps - et d'autres villes aux capacités financières plus importantes.
Il faut avoir le courage de dire que le temps est venu de mieux partager. Si l'on veut régler définitivement les problèmes des banlieues, il faut agir plus fortement là où sont les vrais besoins. Il faut aider les villes qui en ont vraiment besoin, parce qu'il y a des communes qui ne disposent que de 600 euros par an par habitant pour fournir les services de base à leur population, quand d'autres de la même taille ont trois, voire quatre fois plus.
C'est pour cela que la réforme est nécessaire. C'est pour cela que, le 8 février 2008, le Président de la République a voulu que la solidarité financière entre les villes soit réformée pour mieux aider les villes pauvres qui ont une population pauvre.
Trois axes guident la réforme.
Premier axe : la consolidation du principe de solidarité. Non seulement la DSU ne baisse pas, mais elle augmente significativement. En 2009, le montant global des concours financiers aux communes urbaines ayant des quartiers sensibles augmentera de 120 millions d'euros, dont 70 millions d'euros supplémentaires qui s'ajouteront au 1,09 milliard d'euros de la DSU de 2008. Cela représente 6 % d'augmentation, soit trois fois l'inflation prévue pour 2009.
Deuxième axe : le ciblage de la solidarité nationale sur les villes qui en ont réellement le plus besoin. Pour mieux aider les plus faibles, il faut accepter de moins soutenir les plus forts. Monsieur le député, qui peut considérer qu'une dotation qui bénéficie à trois villes de plus de 10 000 habitants sur quatre est une véritable dotation de solidarité ? A ce niveau, ce n'est pas de la solidarité, c'est du saupoudrage.
Troisième axe : l'application de la culture de résultat. Tous les rapports réalisés ces dernières années sur la politique de la ville par la Cour des comptes et par les deux assemblées le demandent. La population des quartiers prioritaires l'exige. Elle veut avoir de la visibilité sur ces sommes dépensées. Pour répondre à cette exigence républicaine, il est proposé qu'une partie de ces sommes - 50 millions d'euros, 5 % du total - soit consacrée au financement de projets spécifiques à la politique de la ville ou d'actions d'urgence, dans une centaine de communes parmi les plus en difficulté, en partenariat avec les élus.
M. Éric Raoult. Très bien !
Mme Fadela Amara, secrétaire d'État. C'est ce que nous appelons la dotation de développement urbain - DDU.
Monsieur le député, vos administrés nous demandent des comptes. En leur nom, vous me demandez des comptes. Je veux pouvoir être en mesure de vous répondre. Je vous demande donc, mesdames, messieurs les députés, de me donner les moyens de le faire.
Cette réforme est nécessaire. Elle est souhaitée par tous les acteurs, qui ont souligné l'urgence d'une réelle solidarité entre les territoires.
La DSU réformée, qui sera augmentée, s'ajoutera aux crédits spécifiques de la politique de la ville, qui sont maintenus en 2009. Elle s'ajoutera aux financements prévus par chaque ministère dans le cadre de leur programme pluriannuel d'intervention dans les quartiers, dont le total dépassera, en 2009, les 3,5 milliards d'euros, ce qui représente une mobilisation sans précédent du droit commun en faveur des quartiers prioritaires et marque, par son ampleur, un retour de la République dans ces quartiers.
Pour autant, le Gouvernement entend et comprend les interrogations des élus. C'est pourquoi, s'agissant des modalités de l'application de la réforme, il continue la concertation avec les élus, notamment dans le cadre du comité des finances locales, et avec ceux engagés dans des opérations de rénovation urbaine.
Qu'il s'agisse des critères de répartition, de la durée de sortie du dispositif, ou même des conditions d'attribution des 50 millions d'euros de la DDU, la concertation doit continuer. Nous devons trouver le bon équilibre entre les besoins légitimes exprimés par les collectivités locales. En tout état de cause, l'intérêt général doit prévaloir.
M. Éric Raoult. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Philippe Armand Martin.
M. Philippe Armand Martin. Je vous remercie, madame la secrétaire d'État, pour cette réponse. Certaines villes utilisent sans doute la DSU à mauvais escient, j'en conviens, mais tel n'est pas le cas d'Épernay. J'en appelle donc à votre arbitrage pour que l'État continue à accompagner budgétairement les villes qui se sont engagées dans une politique de renouvellement urbain.
Auteur : M. Philippe Armand Martin
Type de question : Question orale
Rubrique : Communes
Ministère interrogé : Logement et ville
Ministère répondant : Logement et ville
Date : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue au Journal officiel du 7 octobre 2008