Question orale n° 402 :
Comédie française

13e Législature

Question de : M. Jean-Christophe Lagarde
Seine-Saint-Denis (5e circonscription) - Nouveau Centre

M. Jean-Christophe Lagarde attire l'attention de Mme la ministre de la culture et de la communication sur le projet d'implantation d'une seconde salle de la Comédie française à la maison de la culture de Bobigny. Le 6 octobre dernier, le Gouvernement annonçait une union entre la Comédie française et la MC93 Bobigny, afin d'élargir le public du Français et d'offrir à ce théâtre national une deuxième grande salle modulable et adaptée aux scénographies contemporaines. L'ensemble des décideurs publics, le député de la circonscription, le président du conseil général, le maire de Bobigny se sont immédiatement félicités de cette décision et soutiennent ardemment la réalisation de cet ambitieux projet qui, outre l'intérêt culturel qu'il constitue, représente un symbole important puisqu'il montre ainsi la volonté de l'État de porter l'excellence théâtrale au coeur des quartiers. Toutefois, ce projet fut hélas rapidement dénoncé par la direction de la MC93 qui a ressenti cette décision comme une « OPA hostile » et a de ce fait également suscité un certain malaise dans la profession théâtrale qui appelle désormais à décliner la proposition de l'État, alors même qu'il est certain qu'un compromis gagnant pour tous peut et doit permettre l'implantation de la Comédie française à Bobigny en restant ouvert aux projets culturels spécifiques que la MC93 développent depuis plusieurs années. Le 12 novembre dernier, l'administratrice du Français annonçait d'ailleurs qu'elle renonçait à ce projet d'implantation à Bobigny. Par la voix de la ministre de la culture, le Gouvernement réaffirmait cependant le 15 novembre dernier sa volonté de poursuivre ce projet d'une salle de la Comédie française à Bobigny. Aussi, face aux inquiétudes qui se sont exprimées et aux propos contradictoires que l'on peut lire dans la presse, il lui demande de bien vouloir lui indiquer où en est le projet aujourd'hui et si le Gouvernement, qui a l'appui de l'ensemble des autorités locales et de la population, entend bien le concrétiser en levant notamment les inquiétudes des dirigeants de la MC93 mais également de la profession théâtrale.

Réponse en séance, et publiée le 3 décembre 2008

PROJET D'UNE SALLE DE LA COMÉDIE FRANÇAISE À BOBIGNY

M. le président. La parole est à M. Jean-Christophe Lagarde, pour exposer sa question, n° 402, relative au projet d'une salle de la Comédie Française à Bobigny.
M. Jean-Christophe Lagarde. Le 6 octobre dernier, le Gouvernement annonçait une union entre la Comédie Française et la MC 93 de Bobigny, afin d'élargir le public du Français et d'offrir à ce théâtre national une deuxième grande salle modulable et adaptée aux scénographies contemporaines.
Comme le président du conseil général et la maire de Bobigny, j'ai d'emblée salué cette décision. Les décideurs publics, en effet, soutiennent ardemment la réalisation de cet ambitieux projet qui, outre son intérêt culturel, constitue un important symbole de la volonté qu'a l'État de porter l'excellence culturelle - et théâtrale, en l'occurrence - au coeur de quartiers moins favorisés que ceux où la culture s'épanouit plus naturellement.
Toutefois, de nombreux malentendus et un manque de concertation préalable ont vite poussé la direction de la MC 93 à dénoncer ce projet, qu'elle a semble-t-il ressenti comme une OPA hostile. À son tour, cette réaction a suscité un certain malaise dans la profession théâtrale, qui appelle désormais à décliner la proposition de l'État. Pourtant, un compromis gagnant pour tous permettrait l'implantation de la Comédie Française à Bobigny tout en préservant la liberté de la MC 93 de développer des projets culturels spécifiques de grande qualité, comme elle le fait depuis plusieurs années.
Hélas, le 12 novembre dernier, Mme Muriel Mayette, administratrice du Français, annonçait le renoncement au projet d'implantation à Bobigny, et ce de façon si radicale qu'elle a provoqué une immense déception tant parmi les habitants de la Seine-Saint-Denis que parmi les élus concernés.
Un nouvel espoir est né de vos déclarations du 15 novembre dernier, madame la ministre de la culture et de la communication, lorsque vous avez confirmé votre volonté et celle du Gouvernement de poursuivre ce projet, afin qu'une salle de la Comédie-Française puisse être ouverte à Bobigny.
En l'état, la plus grande confusion règne donc autour de ce projet. Face à l'inquiétude et pour éclaircir les propos contradictoires que l'on peut lire dans la presse, pouvez-vous nous indiquer où il en est aujourd'hui ? Le Gouvernement qui, je le répète, a l'appui de l'ensemble des autorités locales - quelle que soit leur couleur politique - et celui de la population, entend-il donner corps à cette implantation en répondant aux inquiétudes des dirigeants de la MC 93, de la troupe de la Comédie Française et de l'ensemble de la profession théâtrale ? Nous tenons beaucoup à votre soutien à ce beau projet, dont il sera toujours temps de discuter ensuite des modalités.
M. le président. La parole est à Mme Christine Albanel, ministre de la culture et de la communication.
Mme Christine Albanel, ministre de la culture et de la communication. Au milieu de tous ces " propos contradictoires " que vous évoquez, tenons-nous en aux faits. Avant l'été, mon ministère a été saisi d'une proposition précise de la Comédie Française qui, parce qu'elle souhaite réévaluer ses missions, trouver de nouveaux publics et, pour ce faire, disposer d'une deuxième salle hors de Paris, a songé à Bobigny. Le sujet avait préalablement été débattu en conseil d'administration de la Comédie Française, et le compte rendu du débat prouve que de nombreux intervenants y étaient favorables - y compris certains qui ont changé d'avis depuis.
Pour ma part, j'ai apprécié l'idée de ce projet fédérateur - le mariage de la Comédie Française avec la MC 93 de Bobigny. Vous avez eu raison de dire qu'il profite à l'excellence culturelle.
À la rentrée, alors que le projet en était toujours à ses premiers pas, nous avons consulté le président du conseil général et la maire de Bobigny qui ont tous deux été très positifs. Nous avons également informé M. Schweitzer, président de la MC 93, dont le directeur a été reçu au ministère. J'ai alors souhaité que la Comédie Française confirme son intention. Réunie par l'administratrice, l'assemblée générale a donné son feu vert. Le monde du spectacle attisant les passions des uns et des autres, les premières fuites n'ont pas manqué de se produire. Nous avons donc organisé une conférence de presse pour annoncer que la réalisation de ce projet était envisagée à moyen terme.
C'est précisément alors que de nombreuses conditions semblaient réunies pour avancer que des polémiques sont survenues. La MC 93 a manifesté son inquiétude, et des opinions contradictoires sont apparues au sein de la Comédie Française.
En l'état actuel des choses, je continue de penser que le fait que la Comédie Française sorte de Paris pour ouvrir une deuxième salle est une bonne chose. Nous poursuivrons donc le projet - des réunions ont d'ores et déjà eu lieu à ce sujet. Il convient d'apaiser les esprits et de prendre le temps de la réflexion, mais n'abandonnons pas ce projet qui a du sens.
M. le président. La parole est à M. Jean-Christophe Lagarde.
M. Jean-Christophe Lagarde. Je vous remercie, madame la ministre, de ne pas abandonner ce projet : les habitants de Seine-Saint-Denis aiment autant l'art théâtral que les autres. Ce projet est pertinent, car il permettrait à de nouveaux publics d'avoir accès aux productions de la Comédie Française. Les élus y demeurent favorables même si, en effet, il convient d'apaiser les esprits. Quoi qu'il en soit, nous refuserons d'être piégés par des passions qu'anime la seule défense de corporations ou de castes, et non l'intérêt de la population - une population qui, si ces castes la libéraient, se passionnerait pour l'implantation dans son département d'une salle de la Comédie Française.

Données clés

Auteur : M. Jean-Christophe Lagarde

Type de question : Question orale

Rubrique : Arts et spectacles

Ministère interrogé : Culture et communication

Ministère répondant : Culture et communication

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 2 décembre 2008

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