Question orale n° 410 :
aide psychopédagogique

13e Législature

Question de : M. Bruno Le Roux
Seine-Saint-Denis (1re circonscription) - Socialiste, radical, citoyen et divers gauche

M. Bruno Le Roux interroge M. le ministre de l'éducation nationale sur l'avenir des réseaux d'aides spécialisées aux élèves en difficulté (RASED). Les annonces globales qu'il a faites jusqu'à présent n'ont fait que renforcer les inquiétudes, déjà grandes, des enseignants comme des parents d'élèves. C'est pourquoi, il souhaiterait avoir de plus amples explications concernant ses intentions à l'égard de ces réseaux d'aides spécialisées. Dans le département de la Seine-Saint-Denis, sur plus de 1 000 postes d'enseignants spécialisés, dont environ 40 % attribués à titre provisoire, nous avons actuellement 140 de ces postes qui sont occupés par des enseignants non titulaires du CAPASH. Nous craignons, par conséquent, la suppression de ces 140 postes, pour les déplacer dans les classes ordinaires et ainsi supprimer des postes d'enseignants spécialisés. Les RASED ont un rôle essentiel auprès des élèves en difficulté. Leur efficacité est d'ailleurs unanimement reconnue par l'ensemble des enseignants en Seine-Saint-Denis. Sans concertation aucune, ni évaluation de l'action des réseaux d'aides, il a pourtant décidé de « geler », dès cette année, 18 postes d'enseignants spécialisés dans des zones hors ZEP, avec pour conséquence une régression très forte dans la prise en charge des élèves en grande difficulté, qui ne sont pas uniquement scolarisés dans des ZEP. Ces mesures auront pour conséquence de priver des centaines d'élèves de Seine-Saint-Denis des aides spécialisées, qui d'ores et déjà ne couvrent plus totalement l'ensemble du département. Elles sont, d'ailleurs, en totale contradiction avec une politique ministérielle qui prétend faire de la lutte contre l'échec scolaire une « priorité ». La mise en place d'un système de soutien et « d'aide personnalisée » de deux heures ne peut se substituer au travail effectué dans le cadre des réseaux d'aides, qui ont été créés pour répondre aux besoins particuliers des élèves en difficulté. Il est donc urgent de sauvegarder ce dispositif des RASED et ses trois catégories de professionnels, titulaires de diplômes spécifiques (maître E, rééducateur et psychologue de l'éducation nationale). Il faut à tout prix préserver une école publique de qualité, en évitant que les inégalités ne se creusent davantage. Il doit pour cela revenir sur la suppression des postes d'enseignants spécialisés. Enfin, il lui paraît également indispensable d'ouvrir un véritable débat sur le devenir et le développement des réseaux d'aides spécialisées aux élèves en difficulté. Particulièrement inquiet suite à ses différentes annonces, il souhaite donc savoir quelles sont ses intentions quant au maintien des postes et au renforcement des moyens affectés aux réseaux d'aides spécialisées aux élèves en difficulté (RASED), afin qu'ils puissent poursuivre leurs actions essentielles pour nos enfants.

Réponse en séance, et publiée le 3 décembre 2008

AVENIR DES RÉSEAUX D'AIDES SPÉCIALISÉES AUX ÉLÈVES EN DIFFICULTÉ

M. le président. La parole est à M. Bruno Le Roux, pour exposer sa question, n° 410, relative à l'avenir des réseaux d'aides spécialisées aux élèves en difficulté.
M. Bruno Le Roux. Je souhaite revenir sur l'annonce de la suppression de 3 000 postes de spécialistes de la difficulté scolaire travaillant au sein des RASED, qui suscite de grandes inquiétudes parmi les enseignants comme chez les parents d'élèves.
Dans mon département, la Seine-Saint-Denis, sur plus de 1 000 postes d'enseignants spécialisés, dont environ 40 % sont attribués à titre provisoire, 140 sont occupés par des enseignants non titulaires du certificat d'aptitude professionnelle pour les aides spécialisées, les enseignements adaptés et la scolarisation des élèves en situation de handicap.
Je crains que les mesures annoncées ne permettent de supprimer ces 140 postes et de les déplacer dans les classes ordinaires, ce qui s'ajouterait, si la politique gouvernementale est menée conformément à ce qui a été annoncé, aux suppressions prévues de postes d'enseignants spécialisés.
Sans revenir sur le rôle essentiel des RASED, rappelons que, dès cette année, sans concertation, sans évaluation du travail de ces réseaux, dix-huit postes d'enseignants spécialisés dans les zones hors ZEP ont été gelés. Cela conduit à une régression très forte dans la prise en charge des élèves en grande difficulté qui, dans un département comme le mien, ne sont pas uniquement scolarisés dans des ZEP.
Les mesures prises par le Gouvernement priveront des centaines d'élèves de Seine-Saint-Denis des aides spécialisées, qui ne couvrent déjà plus l'ensemble du département. Dans ma circonscription, qui inclut Épinay-sur-Seine, Saint-Ouen, La Plaine Saint-Denis et L'Île-Saint-Denis, près de 2 000 élèves bénéficient aujourd'hui des RASED.
N'opposons pas les différentes formes d'aide aux élèves : les RASED sont complémentaires des autres formes d'aide par lesquelles vous souhaitez résoudre les difficultés des élèves. Il est donc urgent de sauvegarder ce dispositif et les trois catégories de professionnels titulaires de diplômes spécifiques qui font bénéficier nos élèves d'un soutien scolaire unanimement reconnu. Comment renforcer à l'avenir ces dispositifs d'aide aux élèves en difficulté ? Voilà la seule question que nous devrions nous poser.
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée de la famille.
Mme Nadine Morano, secrétaire d'État chargée de la famille. Je vous prie tout d'abord, monsieur Le Roux, d'excuser mon collègue Xavier Darcos, retenu à Bruxelles par une audition devant le Parlement européen. Je vous répondrai en son nom.
Les maîtres des classes sont les premiers à faire face, dans la classe et dans l'école, aux difficultés scolaires de leurs élèves. Si l'on ne peut les laisser lutter seuls contre toutes les formes de difficulté, dont les origines sont diverses, le recours aux RASED montre aujourd'hui ses limites.
Ainsi, les prises en charge par les maîtres spécialisés sont trop ponctuelles. Les réseaux sont éloignés des projets d'enseignement des classes et des écoles. Dans la plupart des cas, les élèves concernés quittent la classe pour la durée de la prise en charge et n'assistent donc pas aux cours.
En outre, l'augmentation continue du nombre d'emplois de maîtres spécialisés dans le premier degré n'a pas permis, selon le fonctionnement actuel, de réduire l'échec scolaire. Or, c'est sur l'échec scolaire que nous voulons agir. Par exemple, alors que votre département dispose de 338 maîtres, les résultats obtenus par les élèves de Seine-Saint-Denis aux évaluations nationales n'ont pas progressé depuis des années.
La difficulté scolaire ne résultant pas d'une seule cause, il faut sans doute mieux distinguer les effets de l'incompréhension, d'une part, de ceux du trouble psychologique et comportemental, de l'autre.
Xavier Darcos a souhaité remédier à cette situation en apportant une réponse adaptée à toutes les difficultés que rencontrent les enfants. Elle repose tout d'abord sur les deux heures hebdomadaires d'aide personnalisée, notamment de remédiation et de remise à niveau dans les enseignements fondamentaux, dispensée par les maîtres de leur école. Par ailleurs, des stages de remise à niveau en français et mathématiques pour les CM1 et CM2 sont organisés pendant les vacances scolaires et sont, au demeurant, très suivis.
L'action des 8 000 maîtres spécialisés structurés en RASED sera réinvestie pour résoudre spécifiquement les difficultés comportementales et psychologiques des élèves, c'est-à-dire les problèmes que les professeurs des écoles ne pourraient traiter dans le cadre des dispositifs que je viens d'énumérer. Le rôle et les fonctions des 3 700 psychologues scolaires restent inchangés.
À la rentrée 2009, un ou plusieurs maîtres spécialisés itinérants seront ainsi affectés par l'inspecteur d'académie à une école où ils exerceront à temps plein comme titulaires d'une classe. Cette nouvelle implantation se fera, dans la mesure du possible, au sein de l'aire géographique d'intervention du RASED. Ces maîtres pourront donc exercer, s'ils le souhaitent, dans une école du secteur qu'ils connaissent déjà.
Vous le voyez, il n'y a pas de craintes à avoir sur l'aide apportée à nos enfants : Xavier Darcos souhaite simplement fournir une réponse plus ciblée et mieux adaptée aux multiples situations rencontrées en classe.
M. le président. La parole est à M. Bruno Le Roux.
M. Bruno Le Roux. Je vous remercie, madame la secrétaire d'État. Je ne partage pas l'avis que vous exprimez au nom de M. Darcos sur les RASED. Je remarque simplement que les publicités incessantes à la télévision sur les boîtes qui proposent de l'aide aux élèves en difficulté - Acadomia et Complétude, entre autres - suffisent à témoigner que la politique du Gouvernement est une politique d'abandon de ces élèves en difficulté.
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Nadine Morano, secrétaire d'État. Je ne peux vous laisser parler d'" abandon " dans cet hémicycle ! L'explosion de ces entreprises qui s'occupent des difficultés scolaires de nos enfants - Acadomia et bien d'autres - n'est pas nouvelle. Voyez tous les documents visant à aider nos enfants à se remettre à niveau. Vos propos sont donc inacceptables, monsieur Le Roux !
Xavier Darcos a justement souhaité apporter aux élèves en difficulté une aide beaucoup plus ciblée. Vous faites du terrain ; nous aussi. Non seulement les gamins placés dans un RASED sont stigmatisés, mais ils quittent la classe, ce qui les empêche de suivre le cours et aggrave leur retard : en d'autres termes, on ne fait que les handicaper davantage.
Il s'agit non pas de les abandonner, mais, bien au contraire, de leur fournir l'accompagnement très personnalisé qu'ils attendent, afin d'empêcher que l'éducation de nos enfants soit laissée au secteur privé, ce qui privilégierait les familles qui ont les moyens, au détriment des plus pauvres. Sur ce point, nous voulons réagir.
M. Bruno Le Roux. Vous faites le jeu des boîtes à bac !

Données clés

Auteur : M. Bruno Le Roux

Type de question : Question orale

Rubrique : Enseignement

Ministère interrogé : Éducation nationale

Ministère répondant : Éducation nationale

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 2 décembre 2008

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