protection des végétaux
Question de :
M. Philippe Vigier
Eure-et-Loir (4e circonscription) - Nouveau Centre
M. Philippe Vigier interroge M. le ministre de l'agriculture et de la pêche sur la situation délicate des agriculteurs producteurs de maïs qui sont en attente, pour la campagne 2009 d'une homologation du produit cruiser, un traitement des semences contre les insectes du sol. En 2008, le cruiser a été autorisé pour une durée d'un an. En parallèle, un suivi attentif a été engagé par les services de l'État, en toute transparence et avec l'ensemble des parties prenantes. Ce suivi n'a mis en lumière aucune nocivité évidente, en particulier pour les abeilles. En outre, le cruiser a largement répondu à l'intérêt que lui portent les agriculteurs. Ce produit a prouvé toute son efficacité, liée à une très grande sécurité d'emploi ainsi qu'un intérêt environnemental majeur : les doses d'utilisation sont extrêmement réduites et précisément localisées. En l'absence d'une prise de décision rapide, les agriculteurs se verraient confrontés en 2009 à une impasse technique qui se solderait par la perte d'une centaine de millions d'euros pour l'ensemble des agriculteurs concernés ! En l'état actuel des choses, il n'existe aucun produit alternatif au cruiser que les autres pays producteurs de maïs utilisent par ailleurs largement. C'est pourquoi il souhaite connaître les suites qui seront réservées à cette attente d'homologation.
Réponse en séance, et publiée le 7 janvier 2009
CONDITIONS D'UTILISATION DU " CRUISER "
POUR LE TRAITEMENT DU MAÏS
M. Philippe Vigier. Monsieur le ministre de l'agriculture et de la pêche, ma question porte sur l'homologation de la préparation Cruiser, qui vient d'être renouvelée pour la campagne de 2009.
En 2008, le Cruiser a été autorisé pour une durée d'un an. En parallèle, un suivi attentif a été engagé par les services de l'État, en toute transparence et avec l'ensemble des parties prenantes. Ce suivi, dans l'état des connaissances actuelles, n'a mis en lumière aucune nocivité évidente, en particulier pour les abeilles.
Comme vous l'avez souligné, l'agriculture française a besoin de disposer de moyens efficaces et durables pour lutter contre le ravage des cultures, dans le souci d'assurer la production des denrées alimentaires.
À mes yeux, la décision, prise le 17 décembre, d'autoriser l'utilisation du Cruiser, conformément à l'avis favorable rendu le 14 novembre par l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments, est positive. Le Cruiser a en effet largement répondu à l'intérêt que lui portent les agriculteurs. Je note avec satisfaction qu'afin de sortir de l'impasse technique actuelle, vous avez demandé aux industries phytopharmaceutiques de lui trouver des produits de substitution, qui n'existent pas actuellement.
Néanmoins, cette décision ne satisfait pas entièrement les professionnels concernés, puisque l'homologation prendra fin le 15 mai 2009, ce qui suscite certaines difficultés, notamment lorsque les semis dépassent cette date. Ce fut le cas en 2008, du fait de conditions climatologiques particulières. L'obligation de n'utiliser le produit qu'une année sur trois pose également problème, en particulier dans les zones où le Cruiser a déjà été utilisé en 2008. De ce fait, les productions de maïs ne sont pas protégées contre les attaques de taupin, parasite contre lequel les seuls traitements efficaces sont préventifs. En outre, l'échéance fixée au 15 mai contraint à renouveler les démarches visant à obtenir une homologation plus longue. Je rappelle que celle-ci est de dix ans pour les autres produits.
Monsieur le ministre, vous avez apporté une première réponse au problème en autorisant l'utilisation du Cruiser jusqu'au 15 mai 2009. Mais la durée d'homologation est trop courte et l'obligation de n'utiliser ce produit qu'une année sur trois est contraignante. Dans l'attente de solutions alternatives performantes, quelles solutions envisagez-vous afin de permettre aux professionnels de planifier de manière durable l'usage de ce produit ?
M. le président. La parole est à M. Michel Barnier, ministre de l'agriculture et de la pêche.
M. Michel Barnier, ministre de l'agriculture et de la pêche. Monsieur le député, je vous remercie de m'interroger sur ce sujet sensible pour les agriculteurs, qui rencontre en outre un écho important auprès de l'opinion et des associations concernées par l'environnement.
Le 17 décembre, j'ai effectivement décidé de renouveler pour l'année 2009 l'autorisation de la préparation Cruiser. Cette décision a été prise sur la base de l'avis favorable rendu le 14 novembre 2008 par l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments, et une fois recueilli le point de vue des différentes parties concernées : apiculteurs, associations de défense de l'environnement et agriculteurs. Plusieurs réunions avaient été organisées au préalable et chacun a pu exprimer largement ses préoccupations, auxquelles j'ai été attentif.
L'autorisation de mise sur le marché du Cruiser a été donnée, comme en 2008, pour une durée d'un an et dans des conditions strictement encadrées. Il n'est utilisable pour les semis que jusqu'au 15 mai 2009 et son usage sur une même parcelle n'est autorisé qu'une année sur trois. Enfin, des dispositions nouvelles visant à réduire l'émission de poussières contenant la substance active du Cruiser lors du semis ont été prévues. Elles comportent notamment la mise en oeuvre d'un plan " qualité poussières " au sein des usines d'enrobage et l'installation, lors du semis, d'un récupérateur de poussières sur les semoirs.
Le protocole de suivi de l'autorisation est également renforcé afin de répondre aux faiblesses du précédent dispositif, dénoncées par certaines organisations syndicales et associatives, ainsi que par les apiculteurs. Il est étendu à six régions au lieu de trois l'an passé. Il prévoit aussi un renforcement des analyses d'air, une augmentation du nombre de ruchers témoins et une meilleure traçabilité des parcelles.
Parallèlement, des mesures visant à améliorer l'organisation de la filière apicole et à intensifier les expertises et le suivi des mortalités seront mises en oeuvre, telles qu'elles ont été préconisées dans le rapport de très grande qualité sur la filière apicole que Martial Saddier, député de Haute-Savoie, nous a remis, à Mme Kosciusko-Morizet et à moi-même, le 10 octobre dernier.
J'ai parfaitement conscience des difficultés que les conditions restrictives d'utilisation du Cruiser peuvent poser aux agriculteurs. J'ai d'ailleurs appelé les firmes phytopharmaceutiques à intensifier leur recherche pour trouver des solutions de substitution, afin de sortir de la situation actuelle et de donner aux agriculteurs qui doivent protéger le maïs des nuisances du taupin, les moyens de le faire dans les meilleures conditions possibles.
Mais, dans cette attente, toutes les précautions doivent être prises. Le choix de la date du 15 mai reprend une recommandation de l'AFSSA, tout comme la possibilité d'utiliser le Cruiser sur une même parcelle une année sur trois seulement. Je comprends que, pour certains agriculteurs, ces précautions engendrent des contraintes dans le déroulement de leur campagne de culture ; mais ils conservent la possibilité d'utiliser d'autres produits phytosanitaires, comme par exemple le Force 1,5 G, que mes services viennent d'autoriser.
L'autorisation du Cruiser, telle qu'elle a été décidée pour 2009, tend à répondre aux préoccupations contradictoires qui se sont exprimées à ce sujet. Elle concilie deux impératifs - la protection des cultures et la préservation de la biodiversité - et permet une gestion et un suivi renforcés de l'utilisation de ce produit, en cohérence avec les conclusions du Grenelle de l'environnement.
M. le président. La parole est à M. Philippe Vigier.
M. Philippe Vigier. Monsieur le ministre, si chacun sait que l'utilisation des produits phytosanitaires nécessite de prendre de nombreuses précautions, il ne faut pas, pour autant, laisser une profession totalement dans l'expectative. Je vous remercie donc pour les précisions que vous nous avez apportées.
Aujourd'hui, les agriculteurs qui ont déjà utilisé les traitements en 2008 se trouvent dans une impasse dont ils ne sortiront que si l'usage des nouveaux produits, dont vous venez de nous informer de l'homologation, est autorisé. Comme les médicaments, dont la procédure d'autorisation de mise sur le marché dure cinq ans, ces produits devront connaître une longue phase d'observation. Nous traversons donc une période intermédiaire particulièrement sensible de trois à quatre ans durant laquelle, en concertation avec la profession agricole, nous devons, en utilisant le Cruiser ou d'autres produits, nous assurer que la culture du maïs se poursuit sans poser de problème de santé publique.
Auteur : M. Philippe Vigier
Type de question : Question orale
Rubrique : Agriculture
Ministère interrogé : Agriculture et pêche
Ministère répondant : Agriculture et pêche
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 6 janvier 2009