Question orale n° 58 :
hôpitaux

13e Législature

Question de : M. Jean-Paul Bacquet
Puy-de-Dôme (4e circonscription) - Socialiste, radical, citoyen et divers gauche

M. Jean-Paul Bacquet attire l'attention de Mme la ministre de la santé, de la jeunesse et des sports sur la situation financière catastrophique de l'hôpital d'Issoire. Le 28 mars 2006, une première question orale sans débat avait été posée au précédent ministre de la santé sur la situation financière du centre hospitalier d'Issoire et sur les mesures de redressement proposées tels la limitation drastique de l'investissement, l'externalisation ou l'automatisation d'un certain nombre de services, la suppression de postes, globalement tous les week-end ou les jours fériés, la modification des plannings de travail, le gel de la formation continue, la limitation des formations professionnelles et la fermeture des lits en période estivale. Le précédent ministre n'avait pas apporté de réponse crédible, si ce n'est de reprendre les propositions du directeur de l'agence régionale de l'hospitalisation, à savoir le rapprochement clinique privée-hôpital, et une réorganisation interne. Aujourd'hui, malheureusement, la situation non seulement n'a pas évolué favorablement, mais elle s'est dégradée. L'argument, tenu par le directeur de l'ARH, qui consistait à dire qu'il fallait faire un plateau technique commun entre le public et le privé, parce que non seulement la fermeture de la chirurgie publique était probable, mais que de plus la chirurgie privée était menacée car en difficulté financière, ne tient plus. En effet, la clinique privée vient d'être rachetée par un groupe financier puissant, ce qui confirme non seulement que cet établissement présente un intérêt à venir, mais que de plus ce groupe assure la capacité financière à cette clinique pour faire ses investissements, sans aller solliciter l'argent du public. Par contre, la situation de l'hôpital est de plus en plus dramatique. Rapports après rapports, annonces après annonces, intimidations et parfois menaces, tout conduit à une déstabilisation du personnel, à une inquiétude grandissante de tous les acteurs, à une démotivation générale. Lorsque le Gouvernement, avant la décentralisation et avant la loi Juppé en 1976, a construit un service de chirurgie publique à l'hôpital, il savait qu'il ne pourrait être financièrement équilibré, parce que le nombre de lits était insuffisant. Mais cette décision était faite pour assurer une offre de soins publique à l'ensemble de la population. Aujourd'hui, la suppression de la chirurgie publique serait incontestablement un retour en arrière de trente ans et une diminution de l'offre de soins pour tous, ce d'autant que l'on dénonce dans le même temps les dépassements d'honoraires dans le privé. Par contre, il est inacceptable que le directeur régional de l'hospitalisation n'assume pas ses responsabilités, en annonçant clairement ce qu'il veut : soit il décide une fermeture de la chirurgie publique et, de ce fait, pénalise une partie de la population, mais alors qu'il assume au moins le reclassement du personnel, avec la reconversion de certains services de l'hôpital ; soit il laisse se dégrader la situation, en fuyant ses responsabilités, pire, en voulant les faire prendre à d'autres, et l'on aura non seulement la fermeture de la chirurgie, mais aussi des suppressions massives d'emplois. Un conseiller général du ministère s'est rendu sur place le 10 octobre dernier et a rencontré les différents intervenants afin de mieux comprendre la situation et ouvrir un dialogue sur le devenir de l'hôpital. Cette visite faisait suite à celle d'un précédent conseiller général, lui-même faisant suite à un rapport concernant la réorganisation de l'offre de soins, ce rapport faisant suite lui-même à des propositions d'un directeur intérimaire. Enfin, il souhaite rappeler que la situation de l'hôpital d'Issoire n'est que la conséquence d'un certain nombre d'incompétences de gestion comme cela a été dénoncé dans le rapport de la chambre régionale des comptes, et de l'incapacité du directeur de l'ARH à assumer ses responsabilités, car si aujourd'hui Issoire est malade, c'est parce que ce directeur n'a pas traité de façon cohérente le pôle chirurgical Issoire-Brioude. Il lui demande donc d'indiquer quelle réponse cohérente elle entend donner à une situation qui ne fait que se dégrader.

Réponse en séance, et publiée le 19 décembre 2007

SITUATION FINANCIÈRE DE L'HÔPITAL D'ISSOIRE DANS LE PUY-DE-DÔME

M. le président. La parole est à M. Jean-Paul Bacquet, pour exposer sa question, n° 58, relative à la situation financière de l'hôpital d'Issoire dans le Puy-de-Dôme.
M. Jean-Paul Bacquet. Ma question s'adressait à Mme la ministre de la santé, de la jeunesse et des sports, mais je suppose qu'elle a demandé à M. le secrétaire d'État chargé des sports d'étudier cette question particulièrement difficile.
J'avais déjà interrogé le prédécesseur de Mme la ministre le 28 mars 2006 dans cet hémicycle sur la situation financière du centre hospitalier d'Issoire. On proposait alors pour y remédier de limiter de façon drastique l'investissement, d'externaliser ou d'automatiser un certain nombre de services, de supprimer des postes, surtout les week-ends et les jours fériés, de modifier les plannings de travail, de supprimer la formation continue, de limiter la formation professionnelle et de fermer des lits en période estivale - bref, tout ce qui contribue au bon fonctionnement d'un hôpital !
Le ministre de l'époque, à part une vibrante allusion à la beauté de la ville d'Issoire, illustrée par Jules Romains, n'avait pas apporté de solution crédible, sinon celle avancée par le directeur de l'Agence régionale de l'hospitalisation, à savoir le rapprochement de l'hôpital avec une clinique privée et une réorganisation interne.
Aujourd'hui, malheureusement, la situation s'est encore dégradée. L'argument du directeur de l'ARH en faveur d'un plateau technique commun public-privé entre deux services chirurgicaux menacés de fermeture ne tient plus. En effet, la clinique privée, prétendument en difficulté, vient d'être rachetée par un groupe financier puissant, ce qui non seulement confirme son intérêt financier pour l'avenir, mais lui garantit en outre une capacité financière pour faire ses investissements sans solliciter l'argent du public.
En revanche, la situation de l'hôpital est de plus en plus dramatique. Rapports, annonces, intimidations et parfois menaces s'accumulent, entraînant la déstabilisation du personnel, l'inquiétude de tous les acteurs et une démotivation générale.
Lorsque le service de chirurgie publique avait été installé à l'hôpital, avant la décentralisation et la loi Juppé de 1976, le Gouvernement savait que ce service ne pourrait être financièrement équilibré, du fait d'un nombre de lits insuffisant, mais il avait pris cette décision pour assurer l'égalité d'accès aux soins publics à l'ensemble de la population, dans un souci d'aménagement du territoire.
La suppression de la chirurgie publique serait incontestablement un retour en arrière de trente ans et une diminution de l'offre de soins pour tous, alors que l'on assiste, dans le même temps, à des dépassements d'honoraires dans le privé.
Ce qui est inacceptable, c'est que le directeur régional de l'hospitalisation n'assume pas ses responsabilités et n'annonce pas clairement ses intentions. S'il décide une fermeture de la chirurgie publique, pénalisant ainsi une partie de la population, qu'il assume au moins le reclassement du personnel et la reconversion de certains services de l'hôpital. Mais s'il laisse se dégrader la situation en fuyant ses responsabilités, voire en les faisant prendre par d'autres, la fermeture de la chirurgie publique s'accompagnera de suppressions massives d'emploi.
Un conseiller général du ministère s'est rendu sur place le 10 octobre dernier pour rencontrer les différents acteurs - responsables syndicaux, direction - en ma présence, afin de mieux comprendre la situation et d'ouvrir un dialogue sur le devenir de l'hôpital. Nous n'en avons aucune nouvelle, pas plus que de la visite d'un précédent conseiller général, M. Noiret, ni du rapport de Mme Lodiel concernant la réorganisation de l'offre de soins, ou encore des propositions émises par un directeur intérimaire, M. Parrot.
Monsieur le secrétaire d'État, la situation de l'hôpital d'Issoire n'est que la conséquence d'erreurs de gestion, dénoncées par la chambre régionale des comptes, et de l'incapacité du directeur de l'ARH à assumer ses responsabilités car, aujourd'hui, si Issoire est malade, c'est parce que ce directeur - voire son prédécesseur - n'a pas su traiter de façon cohérente le pôle chirurgical Issoire-Brioude.
Ma question est simple : quand le ministère de la santé apportera-t-il une réponse cohérente à une situation qui ne fait que se dégrader et quand permettra-t-il aux élus, aux patients et aux personnels de comprendre ses intentions ?
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État chargé des sports.
M. Bernard Laporte, secrétaire d'État chargé des sports. Monsieur le député, vous interrogez la ministre de la santé, de la jeunesse et des sports sur la période difficile que traverse le centre hospitalier d'Issoire en raison à la fois de l'orientation de ses activités et de sa situation économique.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin a confié une mission à M. Patrick Broudic, conseiller général des établissements de santé. Cette mission n'est pas terminée, mais je peux d'ores et déjà vous faire connaître certaines de ses conclusions provisoires.
La situation économique de l'établissement est certes délicate, mais les résultats de l'exercice 2006 ont permis de couvrir la plus grande partie des déficits des années antérieures et la trésorerie a été rétablie. L'exercice 2007 devrait se solder par un déficit de l'ordre de 600 000 euros, le chef de service ayant décidé unilatéralement de réduire d'un quart les capacités d'hospitalisation complète en médecine, au motif qu'il ne disposait pas des effectifs nécessaires pour faire fonctionner le service à pleine capacité.
Le climat social dans l'établissement est par ailleurs perturbé par la présence d'un nombre très inhabituel de contractuels, renouvelés tous les deux mois, ce qui est incompatible avec un fonctionnement normal. Instruction a donc été donnée à la direction de l'établissement d'élaborer d'ici à la fin de l'année un plan d'intégration de ces contractuels, dont les effets sont attendus dès le début de l'année 2008. Il a également été demandé à la direction de l'établissement de faire le nécessaire pour rétablir la capacité du service de médecine, en ajustant les effectifs du service à un niveau raisonnable.
Pour le reste, Mme Bachelot-Narquin vous fera part des conclusions du rapport du conseiller général des établissements de santé et ne manquera pas de prendre position. A la lumière de ces éléments, elle donnera les instructions nécessaires au directeur de l'agence régionale de l'hospitalisation d'Auvergne pour fixer une ligne directrice claire pour les évolutions de l'établissement. Je vous remercie.
M. le président. La parole est à M. Jean-Paul Bacquet.
M. Jean-Paul Bacquet. Monsieur le secrétaire d'État, j'ai écouté avec beaucoup d'attention la réponse de Mme la ministre de la santé. Si certains doutes subsistent, il y a dans cette réponse quelques éléments favorables. En effet, un constat a été établi pour la première fois - si un grand nombre de rapports a vu le jour, ils n'ont jamais été suivis d'effets. L'analyse de la situation financière, la critique de la gestion - calamiteuse - du directeur des ressources humaines et son incompétence n'ont jamais donné lieu à sanction. La seule réaction a été de licencier du personnel, qui avait pourtant été embauché pour assurer la qualité des soins !
Le constat est donc clair : le climat social est détérioré par la présence d'un grand nombre de contractuels. Mme la ministre a donc décidé de mettre en place, d'ici à la fin de l'année, un plan d'intégration de ces personnels. C'est une bonne nouvelle ! En effet, on ne peut continuer à renouveler ces contrats tous les deux mois, encore moins à licencier du personnel, comme cela s'est produit régulièrement. C'est une bonne nouvelle, je le répète, et j'en remercie Mme la ministre.
M. André Chassaigne. L'intégration se fera avec quel financement ?
M. Jean-Paul Bacquet. Le manque d'effectifs dans le service de médecine est un problème réel, qu'il faut absolument résoudre pour assurer la qualité des soins.
M. le président. Monsieur Bacquet, il faut conclure !
M. Jean-Paul Bacquet. Monsieur le président, vous êtes médecin comme moi, vous connaissez l'importance des hôpitaux ruraux !
M. le président. Bien entendu, mais les questions de vos collègues sont tout aussi importantes !
M. André Chassaigne. C'est particulièrement important, monsieur le président !
M. Jean-Paul Bacquet. Vous n'avez pas répondu, monsieur le secrétaire d'État, à ma question sur l'avenir de la chirurgie. Nous avons trouvé des solutions pour la médecine, je m'en félicite, mais aucune réponse n'a été apportée pour la chirurgie, pas plus que sur le pôle public-privé, alors que ce dernier bénéficie des moyens nécessaires. Je serais très heureux qu'il soit répondu un jour prochain à mes questions.
Enfin, il faut que Mme la ministre donne des instructions fermes à l'ARH ! Il faut éviter que différents intervenants, notamment les conseillers généraux, se succèdent et fassent n'importe quoi. J'ai ici un article de presse qui montre de quelle façon le directeur de l'ARH traite les élus, y compris le maire, président du conseil d'administration - il parle de " personnages ". Le maire, qui n'est pas l'un de mes amis politiques, a essayé de prendre ses responsabilités, mais il a été traité avec désinvolture par quelqu'un qui, lui, ne les a jamais assumées, notamment sur la question du pôle de santé Issoire-Brioude - on a fait à Brioude ce qu'on aurait dû faire à Issoire. J'attends, je le répète, une réponse - si possible rapidement - sur la chirurgie. Par ailleurs, il faut donner des instructions fermes et des moyens financiers à l'ARH. Bref, nous faisons beaucoup plus confiance à Mme la ministre de la santé qu'au directeur de l'ARH !
M. le président. Mes chers collègues, il reste vingt et une questions à poser. Je demande donc à chacun de respecter son temps de parole.

Données clés

Auteur : M. Jean-Paul Bacquet

Type de question : Question orale

Rubrique : Établissements de santé

Ministère interrogé : Santé, jeunesse et sports

Ministère répondant : Santé, jeunesse et sports

Date : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue au Journal officiel du 18 décembre 2007

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