Question orale n° 583 :
bureaux de poste

13e Législature

Question de : M. Jean-Claude Perez
Aude (1re circonscription) - Socialiste, radical, citoyen et divers gauche

M. Jean-Claude Perez attire l'attention de Mme la ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi sur ses vives préoccupations, ainsi que celles des élus locaux du département de l'Aude, dans l'optique du changement de statut de La Poste. La Poste doit en effet continuer d'offrir un service public de qualité, également accessible à tous les citoyens, quels que soient leur lieu de résidence et leur niveau de ressources. Or, pour demain, le Gouvernement nous explique, la main sur le coeur, qu'il n'est plus raisonnable que le facteur fasse autant de kilomètres, autant de jours par semaine et d'en conclure que le timbre doit être payé en fonction de l'éloignement du destinataire. Il est nécessaire de refuser cette logique qui va faire des habitants des départements ruraux et déjà économiquement défavorisés, comme l'Aude par exemple, des citoyens de seconde zone. D'ores et déjà, des initiatives visent à réduire les heures d'ouverture de nombreux bureaux de poste, soit à transformer ces derniers en agences postales communales. Ainsi, l'Aude compte déjà 96 agences de ce type et il faut stopper de façon urgente le désengagement de La Poste en milieu rural car on ne peut accepter qu'un service postal à deux vitesses se mette en place dans notre pays. Lors du vote de la loi n° 2005-516 du 20 mai 2005 relative à la régulation postale, les députés de la gauche parlementaire ont défendu une vision positive et ambitieuse de La Poste dans laquelle le service public est considéré comme une chance et non comme une contrainte. Malheureusement, d'autres choix ont été faits. Le Gouvernement n'a retenu aucune des propositions de l'opposition. Il a, au contraire, organisé une couverture du territoire minimale qui officialise l'exclusion de 10 % de la population des services postaux de proximité. Parallèlement, le Gouvernement a refusé à la fois d'imposer des contraintes de desserte du territoire aux éventuels concurrents de La Poste et de mettre en place un fond de compensation des charges de service public assumées par la seule Poste. La logique financière ne doit pas l'emporter sur la cohésion sociale et l'aménagement du territoire. La présence postale et le prix unique du timbre ne doivent pas être sacrifiés pour la rémunération des futurs actionnaires de La Poste. Il convient ainsi d'obtenir le maintien de la distribution du courrier en tout point du territoire six jours sur sept (la directive permettant de descendre à cinq), et la distribution du courrier jusqu'au domicile des particuliers. Il remarque, à ce propos, qu'aucune directive européenne n'impose ce type de schéma et qu'il s'agit bien là d'un choix politique national. En conséquence, il lui demande de bien vouloir lui indiquer si, comme cela semble hautement souhaitable, elle entend revenir sur ses projets concernant La Poste en mettant en place un moratoire sur les réductions d'horaires et les fermetures de bureaux de Poste.

Réponse en séance, et publiée le 25 mars 2009

RESPECT DE LA MISSION DE SERVICE PUBLIC DE LA POSTE

M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Perez, pour exposer sa question, n° 583, relative au respect de la mission de service public de la poste.
M. Jean-Claude Perez. Monsieur le secrétaire d'État à l'intérieur et aux collectivités territoriales, je veux vous faire part de ma vive inquiétude et de celle des élus locaux du département de l'Aude au sujet du changement de statut de La Poste et du comportement de la direction de l'entreprise.
La Poste doit continuer d'offrir un service public de qualité accessible à tous les citoyens, quels que soient leur lieu de résidence et leur niveau de ressources. Il est donc nécessaire de refuser une logique qui va faire des habitants des départements ruraux, déjà économiquement défavorisés, comme dans l'Aude, des citoyens de seconde zone.
Depuis 2008, les représentants de La Poste Aude-Roussillon sillonnent le département à la rencontre des maires et leur proposent soit des réductions horaires, soit la création par leur commune d'une agence postale communale. Je précise que l'Aude compte déjà quatre-vingt-seize agences de ce type : or on sait qu'elles offrent bien moins de services qu'un véritable bureau de poste, à tous les niveaux, et plus encore pour ce qui a trait aux services financiers.
M. Jean Mallot. C'est indéniable !
M. Jean-Claude Perez. Par ce moyen, on fait pression sur les maires en les plaçant dans une situation complexe, puisqu'on les rend responsables du maintien ou de la disparition d'une présence postale. C'est oublier que ces maires, qui font preuve d'une abnégation remarquable, ont déjà suffisamment de responsabilités et que leurs communes n'ont déjà que trop de charges. À ce propos, le mépris avec lequel la direction départementale de La Poste traite les maires est inacceptable. Il ne faudrait pas qu'elle oublie que ces derniers ont pour eux la légitimité du suffrage universel.
Il faut, d'urgence, arrêter le désengagement de La Poste en milieu rural, car on ne peut accepter qu'un service postal à deux vitesses se mette en place dans notre pays. Hélas, ce sont d'autres choix qui ont été faits, puisque la majorité a elle-même organisé une couverture du territoire minimale qui officialise le fait que 10 % de la population est privée des services postaux de proximité.
Lors de la discussion de la loi du 20 mai 2005 relative à la régulation postale, on nous a expliqué, la main sur le coeur, qu'il n'était plus raisonnable que le facteur parcoure autant de kilomètres, autant de jours par semaine, et l'on en a conclu que le prix du timbre devait varier en fonction de l'éloignement du destinataire. Je remarque à ce propos qu'aucune directive européenne n'impose ce type de schéma et qu'il s'agit bien là d'un choix politique national.
Parallèlement, votre gouvernement a refusé d'imposer des contraintes de desserte du territoire aux éventuels concurrents de La Poste et de mettre en place un fonds de compensation des charges de service public assumées par la seule Poste.
La logique financière ne doit pas l'emporter sur la cohésion sociale et l'aménagement du territoire. La présence postale et le prix unique du timbre ne doivent pas être sacrifiés pour la rémunération des futurs actionnaires de La Poste et il convient d'obtenir le maintien de la distribution du courrier jusqu'au domicile des particuliers en tout point du territoire, six jours sur sept.
En conséquence, je vous demande de bien vouloir m'indiquer si vous entendez faire pression sur les dirigeants de La Poste pour qu'ils reviennent sur leurs projets concernant l'entreprise, pour qu'ils renoncent purement et simplement aux réductions d'horaires et aux fermetures de bureaux de poste dans les départements ruraux, et défendre ainsi une vision positive et ambitieuse de La Poste dans laquelle le service public est considéré comme une chance, non comme une contrainte.
M. le président. La parole est à M. Alain Marleix, secrétaire d'État à l'intérieur et aux collectivités territoriales.
M. Alain Marleix, secrétaire d'État à l'intérieur et aux collectivités territoriales. Monsieur le député Jean-Claude Perez, La Poste doit faire face, sur son marché, à deux défis historiques : la concurrence des médias électroniques qui affectent les volumes de courrier - moins 3,5 % en tendance 2008 ; l'ouverture totale des marchés postaux prévue le 1er janvier 2011.
La question est simple : le groupe pourra-t-il à la fois être performant sur le marché concurrentiel et maintenir ses missions de service public, qui sont réputées pour leur qualité et auxquelles nous sommes tous très attachés ? À question simple, réponse simple : La Poste pourra le faire à condition de s'en donner les moyens, à condition qu'on lui en donne les moyens.
La Commission de réflexion sur l'avenir de La Poste a remis son rapport au Gouvernement à la mi-décembre 2008. Le 19 décembre, M. Luc Chatel, secrétaire d'État chargé de l'industrie et de la consommation - que je remplace ce matin -, a reçu le président de La Poste, les organisations syndicales de La Poste, les représentants des maires et des maires ruraux de France, ainsi que les parlementaires qui ont participé aux travaux de la Commission. Le Président de la République a pris la décision de modifier la forme juridique de La Poste pour en faire une société anonyme à capitaux 100 % publics et lui permettre d'assurer son développement grâce à une augmentation de capital de 2,7 milliards d'euros souscrite par l'État à hauteur de 1,2 milliard d'euros et par la Caisse des dépôts et consignations à hauteur de 1,5 milliard d'euros. Le Gouvernement a affirmé avec force le principe du maintien intégral des missions de service public, à savoir le tarif unique du timbre, la mission de service universel, la distribution des envois postaux tous les jours ouvrables, la mission d'aménagement du territoire, l'accessibilité bancaire ainsi que la distribution de la presse. Les droits et statuts des postiers seront, quant à eux, intégralement préservés, ce qui est essentiel.
Dans le département de l'Aude, monsieur le député, avec un total de 229 points de contact, 97,3 % de la population est située à moins de cinq kilomètres des plus proches points de contact de La Poste. On y compte un point de contact pour 1 354 habitants, alors que la moyenne nationale est de un point de contact pour 3 551 habitants. Le contrat de service public pour les années 2008 à 2012, signé entre l'État et La Poste le 22 juillet 2008, veille à garantir que le réseau des points de contact qui participe à l'évolution des territoires évolue dans le dialogue et la concertation avec les collectivités territoriales.
La Poste répond ainsi aux exigences du service public en adaptant ses points de contact à l'évolution des modes de vie des clients, y compris sous des formes diversifiées, sur la base de conventions de partenariat avec les collectivités locales sous la forme d'agence postale communale - APC -, ou en partenariat avec les commerçants sous la forme de relais poste commerçants - les RPC qui marchent fort bien.
Le projet de loi transposant la directive européenne d'ouverture à la concurrence du marché postal et portant changement de statut de La Poste devrait être voté avant l'été 2009. Ce changement de statut est nécessaire pour apporter à La Poste les moyens financiers de son ambition : elle pourra dès lors saisir les opportunités stratégiques qui se présenteront.
Monsieur le député, en tant que secrétaire d'État à l'intérieur et aux collectivités territoriales, je puis ajouter que, si vous constatez des défaillances dans tel ou tel département, ou si La Poste ne respecte pas ses engagements, je suis tout à fait disposé à vous entendre et à vous aider à traiter ces dossiers.
M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Perez, pour une courte réponse.
M. Jean-Claude Perez. Je remercie M. le secrétaire d'État. Avant l'ouverture totale à la concurrence ou, en tout cas, avant le changement de statut, permettez-moi de demander, au nom de tous les élus de l'Aude, un moratoire qui permettra d'y voir plus clair. Aujourd'hui, on profite de ce que certains maires, qui ont été élus pour la première fois aux dernières élections, n'ont pas eu le temps de maîtriser leurs nouvelles fonctions, pour leur faire transformer le bureau de poste en agence communale.

Données clés

Auteur : M. Jean-Claude Perez

Type de question : Question orale

Rubrique : Postes

Ministère interrogé : Économie, industrie et emploi

Ministère répondant : Économie, industrie et emploi

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 17 mars 2009

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