Question orale n° 587 :
médecins

13e Législature

Question de : Mme Colette Langlade
Dordogne (3e circonscription) - Socialiste, radical, citoyen et divers gauche

Mme Colette Langlade attire l'attention de Mme la ministre de la santé et des sports sur les conditions d'accès aux soins en milieu rural. La mise en oeuvre de sa circulaire du 8 février 2008 concernant la réduction du nombre de secteurs de garde est prévue en Dordogne au 1er avril 2009. Pour le nord du département, déjà dépourvu d'antenne d'urgence à moins de 20 minutes, la qualité d'accès aux soins des habitants va fortement se dégrader avec un médecin de garde pour 30 000 habitants. Aussi, elle lui demande de maintenir le nombre de secteurs actuel.

Réponse en séance, et publiée le 25 mars 2009

ACCÈS AUX SOINS EN MILIEU RURAL

M. le président. La parole est à Mme Colette Langlade, pour exposer sa question, n° 587, relative à l'accès aux soins en milieu rural.
Mme Colette Langlade. Madame la ministre de la santé et des sports, je souhaite, une nouvelle fois, appeler votre attention sur l'organisation de la permanence des soins en milieu rural. Le sujet est inquiétant ; il appelle une prise de conscience forte des pouvoirs publics.
Votre circulaire du 8 février 2008 prévoit de réduire le nombre de secteurs de garde de 2 500 à 2 000 en France et de 46 à 18 en Dordogne, soit une diminution de 60 %. Je précise que les syndicats de médecins ont approuvé l'avenant 27 à la convention médicale sur la permanence des soins.
Sur le terrain, un nombre important de médecins généralistes et les habitants du département de la Dordogne se battent pour défendre un accès à des soins de qualité égal pour tous. Ils ont bien conscience que la mise en application de cette mesure de réduction du nombre de secteurs de garde pénalise fortement les patients et creuse les inégalités sur notre territoire. Dans le nord de la Dordogne, les habitants souffrent déjà de ces inégalités puisqu'ils se trouvent à plus de vingt minutes d'un service d'urgence. Ce sont les médecins de garde qui arrivent les premiers sur place et qui assurent le relais en attendant les urgences, quand celles-ci peuvent intervenir !
Vous demandez désormais à ces médecins de ne plus se déplacer chez les patients et de les recevoir dans un cabinet de garde. En nuit profonde, au-delà de minuit, pouvons-nous imaginer sérieusement que des personnes seules, des personnes âgées difficilement mobiles - et elles sont nombreuses en Dordogne où la population vieillit - vivant dans des villages isolés pourront faire le trajet ? Les réalités humaines, les réalités territoriales ne sont pas toujours compatibles, madame la ministre, avec des projections purement comptables et abstraites.
Certes, en cas d'extrême urgence, les médecins pourront exceptionnellement se rendre à domicile, après régulation du SAMU. Néanmoins, là encore, un autre obstacle s'opposera à une prompte intervention : avec l'agrandissement des secteurs, ils pourront avoir à parcourir jusqu'à cinquante kilomètres avant d'arriver au domicile du patient, distance bien trop importante sur des routes sinueuses peu rapides.
Madame la ministre, je me demande quels sont les bénéficiaires de cette mesure : certainement pas les patients, qui seront les premiers touchés par des délais d'intervention plus longs et qui courront des risques plus importants, mais certainement pas les médecins non plus. En effet, leurs gardes seront plus difficiles et plus pénibles.
Nous ne pouvons accepter de mettre en danger la vie de nos concitoyens dans le seul souci d'économies budgétaires. Avec plusieurs collègues parlementaires du département, j'ai alerté Mme la préfète de la Dordogne sur ce sujet.
Je vous demande, madame la ministre, de prendre en compte les spécificités de chaque département et particulièrement du monde rural. Je vous demande d'y maintenir le nombre actuel de secteurs de garde.
M. le président. La parole est à Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé et des sports.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé et des sports. Madame Langlade, je ne peux pas vous laisser dire que je suis, sur la question de la permanence des soins, animée par un souci comptable. Notre système de permanence des soins est certainement l'un des plus coûteux qui puisse s'imaginer. D'ailleurs, plusieurs rapports, excellents, ont prouvé que ce qui importait, c'était l'efficacité de notre système. À ce titre, l'exemple que vous prenez pour m'interroger sur les conditions de l'accès en milieu rural, et plus particulièrement en Dordogne, est particulièrement intéressant et édifiant.
Comme dans tous les départements français, le paiement des forfaits d'astreintes et de régulation ainsi que les majorations des actes pour les samedis après-midi et les ponts y sont proposés pour aller vers une amélioration de l'organisation de la permanence des soins, fondée notamment sur une diminution du nombre de secteurs.
Cela étant, je ne peux pas faire surgir les médecins de terre, madame Langlade ! Notre pays va prochainement être confronté à une baisse du nombre de médecins généralistes installés. Il est donc nécessaire d'améliorer, dès maintenant, l'organisation de la permanence des soins en la rendant plus compatible avec l'exercice exigeant de la médecine générale.
Face à cette situation, en concertation avec les professionnels de santé et les élus locaux, nous avons donc incité les comités départementaux de l'aide médicale d'urgence et de la permanence des soins, les CODAMUPS que vous connaissez bien, à limiter le nombre de secteurs de permanence sur l'ensemble du territoire.
Le projet de loi portant réforme de l'hôpital et relatif aux patients, à la santé et aux territoires, que votre assemblée a voté le 18 mars, contient par ailleurs de nombreuses autres mesures visant à revaloriser l'exercice de la médecine générale et à améliorer l'accès aux soins de nos concitoyens sur l'ensemble du territoire. Je pense au développement des maisons et des pôles de santé, à la création de bourses garantissant la présence de médecins dans les zones les plus en difficulté, à la généralisation des coopérations entre professionnels de santé ou encore au développement rapide de la filière universitaire de médecine générale.
J'ai proposé aux départements, dès le début de 2008, de réduire le nombre de secteurs, actuellement de 2 300. Vous avez évoqué l'avenant 27. Savez-vous que les engagements étaient de réduire le nombre des secteurs à 1 500 ? J'ai estimé que ce n'était pas raisonnable, mais je souhaite que l'on parvienne au nombre de 2 000 au niveau national.
Bien entendu, cette opération ne doit pas se faire à la serpe. La situation de la Seine-Saint-Denis n'est pas celle de la Dordogne et ou de mon Maine-et-Loire. J'ai souhaité accompagner les acteurs locaux dans cet exercice difficile. J'ai ainsi constitué une mission nationale d'appui. La Dordogne a naturellement été entendue et la mission d'appui a formulé un avis, afin d'optimiser le dispositif de la permanence des soins.
En Dordogne, 12 % des généralistes ont soixante ans et plus, 408 généralistes participent à la permanence des soins sur les 426 en activité, ce qui est très satisfaisant ; il existe des secteurs où les médecins sont beaucoup moins allants. Ce constat rend indispensable la diminution du nombre de secteurs de garde dans le département si l'on veut éviter que les médecins ne soient de garde trop souvent.
Il est donc nécessaire que le département mette en oeuvre rapidement les projets de maisons médicales de garde et de maisons pluridisciplinaires. C'est avec la coopération des professionnels de santé et la coordination des soins que nous parviendrons à garantir la permanence des soins sur l'ensemble du département.
Je précise enfin que l'accès aux soins d'urgence en Dordogne est assuré par trois sites d'urgence et trois SMUR : Bergerac, Sarlat et Périgueux. Sur une semaine, le SMUR de Périgueux intervient, en moyenne, onze fois de nuit, dont six fois en nuit profonde.
L'organisation de la permanence des soins fait actuellement l'objet d'une riche concertation. Je ne doute pas qu'elle aboutira rapidement dans ce département. Nous améliorerons la situation en accord avec les médecins, et répondrons pleinement aux besoins et attentes des patients.
Je veux vous certifier, madame Langlade, que, dans cette affaire, je suis mue non pas par une volonté comptable mais par le souci d'assurer un service médical de qualité avec la ressource médicale actuellement à notre disposition en Dordogne.

Données clés

Auteur : Mme Colette Langlade

Type de question : Question orale

Rubrique : Professions de santé

Ministère interrogé : Santé et sports

Ministère répondant : Santé et sports

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 17 mars 2009

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