politique culturelle
Question de :
M. Pierre-Alain Muet
Rhône (2e circonscription) - Socialiste, radical, citoyen et divers gauche
M. Pierre-Alain Muet attire l'attention de Mme la ministre de la culture et de la communication sur la préoccupation des institutions culturelles lyonnaises, et plus, généralement de l'ensemble des structures culturelles régionales concernant le retrait historique de l'État dans le financement de la culture. L'impact du désengagement de l'État pour l'année 2008 affecte toutes les grandes structures. En particulier l'Opéra national de Lyon, dont la programmation de la période 2006-2010, validée par les collectivités territoriales, n'a pas reçu le soutien du représentant de l'État lors du vote de ce budget en novembre 2007. De même, l'État envisage la suppression du financement des postes de conservateurs de bibliothèques, ce qui représenterait une charge supplémentaire pour la ville de plus de 1 million d'euros. En outre, l'État aura un retard de paiement sur ses contributions aux investissements de la ville de Lyon (convention patrimoine signée pour 2003-2007) d'un montant de plus de 3 millions d'euros au 31 décembre 2007. Le versement de ces aides peut-il être confirmé ? Par ailleurs, M. Donnedieu de Vabres, le précédent ministre de la culture, s'était engagé à apporter au théâtre de la Croix-Rousse un label de scène nationale. Une convention avec l'assentiment de tous les partenaires du théâtre est actuellement soumise au ministère. Il lui demande quand sera entérinée cette décision attendue depuis plus d'un an. En somme, il lui demande par quelles mesures concrètes elle entend replacer la culture parmi les priorités gouvernementales.
Réponse en séance, et publiée le 9 janvier 2008
FINANCEMENT DE LA POLITIQUE CULTURELLE À LYON
M. le président. La parole est à M. Pierre-Alain Muet, pour exposer sa question, n° 85, relative au financement de la politique culturelle à Lyon.M. Pierre-Alain Muet. Les institutions culturelles lyonnaises et l'ensemble des structures culturelles sont très préoccupées par le retrait de l'État dans le financement de la culture.
L'impact du désengagement de l'État affecte toutes les grandes structures, comme l'Opéra national de Lyon - j'y viendrai -, mais aussi les bibliothèques, la conservation du patrimoine ou encore les festivals comme la Biennale de la danse. J'ai à ce sujet quatre questions à vous poser, monsieur le haut-commissaire.
S'agissant de l'Opéra, lors du bureau de l'association qui s'est tenu le 23 novembre, le représentant de l'État s'était abstenu de voter le budget pour 2008, invoquant l'insuffisance des moyens financiers dont il disposait. Au début du mois de décembre, les services de la DRAC laissaient entendre qu'il y aurait une forte réduction de la subvention de l'État - on parlait de 6 % de réduction dont 2 % de gel -, alors même que tous les autres partenaires financiers de l'Opéra - ville de Lyon, région, conseil général - avaient confirmé leur engagement d'indexer leurs subventions sur le taux de l'inflation.
Depuis que j'ai déposé ma question le 18 décembre, il me semble que les choses se sont en partie améliorées pour l'opéra, puisque, lors de l'assemblée générale du 23 décembre, le directeur de la DRAC a voté le budget en indiquant qu'il pourrait assurer un financement au moins égal au niveau de la subvention de l'année 2007. Mais si tel était le cas, la non indexation de la subvention représenterait une perte de 111 600 euros. Or, monsieur le haut-commissaire, vous savez bien que pour une institution culturelle, dont la programmation est établie longtemps à l'avance, la sécurité de cette dernière et de son financement reposent sur le respect des différents engagements des partenaires. Ces engagements, les collectivités locales les respectent, et pas l'État. Il devrait pourtant le faire, qu'il s'agisse de l'Opéra ou des domaines que je souhaite à présent évoquer.
Ma deuxième question concerne les inquiétudes que nous avons quant à l'éventuelle suppression du financement des postes de conservateur de bibliothèque par l'État, ce qui représenterait une charge supplémentaire pour la ville de Lyon de plus d'un million d'euros. J'espère, monsieur le haut-commissaire, que vous pourrez nous rassurer sur ce point.
Ma troisième question a trait aux retards de paiement dans les contributions aux investissements de la ville de Lyon, notamment ceux réalisés dans le cadre de la convention " patrimoine " signée pour la période 2003-2008. L'État ne respecte malheureusement pas ses engagements et laisse les collectivités locales financer seules des opérations - et je sais que cela se produit hélas dans bien d'autres domaines que la culture -, alors même qu'il a signé des conventions. L'ensemble des retards de paiements dans le domaine du patrimoine représente ainsi un montant de plus 3 millions d'euros au 31 décembre 2007, dont 2,3 millions pour la convention " patrimoine " signée en 2003. Pouvez vous, monsieur le haut-commissaire, me confirmer que les subventions de l'État inscrites dans ces différentes conventions seront bien versées, et surtout quand ?
Ma dernière question concerne le théâtre de la Croix-Rousse. Le prédécesseur de Mme Albanel, M. Donnedieu de Vabres, s'était engagé à apporter à ce théâtre un label de scène nationale d'ici à la fin de l'année 2007. À cet effet, une convention de scène nationale a été rédigée avec l'accord de tous les partenaires du théâtre - ville de Lyon, conseil général, région et DRAC. Nous attendons, monsieur le haut-commissaire, que vous nous confirmiez cette décision, évidemment très importante pour un théâtre qui connaît un grand succès.
J'espère, monsieur le haut-commissaire, que vous m'apporterez des réponses positives sur tous ces points.
M. le président. La parole est à M. le haut-commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté.
M. Martin Hirsch, haut-commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté. N'allez pas croire, monsieur le député, que le fait de répondre par deux fois à des questions relatives à la culture fait de moi un spécialiste, ni même, en dépit des doutes que vous pourriez avoir, que les crédits alloués à celle-ci soient prélevés au profit du revenu de solidarité active ! N'ayez aucune crainte à ce sujet ! (Sourires.)
Par votre question, vous vous êtes fait, après M. Jardé, l'écho de préoccupations exprimées par certains professionnels, alarmés par les remous faits autour du budget de la culture pour 2008. L'application d'une réserve de précaution a suscité de nombreuses inquiétudes, tant de la part des élus que des structures culturelles. Dans le contexte budgétaire que l'on a rappelé tout à l'heure, Mme la ministre de la culture a obtenu du Président de la République et du Premier ministre une mesure permettant de desserrer la contrainte à hauteur de près de 35 millions d'euros, qui seront disponibles sur les crédits du programme " Création " pour 2008.
L'engagement de l'État auprès des institutions du spectacle vivant dans la région Rhône-Alpes, comme dans les autres régions, se fera donc dans des conditions comparables à celles de 2007.
Pour ce qui est de la situation lyonnaise, il convient de rappeler un certain nombre d'éléments quant à l'importance du soutien dont bénéficient la ville de Lyon et son territoire de la part de l'État. En 2007, 24 millions d'euros de crédits ont été engagés par le ministère à Lyon, ce qui représente 32 % des dépenses culturelles de l'État en Rhône-Alpes.
Un grand nombre d'institutions et de manifestations, comme l'Opéra national de Lyon, l'Orchestre national de Lyon, le théâtre Nouvelle Génération, la Maison de la danse, l'Institut Lumière, l'École nationale d'arts plastiques, la Biennale de la danse, la Biennale d'art contemporain, le Grame - centre national de création musicale -, le théâtre du Point du jour ou le théâtre Les Ateliers, sont fortement soutenus chaque année. Une convention pour le patrimoine historique a été signée entre la ville et l'État en 2003 et a permis de restaurer plusieurs monuments majeurs, comme l'hôtel de ville ou l'église de Saint-Martin d'Ainay.
Enfin, le ministère soutient l'effort des institutions culturelles lyonnaises pour développer l'accès à la culture de tous les publics, et il accompagne un grand nombre d'initiatives en milieu carcéral, à l'hôpital, en faveur des handicapés et dans le cadre de la politique de la ville.
Il est cependant exact, comme vous l'avez indiqué, que l'insuffisance de crédits de paiement dont souffre le ministère au plan national a conduit à un retard dans les versements au profit de la ville de Lyon, au titre de la convention pour le patrimoine historique, de la rénovation du musée Gadagne et de l'installation aux Subsistances de l'École nationale d'arts plastiques. Mme Albanel a demandé que tout soit mis en oeuvre pour rattraper ce retard, et sait que la DRAC s'y emploie, comme en témoignent les versements de crédits qui ont pu être effectués en fin de gestion 2007.
Pour ce qui concerne le financement des emplois de conservateur de bibliothèque actuellement assuré par l'État au bénéfice des communes, il s'agit d'une question nationale faisant actuellement l'objet d'une évaluation conduite par les inspections compétentes. Vous comprendrez donc que la ministre ne puisse, à ce stade, vous en dire beaucoup plus - et par conséquent moi non plus.
Enfin, s'agissant du théâtre de la Croix-Rousse, l'État a fait passer sa subvention de 370 000 euros à 470 000 euros en 2007, augmentation considérable et unique dans la région Rhône-Alpes. Le ministère continuera à apporter son soutien à cette structure dans le cadre d'une convention en cours de négociation, laquelle comprend une obligation, pour le théâtre de la Croix-Rousse, de résorber son déficit. L'attribution d'un label reste à l'étude, mais, comme en Picardie, il a été décidé de suspendre, pour l'année 2008, l'attribution de tout nouveau label, dans l'attente d'une réflexion que Mme la ministre souhaite mener avec l'ensemble des partenaires, élus et professionnels, sur la politique du spectacle vivant, afin que les labels " collent " bien à la réalité du réseau.
M. le président. La parole est à M. Pierre-Alain Muet.
M. Pierre-Alain Muet. Le début de l'intervention de M. le haut-commissaire ne me rassurait pas : énumérer ce que l'on a fait pendant longtemps est souvent une façon de ne pas répondre précisément aux questions.
J'espère que l'État tiendra ses engagements, au moins en ce qui concerne les retards de paiement. En matière de financement par les différentes collectivités publiques, on constate en effet que l'État est le seul à se permettre des retards considérables de paiement : cela est vrai dans tous les domaines, et pas seulement dans la culture. J'ai souvent indiqué dans cet hémicycle que j'étais partisan d'une gestion saine des finances publiques, mais la contrepartie est que l'État respecte ses engagements.
S'agissant plus spécifiquement de la culture, j'avais cru comprendre lors de la campagne présidentielle qu'elle était une priorité : j'observe, par les financements et les engagements, qu'elle ne l'est pas. L'inquiétude des différents acteurs de la culture me semble donc, hélas, bel et bien fondée.
Auteur : M. Pierre-Alain Muet
Type de question : Question orale
Rubrique : Culture
Ministère interrogé : Culture et communication
Ministère répondant : Culture et communication
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 8 janvier 2008