télévision numérique terrestre
Question de :
M. Kléber Mesquida
Hérault (5e circonscription) - Socialiste, radical, citoyen et divers gauche
M. Kléber Mesquida attire l'attention de Mme la secrétaire d'État chargée de la prospective et du développement de l'économie numérique sur le passage de la télévision analogique à la télévision numérique terrestre (TNT). M. le Premier ministre, dans son discours devant le congrès des maires et des présidents de communauté de France, le 17 novembre 2009, a réaffirmé la volonté du Gouvernement d'atteindre l'objectif que tous les foyers soient desservis par la télévision numérique terrestre dans le cadre du plan " France numérique 2012 ". Pour autant, l'objectif d'un accès à tous au numérique ne saurait se prévaloir de garanties financières sérieuses envers les collectivités et les populations concernées. En effet, la loi sur la lutte contre la fracture numérique, dans son article 8, dispose que l'État versera une compensation financière aux collectivités territoriales qui mettront en oeuvre toute solution permettant d'assurer la réception des services de télévision diffusés par voie hertzienne terrestre en mode numérique dans les zones dans lesquelles la continuité de la réception des services de télévision en clair ne peut être assurée par voie hertzienne terrestre en mode numérique après l'extinction de leur diffusion par voie hertzienne terrestre en mode analogique. Le montant de cette compensation et ses modalités d'attribution seront fixés par décret. Cette compensation sera-t-elle intégrale ? Que couvrira-t-elle exactement ? Tous les équipements : les paraboles, les antennes relais ? Leur achat ? Leur installation ? Leur entretien ? Et dans quelles conditions exactes ces aides seront-elles octroyées ? Est-ce que la compensation sera intégrale pour les communes qui seront dans l'obligation d'édifier un équipement collectif ? Aussi, il lui demande à de bien vouloir lui préciser quels moyens financiers seront mis en oeuvre et à quelle hauteur pour les habitants des communes rurales et les collectivités territoriales afin qu'elles ne soient pas privées de ces avancées technologiques et puissent aussi en bénéficier.
Réponse en séance, et publiée le 27 janvier 2010
PRISE EN CHARGE DES ÉQUIPEMENTS DE LA TÉLÉVISION NUMÉRIQUE TERRESTRE
M. le président. La parole est à M. Kléber Mesquida, pour exposer sa question, n° 874, relative à la prise en charge des équipements de la télévision numérique terrestre.M. Kléber Mesquida. Je souhaite appeler l'attention de Mme la secrétaire d'État chargée de la prospective et du développement de l'économie numérique sur le passage de la télévision analogique à la télévision numérique terrestre.
Madame la secrétaire d'État, il semblerait que des problèmes subsistent pour certaines communes et leurs populations, avec le passage de la diffusion analogique en mode numérique, pour la réception des programmes de télévision. Cette mesure, dite de modernisation de la diffusion audiovisuelle, est porteuse, pour certaines zones, de plus de régression que d'innovation.
Je m'explique. Une couverture de 95 % de la population métropolitaine était initialement prévue. Or, sur les 3 500 émetteurs que compte notre pays, plus de 50 % ne seront pas numérisés. Pourtant, M. le Premier ministre, dans son discours devant le Congrès des maires, le 17 novembre dernier, a réaffirmé l'objectif que tous les foyers soient desservis par la télévision numérique terrestre dans le cadre du plan " France numérique 2012 ".
Cet objectif d'un accès à tous au numérique n'offre pas de garanties financières aux collectivités ni aux populations concernées.
En effet, d'une part, il est demandé aux collectivités d'investir dans des émetteurs complémentaires dont les frais d'installation et de fonctionnement peuvent être très élevés. Une telle dépense apparaît ubuesque et inenvisageable.
D'autre part, il est proposé aux personnes qui se trouvent dans une zone d'ombre d'avoir recours aux paraboles, au câble, à l'ADSL... Mais que feront celles et ceux qui n'ont pas les moyens financiers nécessaires pour accéder à ces technologies ? Ces modes de réception supposent en effet l'achat d'un ordinateur, la souscription d'un abonnement internet ou encore d'autres frais.
D'où mes questions : pour les ménages dont les revenus sont trop faibles pour pouvoir investir dans de telles technologies, quelles compensations seront proposées ? Couvriront-elles tous les équipements - les paraboles, les antennes-relais, l'achat, l'installation, l'entretien ? Dans quelles conditions exactes ces aides seront-elles octroyées ? Pour les communes obligées d'édifier un équipement collectif, les compensations seront-elles intégrales ?
Aussi, je vous demande, madame la secrétaire d'État, de bien vouloir me préciser quels moyens financiers seront mis en oeuvre pour que les habitants des communes rurales et les collectivités territoriales ne soient pas privés de ces avancées technologiques.
M. le président. La parole est à Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, secrétaire d'État.
Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, secrétaire d'État chargée de la prospective et du développement de l'économie numérique. Monsieur Mesquida, la télévision numérique terrestre, lancée en France il y a quatre ans, rencontre un très vif succès. Désormais, tous moyens confondus, plus de deux foyers sur trois reçoivent la TNT. Le Premier ministre, vous l'avez dit, a rappelé devant le congrès des maires de France que le Gouvernement est fortement engagé dans la généralisation de la télévision numérique terrestre pour que tous les Français y aient accès. C'est un projet d'envergure nationale mais aussi un projet de société. Le dispositif d'accompagnement doit donc être juste ; il doit être équitable en tenant compte des différences de situation, notamment au regard des déséquilibres territoriaux. D'importants moyens budgétaires y sont consacrés : nous avons prévu de mobiliser jusqu'à 333 millions d'euros.
L'accompagnement, c'est d'abord de l'information : il faut faire savoir aux Français que l'on va éteindre la télévision analogique. À cet effet, nous avons lancé un site internet, des campagnes nationales et locales, un centre d'appels.
Il s'agit aussi d'accompagner les publics défavorisés pour des motifs économiques ou les publics les plus éloignés du numérique, notamment les personnes âgées, avec une assistance financière et technique.
En outre, le dispositif d'accompagnement initialement prévu a été complété à l'occasion des débats que nous avons eus dans cet hémicycle et au Sénat. Il a ainsi été enrichi par deux nouvelles mesures.
Premièrement, le CSA a dorénavant la possibilité d'augmenter la puissance de certains émetteurs pour accroître la couverture de la TNT hertzienne, celle que l'on reçoit par l'antenne-rateau. Il y a donc moins de foyers que nous ne l'avions craint au départ qui devront s'équiper en paraboles.
La seconde mesure répond précisément à vos préoccupations : elle rend éligibles, sans conditions de ressources, tous les foyers à l'aide spécifique aux zones d'ombre de la télévision numérique terrestre hertzienne. Ceux qui recevaient la télévision analogique par l'antenne-rateau et qui ne peuvent recevoir la TNT par le même moyen seront éligibles à une aide de 250 euros qui couvrira l'achat et l'installation d'une parabole en entrée de gamme. Je rappelle que les chaînes de la TNT sont disponibles gratuitement - il y a par ailleurs des services sur abonnement. C'est donc l'ensemble des coûts qui sera financé pour les foyers concernés. Nous faisons en sorte que ceux-ci soient relativement peu nombreux, mais il y a des zones dans lesquelles il n'est pas rentable de conserver des émetteurs hertziens.
Pour donner plus de flexibilité en matière d'aménagement numérique du territoire, l'État s'engage à accompagner financièrement des collectivités qui souhaiteraient numériser des émetteurs que nous ne considérons pas rentables. Mais ce n'est pas une solution dont nous faisons la promotion. Je le répète : nous avons tout mis en oeuvre pour que tous les frais des foyers concernés soient pris en charge pour qu'ils puissent s'équiper en parabole. Une collectivité pourra néanmoins choisir de maintenir un émetteur secondaire en le numérisant, même dans un endroit où nous avions plutôt prévu des paraboles.
Quelles seront les conditions d'accompagnement financier de ces collectivités ? Le décret d'application est en cours d'élaboration. Il sera publié dans les semaines à venir. Il reposera sur deux principes. D'une part, un délai avant lequel la collectivité devra déclarer qu'elle souhaite numériser son émetteur au lieu de laisser ses habitants accéder à l'aide à la parabole - ce sera bien entendu l'un ou l'autre : soit on finance l'installation des paraboles, soit l'on aide à la numérisation d'un émetteur - ; a priori, un délai minimum de neuf mois semble préférable pour qu'il n'y ait pas d'interférences entre les deux modes de passage à la TNT. D'autre part, il y aura un montant minimum et un montant maximum de co-financement. L'essentiel du co-financement sera déterminé en fonction du nombre de foyers qu'il aurait été nécessaire de numériser par paraboles et qui le seront finalement par l'émetteur numérisé. L'État veillera particulièrement à ce que les dépenses des collectivités concernées soient des dépenses d'investissement.
Par ailleurs, les commissions départementales sur la TNT, créées à la suite des débats que nous avons eus dans cet hémicycle, pourront émettre des avis sur la pertinence des choix des collectivités locales et les accompagner dans l'option adoptée.
Enfin, une étude du Gouvernement sera prochainement publiée pour aider les collectivités à comparer les prix et à faire le meilleur choix.
M. le président. La parole est à M. Kléber Mesquida.
M. Kléber Mesquida. Madame la secrétaire d'État, vous me donnez l'assurance que les foyers seront indemnisés des dépenses induites par l'installation de paraboles, mais de grandes inquiétudes demeurent s'agissant du financement par les collectivités. Déjà, pour celles qui ont été obligées d'édifier des réémetteurs, les coûts de maintenance sont énormes. Demain, si, pour préserver financièrement leurs habitants, des collectivités prennent l'option d'investir sur des émetteurs, on n'est pas sûr de ce qui se passera. En effet, vous évoquez le co-financement, ce qui veut dire qu'une partie des frais ne sera pas prise en charge. Un co-financement nécessite un autofinancement de la collectivité et peut-être d'autres partenaires. Il me semble anormal que, dans le cadre de l'aménagement du territoire, l'État ne traite pas tous les territoires et tous les citoyens sur un pied d'égalité. Si cela continue, à la fracture territoriale - éloignement des services publics et d'un certain nombre de dispositifs des zones rurales - s'ajouteront une fracture numérique et une surimposition des contribuables locaux.
Les zones d'ombres ne doivent pas être si nombreuses en France au point de dissuader l'État de faire un effort financier évitant aux collectivités d'avoir elles-mêmes des charges consécutives à leur financement de la numérisation des émetteurs. Je souhaite que le Gouvernement se penche sur la question.
Auteur : M. Kléber Mesquida
Type de question : Question orale
Rubrique : Audiovisuel et communication
Ministère interrogé : Prospective et économie numérique
Ministère répondant : Prospective et économie numérique
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 19 janvier 2010