Question orale n° 925 :
SNCF

13e Législature

Question de : M. Jean-Jacques Candelier
Nord (16e circonscription) - Gauche démocrate et républicaine

M. Jean-Jacques Candelier alerte M. le ministre d'État, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat, sur la liquidation des triages SNCF et en particulier de celui de Somain. Assurer l'avenir de la planète exige une réduction de l'émission des gaz à effet de serre et une réduction de notre consommation des produits pétroliers. Le transport est l'une des activités les plus consommatrices en énergie pétrolière. Il représente 21,6 % des émissions de polluants atmosphérique en France, le secteur routier représentant à lui seul 96 % de ce chiffre. Il y a donc urgence de procéder à un rééquilibrage des modes de transport, ce qui passe par le maintien des activités de triage, notamment à Somain, et le développement des activités de fret ferroviaire. Au lieu de cela, on assiste à une casse des activités de trafic diffus (dites de « wagon isolé ») par la direction de Fret SNCF. De 2002 à 2009, les fermetures de gares et les restructurations successives ont transféré du rail vers la route 725 000 camions dans le Nord-Pas-de-Calais. Alors que 450 000 wagons étaient expédiés des triages de la région en 2002, seulement 160 000 l'étaient en 2009, de Somain (seul triage à subsister dans la région). Le Gouvernement avalise ce plan de casse au sein du conseil d'administration de cette entreprise publique en raison du manque de rentabilité financière du trafic diffus. Il développe une stratégie pour développer le fret uniquement rentable économiquement, ce qui est un non-sens écologique. De par sa situation géographique, le site de Somain doit avoir un rôle important dans le transport des marchandises, que ce soit pour des transports de desserte régionale ou pour des dessertes nationales. Sa situation lui confère un rôle important sur des transports de flux en direction de la Belgique, de l'Allemagne, des Pays-bas et de l'Angleterre. De plus les récents aménagements, les modernisations, financés conjointement par RFF et les collectivités, doivent servir non seulement à son maintien mais aussi à son développement. L'intersyndicale de la gare de triage et les élus ont fait plusieurs propositions que le Gouvernement et la direction de Fret-SNCF doivent absolument reprendre, concernant tant le site de Somain que la politique de report modal en général. Ils exigent : un moratoire sur le plan national de restructuration de la SNCF, qui abandonne le trafic diffus ; le financement direct et indirect du trafic diffus ; la mise en place d'une tarification des transports routiers intégrant la totalité des coûts environnementaux et d'usage d'infrastructure ; la baisse du coût des sillons et l'amélioration de leur qualité, avec la prise en charge par l'État de la dette de RFF ; la création rapide d'autoroutes ferroviaires, avec Somain tête de ligne de la liaison Lille-Irun ; l'implantation d'un système de rail-port sur la zone industrielle ; la mise en place de formations pour les agents du secteur matériel. Il attend des réponses très précises sur l'action du Gouvernement sur ces points.

Réponse en séance, et publiée le 24 février 2010

SITE FERROVIAIRE DE SOMAIN

M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Candelier, pour exposer sa question, n° 925, relative au site ferroviaire de Somain.
M. Jean-Jacques Candelier. Ma question s'adresse - s'adressait ! - à M. Jean-Louis Borloo, ministre de l'écologie.
Les choses s'accélèrent. C'est avec amertume et colère que nous avons appris la fermeture du triage par gravité de Somain d'ici à la fin de l'année. Ce tri par gravité, non rentable, va donc fermer si rien n'est fait, ce qui est la suite logique d'une douloureuse séquence où l'on voit les effectifs se réduire comme peau de chagrin. En juin, le passage en 1 x 8 est prévu, c'est-à-dire le travail de quatorze heures à vingt-deux heures, et soixante-six nouvelles suppressions de postes sont programmées.
Dans ce dossier, le ministre nous a bien menés en bateau, en refusant de nous recevoir à plusieurs reprises et de donner du crédit aux propositions élaborées par l'intersyndicale SNCF de Somain. Il y a quelques mois, devant les caméras, le Gouvernement claironnait dans cet hémicycle que : " aucune décision n'était prise concernant le site ". C'était un mensonge, car tout se trouve dans le schéma directeur de la SNCF élaboré l'année dernière.
Avec M. le maire de Somain, j'aurai, le 15 mars, un entretien avec la direction régionale de Fret SNCF. On voudra certainement nous faire supporter le service après-vente d'une politique nationale catastrophique, avec l'abandon des activités de trafic diffus, en pleine contradiction avec le Grenelle de l'environnement.
Ironie de l'histoire, quand on parle " rail " à la SNCF, celle-ci nous répond " route ". Ainsi, l'entretien que nous aurons en mars se fera en présence de M. le directeur général adjoint de GEODIS. Or GEODIS est la filiale de transport routier de la SNCF ! On ne peut pas plus clairement nous signifier que la logistique par camion est privilégiée.
À ce rendez-vous, assistera M. le délégué à l'aménagement des " Territoires ferroviaires Nord Picardie ", mais où est l'aménagement du territoire quand on supprime une gare d'activités dans une zone déjà sinistrée comme le Douaisis ? Où est l'aménagement du territoire quand seulement trois triages sur les onze du réseau national sont maintenus ? Vous appelez cela un plan d'adaptation alors qu'il s'agit bel et bien d'un vaste plan de liquidation !
Par ailleurs, le système de transbordement de marchandises entre camions et wagons isolés, le système rail-port, que nous proposions pour sauvegarder des emplois sur le site, n'a pas non plus les faveurs de la direction. Selon mes informations le projet serait mené par une entreprise privée.
Je ne compte plus les courriers que j'ai rédigés, avec M. le maire de Somain, pour alerter M. Borloo. Aujourd'hui, encore une fois, j'ai plusieurs demandes précises à formuler.
Comptez-vous réellement sur des opérateurs privés pour prendre en charge des activités non rentables économiquement, mais socialement profitables ? Qu'attendez-vous pour mettre votre veto aux restructurations en cours à Fret SNCF et pour investir massivement dans le trafic diffus ?
Enfin, on le sait, alors que 450 000 wagons étaient expédiés des triages de la région en 2002, seulement 160 000 l'étaient en 2009 de Somain, seul triage à subsister dans la région. Cela pose bien entendu la question de la viabilité économique du ferroviaire. Pour la garantir, pourquoi l'État, comme il le fait pour les transports routiers, ne prendrait-il pas en charge la dette de RPF, ce qui permettrait de baisser le coût des sillons et d'augmenter leur qualité ?
M. le président. La parole est à M. Benoist Apparu, secrétaire d'État chargé du logement et de l'urbanisme.
M.Benoist Apparu, secrétaire d'État chargé du logement et de l'urbanisme. Monsieur le député, l'engagement national pour le fret ferroviaire, présenté au conseil des ministres du 16 septembre 2009, illustre la mobilisation de l'État en faveur du transport ferroviaire de marchandises. Il traduit dans les faits l'ambition du Grenelle de l'environnement de porter la part des transports alternatifs de marchandises à la route de 14 % à 25 % à l'horizon 2022. Cet engagement national porte sur un investissement global en faveur du fret ferroviaire de 7 milliards d'euros d'ici à 2020, auxquels s'ajoutera un milliard d'euros investi par la SNCF.
Dans ce cadre, un véritable réseau d'autoroutes ferroviaires va être mis en place. Le nord de la France sera desservi par l'autoroute ferroviaire atlantique entre la région de Lille et Hendaye, et est également concerné par les études en cours pour une autre autoroute ferroviaire qui pourrait relier Londres à Turin. L'accent est mis également sur l'amélioration et sur le développement des dessertes ferroviaires portuaires.
Au-delà de sa propre action, le Gouvernement a demandé à la SNCF de s'engager résolument dans le développement du fret ferroviaire. Naturellement, nous serons particulièrement attentifs à ce que les actions proposées par la SNCF, tout en répondant aux objectifs d'amélioration économique et organisationnelle de Fret SNCF, permettent à cette entreprise publique de rester un acteur majeur de la politique de report modal.
En cohérence avec cet engagement national, la SNCF finalise actuellement son projet de schéma directeur pour un nouveau transport ferroviaire écologique de marchandises.
En ce qui concerne l'activité " wagons isolés ", ce schéma directeur s'appuiera sur une nouvelle organisation : d'une part, des services sur mesure pour les produits industriels lourds ou dangereux ; d'autre part, des trains composés de wagons " multi-lots multi-clients " acheminés entre deux plates-formes. Tout en prenant en compte des considérations d'ordre économique et social, ce réseau de plates-formes sera principalement défini en fonction des besoins exprimés par les chargeurs, clients actuels ou potentiels de Fret SNCF. Cette organisation sera mise en place de façon progressive sur une période de deux ans.
Les décisions de la SNCF concernant la localisation des plates-formes ne sont pas encore arrêtées. Le site de Somain dispose de nombreux atouts et apparaît bien placé pour s'inscrire dans ce réseau. Il possède une expérience historique dans le domaine du fret ferroviaire, un personnel compétent et des installations adaptées. Il est très bien localisé au sein de la région Nord-Pas-de-Calais pour offrir des liaisons ferroviaires groupées au départ et à l'arrivée de cette région. Enfin, il a bénéficié, en 2008 et 2009, d'investissements importants de l'ordre de 4 millions d'euros.
Ces évolutions du fret ferroviaire s'inscrivent dans un contexte de renchérissement du transport routier qui permettra de mieux prendre en compte les coûts d'infrastructure et des émissions de CO2. Ainsi, la mise en place de l'éco-redevance poids lourds est confirmée, le dialogue compétitif avec les candidats pour la mettre en oeuvre techniquement est engagé depuis septembre 2009. Par ailleurs, la contribution carbone sera bien appliquée au transport routier de marchandises, avec toutefois certaines modulations.
Concernant les péages d'infrastructures du fret ferroviaire, le Gouvernement a, conformément à son engagement, mis en place, dans la loi de finances pour 2010, un dispositif de compensation pour les entreprises ferroviaires des impacts de la réforme des péages, prévu à hauteur de 264 millions d'euros. Le Gouvernement a, en outre, décidé de limiter l'augmentation des barèmes de péages fret pour les années 2011 à 2015. Cette évolution très mesurée permet ainsi de donner au secteur du fret ferroviaire de très bonnes conditions de coûts de l'infrastructure et la visibilité dont il a besoin pour favoriser son développement.
(Le temps de parole qui lui était imparti étant épuisé, M. Candelier n'a pas été autorisé à reprendre la parole.)

Données clés

Auteur : M. Jean-Jacques Candelier

Type de question : Question orale

Rubrique : Transports ferroviaires

Ministère interrogé : Écologie, énergie, développement durable et mer

Ministère répondant : Écologie, énergie, développement durable et mer

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 16 février 2010

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