Question de : M. Hervé Féron
Meurthe-et-Moselle (2e circonscription) - Socialiste, écologiste et républicain

M. Hervé Féron attire l'attention de M. le ministre délégué auprès du ministre des affaires étrangères, chargé des affaires européennes, sur le programme européen d'aide aux plus démunis (PEAD). En effet, le PEAD, créé par Jacques Delors en 1987, est menacé. Cependant, à l'entrée de l'hiver, les Restaurants du cœur notamment, qui lancent actuellement leur 28e campagne et qui sont malheureusement plus que jamais nécessaires, en dépendent fortement. Ainsi, la question de la pérennisation de l'aide alimentaire européenne, qui se pose depuis plusieurs mois, doit demeurer prioritaire et ne peut rester sans réponse. Lors de la création du PEAD, il s'agissait d'utiliser les surplus de la politique agricole commune (PAC) pour distribuer des repas aux plus démunis. Cependant, la Cour européenne de justice, saisie d'une plainte de l'Allemagne en 2011, avait jugé le dispositif obsolète. Initialement, le programme était en effet financé par les excédents agricoles. Mais devant leur fonte progressive, l'UE avait entrepris de financer, sur le budget de la PAC, l'achat de denrées alimentaires pour les plus démunis. Un dévoiement du système, selon la Cour, qui estimait que l'effort relevait de politiques sociales plus qu'agricoles. Un groupe de sept pays réfractaires (Allemagne, Royaume-uni, Pays-Bas, République tchèque, Danemark, Suède et Autriche) s'était alors formé, exigeant la disparition du PEAD sous sa forme initiale. Devant la mobilisation des dirigeants européens et du gouvernement français, un compromis franco-allemand a été signé le 14 novembre 2011. Le PEAD est maintenu provisoirement en 2012 et 2013, pour un budget d'environ 500 millions d'euros annuels. L'Allemagne a cependant émis une condition, souhaitant que le programme rattaché à la PAC disparaisse définitivement en 2014. L'Allemagne estime que l'aide alimentaire aux plus démunis est de la responsabilité de chaque État membre. Toutefois, le programme PEAD est fondamental et relativement peu cher car adossé sur un réseau associatif dense : il coûterait deux euros par citoyen européen et par an, pour une distribution de près de 150 tonnes de produits alimentaires. Le projet de règlement budgétaire européen pour la période 2014-2020 prévoit une somme de 2,5 milliards d'euros allouée à l'aide alimentaire, tandis qu'elle s'élève actuellement à 3,5 milliards d'euros et que 4,5 milliards d'euros sont espérés, à l'heure où les besoins ne cessent d'augmenter. Il convient donc de repenser les financements et la participation pérennes de l'Union européenne au programme d'aide aux plus démunis. Aujourd'hui, le PEAD profite à 18 millions de personnes dans 20 pays de l'UE. Parmi les principaux bénéficiaires, on retrouve la Pologne, l'Italie, ou encore la France. Sur les 480 millions d'euros dotant le PEAD en 2011, 72 millions ont été redistribués dans l'hexagone, soit environ 130 millions de repas. Selon les quatre associations caritatives agréées pour recevoir l'aide européenne, cela représente un tiers des denrées alimentaires distribuées chaque année dans le pays. C'est pourquoi le Collectif des banques alimentaires, la Croix-Rouge, les Restos du cœur et le Secours populaire ont appelé à la mobilisation pour « sauver l'aide alimentaire européenne ». Pour ne prendre que l'exemple des Restaurants du cœur, l'aide européenne représente 23 % des repas distribués et 15 % de ses ressources, selon son président. Durant la campagne précédente, 115 millions de repas avaient été distribués à 870 000 personnes. Il y a une quasi-certitude que ce seuil sera dépassé cette année encore : en 2011, c'était la cinquième augmentation consécutive, soit plus de 30 % de hausse sur cinq ans. Les mères seules avec enfants représentent 40 % des personnes accueillies, devant les personnes âgées et les jeunes. Il lui semble impératif de soutenir sans condition le maintien d'une aide dédiée à la hauteur des enjeux pressants. Ainsi, il lui demande les opportunités qui s'offrent au Gouvernement pour que ce dossier demeure prioritaire afin de pérenniser cette aide européenne essentielle pour de nombreux pays membres, qui garde un lien avec la politique agricole commune, témoignant d'une Europe sociale et solidaire. Il lui demande de bien vouloir préciser l'état des négociations européennes, tant dans les contours du nouveau dispositif que dans le montant des aides.

Réponse publiée le 22 janvier 2013

Dans ses propositions sur le cadre financier pluriannuel 2014-2020, la Commission européenne a proposé une enveloppe de 2,5 milliards d'euros pour un nouveau programme d'aide aux plus démunis (PEAD). Elle a également suggéré que ce programme soit rattaché à la politique de cohésion et, plus particulièrement, en son sein, au fonds social européen (FSE), au titre de l'inclusion sociale et de la lutte contre la pauvreté. Dans le prolongement de ses propositions financières, la Commission a présenté le 24 octobre dernier une proposition législative visant à établir un fonds européen d'aide aux plus démunis (FEAD). Contrairement au PEAD, auquel il se substituerait dans la prochaine programmation financière 2014-2020, le fonds proposé irait au-delà de la distribution d'aide alimentaire. Il constituerait ainsi un instrument global assurant l'aide matérielle sous forme de denrées alimentaires, mais aussi de biens, destinés aux sans-abri et aux enfants en situation de privation matérielle. En complément de cette aide matérielle, il permettrait également de mettre en oeuvre des mesures d'accompagnement, visant la réinsertion sociale des plus démunis. Nonobstant le soutien d'une majorité d'Etats membres, l'acceptation de ce nouveau fonds se révèle difficile. En effet, ce programme, bien qu'ayant changé de périmètre et de base juridique, reste contesté sur le principe et au nom de la subsidiarité, par un nombre suffisant d'Etats membres susceptibles de former une minorité de blocage au Conseil. La France n'a eu de cesse de défendre la pérennité d'un instrument indispensable de solidarité en particulier dans une période de crise. C'est ainsi qu'à l'issue d'une rencontre, le 9 novembre dernier, avec les responsables des Restos du coeur, le Président de la République a rappelé la force et la constance de l'engagement de la France en faveur d'une Europe plus solidaire, message qu'il a réitéré en novembre dernier lors du Conseil européen consacré au prochain cadre financier pluriannuel. Le gouvernement français continue à oeuvrer afin que ce programme indispensable à des millions d'Européens soit non seulement pérennisé mais également doté d'une enveloppe financière à la hauteur des enjeux à relever.

Données clés

Auteur : M. Hervé Féron

Type de question : Question écrite

Rubrique : Agriculture

Ministère interrogé : Affaires européennes

Ministère répondant : Affaires européennes

Dates :
Question publiée le 4 décembre 2012
Réponse publiée le 22 janvier 2013

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