Question de : M. Paul Salen
Loire (6e circonscription) - Les Républicains

M. Paul Salen attire l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur l'annonce faite par Monsieur le Premier ministre de vouloir inscrire dans la Constitution la reconnaissance du rôle des partenaires sociaux. La démocratie sociale est une des composantes essentielles de notre pacte républicain et nul ne peut contester le rôle fondamental des partenaires sociaux qui contribuent, par la négociation, à la mise en place d'un dialogue social responsable et autonome. Les articles 5 à 8 du Préambule de la Constitution de 1946 ainsi que l'article premier de la Constitution de 1958 reconnaissent le rôle des partenaires sociaux en garantissant les droits des salariés à se syndiquer et le caractère social de la République. L'inscription, dans la Constitution de 1958, du rôle des partenaires sociaux peut rester au stade purement déclaratif n'ayant d'autre force que celle du symbole ou renforcer la définition du bloc de constitutionnalité telle que définie par le Conseil constitutionnel dans sa décision «Liberté d'association» du 16 juillet 1971. Néanmoins, cette décision clarifie la lecture des droits définis par le Préambule de 1946 puisqu'il en découle que ce sont des «droits créances» que l'État doit promouvoir. Pour autant, le législateur et les juges constitutionnels protègent ces droits et en assurent la promotion sans reconnaître aux partenaires sociaux un rôle constitutionnel. La mise en place de cette modification constitutionnelle pose alors la question de la valeur des actes découlant des négociations sociales. Ces accords, textes ou autres orientations feront-ils partie du bloc de constitutionnalité puisque négociés par des acteurs disposant d'une reconnaissance constitutionnelle ? Aussi, il lui demande si elle partage son analyse et de clarifier les conséquences juridiques d'une telle reconnaissance au niveau constitutionnel mais aussi du droit privé.

Réponse publiée le 4 décembre 2012

Le rôle des partenaires sociaux est déjà reconnu dans la Constitution puisqu'aux termes de l'alinéa 8 du Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946, « tout travailleur participe, par l'intermédiaire de ses délégués, à la détermination collective des conditions de travail ainsi qu'à la gestion des entreprises ». Si le Conseil constitutionnel admet que cet alinéa du Préambule puisse être invoqué à l'appui d'une question prioritaire de constitutionnalité (décision n° 2010-42 QPC du 7 octobre 2010), il ne fait pas de la participation des travailleurs antérieurement à l'adoption d'un projet de loi une condition de sa constitutionnalité. Il considère ainsi « que ni les dispositions du huitième alinéa du préambule de la Constitution de 1946 (...), ni aucune autre règle de la valeur constitutionnelle n'obligent le Gouvernement à faire précéder la présentation au Parlement d'un projet de loi comportant des dispositions touchant aux principes fondamentaux du droit du travail d'une négociation entre les partenaires sociaux » (décision n° 98-401 DC du 10 juin 1998 cons. 6). La concertation préalable avec les organisations syndicales de salariés et d'employeurs avant « tout projet de réforme envisagé par le Gouvernement qui porte sur les relations individuelles et collectives du travail, l'emploi et la formation professionnelle et qui relève du champ de la négociation nationale et interprofessionnelle », sauf en cas d'urgence, est déjà prévue au premier alinéa de l'article 1er du code du travail. L'introduction d'une telle disposition dans la Constitution aurait donc pour effet de rendre l'obligation de concertation préalable opposable aux projets de loi. Elle ne confèrerait en revanche pas de valeur constitutionnelle aux actes négociés dans ce cadre, seul le pouvoir constituant étant habilité à compléter le bloc de constitutionnalité.

Données clés

Auteur : M. Paul Salen

Type de question : Question écrite

Rubrique : Travail

Ministère interrogé : Justice

Ministère répondant : Justice

Dates :
Question publiée le 17 juillet 2012
Réponse publiée le 4 décembre 2012

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