Question de : M. Jean-Jacques Candelier
Nord (16e circonscription) - Gauche démocrate et républicaine

M. Jean-Jacques Candelier attire l'attention de Mme la ministre de la culture et de la communication sur l'attitude de la DGCCRF, contradictoire avec la volonté du Gouvernement. Dans une réponse à l'Observatoire des libertés en date du 16 octobre 2012, la ministre s'est référée à la loi, qui « prescrit l'emploi obligatoire du français dans les émissions et les messages publicitaires diffusés par les services de communication audiovisuelle. L'utilisation de langues étrangères n'est pas pour autant proscrite, sous réserve qu'il soit recouru à une traduction en français, aussi lisible, audible ou intelligible que la présentation en langue étrangère ». Or la DGCCRF, organisme de contrôle désigné par la loi du 4 août 1994 régissant l'usage de la langue française, a des vues bien différentes. Saisi par l'association Observatoire des libertés à propos d'une publicité de la marque Peugeot rédigée en anglo-américain (la traduction figurait sur le côté dans des caractères dix fois inférieurs au texte en langue étrangère, en contradiction avec la loi du 4 juillet imposant, dans ce cas, une traduction française aussi importante que le message étranger), la DGCCRF invoqua des arguments contestables, ses agents ne relevant pas « d'infraction aux dispositions relatives à l'emploi de la langue française lorsque sont employés des termes ou expressions dans une autre langue, facilement compréhensibles par le consommateur français, ou lorsque sont employés d'autres moyens assurant l'information des consommateurs (dessins, pictogrammes, symboles) si ces moyens sont facilement compréhensibles et suffisent à transmettre l'information souhaitée ». Il est inadmissible de proclamer que le consommateur français comprend facilement l'anglais, comme il est inadmissible que le locuteur se voit réduit à la lecture de pictogrammes, comme entend l'imposer la directive européenne derrière laquelle semble se ranger l'organisme de contrôle, au détriment de la loi française qui ne distingue pas, en matière d'obligation des conditions de traduction, les messages écrits ou audiovisuels. Il lui demande donc quelles démarches elle entend entamer auprès de la DGCCRF afin de faire respecter la loi.

Réponse publiée le 19 mars 2013

Chargée de coordonner l'application du cadre légal relatif à l'emploi de la langue française, la ministre de la culture et de la communication est particulièrement sensible aux enjeux de santé et de sécurité liés à la présence de notre langue dans les biens, produits et services commercialisés en France. Elle estime qu'un usage inapproprié de l'anglais, tel qu'on le constate dans certaines campagnes publicitaires, ne permet pas d'assurer de façon satisfaisante l'information du consommateur. La loi du 4 août 1994 constitue le socle de notre dispositif légal et réglementaire visant à garantir la présence de la langue française dans de nombreux secteurs de la société. Toutefois, s'agissant de l'information des consommateurs, la portée de ce texte a été précisée au regard de la jurisprudence communautaire, aux termes de laquelle les États peuvent prescrire l'utilisation d'une langue déterminée pour informer le consommateur, mais doivent également permettre, à titre alternatif, l'utilisation d'une autre langue facilement comprise par les acheteurs et l'emploi éventuel de dessins, symboles et pictogrammes. La circulaire de la ministre de la culture et de la communication du 20 septembre 2001 et une instruction du 21 février 2005 de la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) tirent ainsi les conséquences de cette jurisprudence. Au cas d'espèce, la publicité utilisée par la société Peugeot est, selon l'analyse de la DGCCRF, une publicité de « notoriété » de la marque qui ne porte ni sur les caractéristiques, ni sur la composition d'un produit. Or, s'agissant des publicités comportant des termes rédigés en langue étrangère, les services de la DGCCRF s'attachent à faire une appréciation au cas par cas, compte tenu de la nature du message et au regard des exigences posées par le principe d'une information claire et loyale des consommateurs. Aussi, dans cette logique protectrice, il ne sera pas relevé d'infraction aux dispositions relatives à l'emploi de la langue française lorsque sont employés des termes ou expressions dans une autre langue, facilement compréhensibles par le consommateur français, ou lorsque sont employés d'autres moyens assurant l'information des consommateurs (dessins, pictogrammes, symboles) si ces moyens sont aisément compréhensibles et suffisent à transmettre l'information souhaitée. En revanche, dans certains cas susceptibles d'affecter la sécurité ou la santé des consommateurs, certaines mentions de nature à fournir des informations utiles pour évaluer les risques inhérents aux produits doivent être obligatoirement traduites en français. Il en va de même lorsque de telles mentions portent sur des informations substantielles concernant un produit ou un service (caractéristiques essentielles, mode d'emploi, garantie...) : celles-ci sont en effet indispensables pour que le consommateur s'engage en connaissance de cause. Le slogan en anglais de cette publicité « de notoriété » fait l'objet d'une traduction française en bas de page, rédigée en petits caractères. Comme le précise la circulaire du 19 mars 1996 relative à l'application de la loi de 1994, une similitude des deux présentations et un parallélisme des modes d'expression entre les deux versions ne sont pas exigés. En outre, la traduction peut ne pas être au mot à mot, dès lors qu'elle reste dans l'esprit du texte original. La version française n'étant pas jugée moins bien comprise que son original en langue étrangère, aucune atteinte aux droits des consommateurs ne peut dont être établie au cas d'espèce. Cependant, si, comme au cas présent, la présence de slogans publicitaires dans une langue autre que le français ne constitue pas nécessairement une infraction à la loi de 1994, il n'en demeure pas moins que la ministre de la culture et de la communication juge regrettable que les ressources de notre langue ne puissent pas être davantage mobilisées pour faire passer les messages souhaités auprès des consommateurs et des usagers. Notre langue permet, notamment dans le domaine publicitaire, de faire oeuvre d'imagination et d'audace sans qu'il soit nécessairement besoin de recourir à un idiome étranger. La ministre continuera donc d'exercer sa vigilance en la matière et, au-delà du strict respect des textes, à faire oeuvre de pédagogie et à proposer des solutions réalistes pour que notre langue ait la place qui lui revient dans la cité.

Données clés

Auteur : M. Jean-Jacques Candelier

Type de question : Question écrite

Rubrique : Langue française

Ministère interrogé : Culture et communication

Ministère répondant : Culture et communication

Dates :
Question publiée le 25 décembre 2012
Réponse publiée le 19 mars 2013

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