Question de : M. Marcel Bonnot
Doubs (3e circonscription) - Les Républicains

M. Marcel Bonnot attire l'attention de Mme la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie sur la récente annonce quant au projet d'aligner la fiscalité du diesel sur la fiscalité de l'essence. Ce projet, s'il est une grossière erreur stratégique pour le secteur automobile de notre pays et plus particulièrement pour notre industrie, révèle également une forte méconnaissance des pouvoirs publics sur le plan technologique, industriel et social. En effet, dans un contexte particulièrement difficile pour la filière automobile, ce projet traduit une ignorance évidente tant des réalités économiques que des innovations technologiques que nos constructeurs ont développé et pour lesquelles ils ont lourdement investit depuis les années 80. Ainsi, aujourd'hui, grâce au filtre à particules (FAP), innovation française qui marque une rupture technologique majeure, la question des émissions de particules est un problème résolu. L'Union européenne le reconnait d'ailleurs puisqu'elle en a imposé la généralisation pour tous les véhicules diesel (réglementation euro5) afin d'atteindre les objectifs en matière de diminution des émissions de CO2 (95 g/km en 2020). La maîtrise de l'effet de serre dans le secteur des transports ne pourra se faire sans la motorisation diesel, désormais réputée meilleure pour le climat puisque ces moteurs consomment déjà 15 % à 20 % d'énergie fossile en moins que le moteur à essence. Sur le plan écologique une telle mesure serait une escroquerie intellectuelle car inefficiente et inefficace puisque les émissions de particules restent aujourd'hui imputables aux moteurs d'anciennes générations et non à l'utilisation de ce carburant. Il convient donc de soutenir le renouvellement du parc ancien des véhicules diesel et non d'en limiter le développement. Aligner la fiscalité du diesel sur celle de l'essence fragilisera encore davantage nos constructeurs français, entraînera la destruction de quelque 10 000-15 000 emplois (chercheurs, ouvriers...), nos transporteurs. Au contraire, il convient de soutenir ce secteur stratégique pour notre industrie automobile et en particulier les innovations « made in France » qui démontrent l'excellence française, l'exception française en ces domaines. Les sommes mobilisées par l'industrie automobile française au titre de la R et D pour parvenir à un diesel propre demeure considérable. PSA avec son filtre à particule et son véhicule hybride diesel demeure leader sur le plan mondial. La stratégie dans le temps des constructeurs français demeure tablée sur la pleine maîtrise de la motorisation diesel en termes de rejets. Autant dire qu'aligner la fiscalité du diesel sur celle de l'essence aurait pour l'industrie automobile et l'emploi une répercussion immédiate et désastreuse. Par ailleurs un tel alignement de fiscalité s'apparenterait à la mise en place d'un impôt supplémentaire supporté par les classes les moins favorisées et les classes moyennes. En effet, 65 % du parc automobile est aujourd'hui constitué de voiture diesel et, s'agissant du taux de diésélisation des voitures neuves, celui-ci est de 73 % en 2012. S'il ne s'agit que de piste de réflexion, une telle mesure serait un contresens en termes d'impact écologique, de sérieux économique et industriel et de soutien du pouvoir d'achat des ménages de notre pays. Il souhaiterait connaître les réelles intentions du Gouvernement sur ce sujet d'importance pour la compétitivité de la France.

Réponse publiée le 16 avril 2013

La révision de la directive européenne 2003/96/CE restructurant le cadre communautaire de taxation des produits énergétiques et de l'électricité est engagée depuis que la Commission européenne a présenté sa proposition le 13 avril 2011. La principale nouveauté de la proposition de la Commission européenne est d'introduire deux éléments dans la fiscalité sur l'énergie : une taxe générale de la consommation d'énergie basée sur le contenu énergétique et une taxe liée aux émissions de CO2. Ceci représente une évolution substantielle par rapport à l'actuel régime de taxation qui repose essentiellement sur la quantité d'énergie consommée. Il s'agit en effet de mettre en place un signal prix pour le carbone sur les secteurs d'activité en dehors du système d'échange de quotas d'émissions de l'union européenne (ETS), tout en évitant le chevauchement des deux instruments sur la taxation liée au CO2. La France, avec d'autres partenaires européens, soutient l'approche de la Commission européenne, en particulier la mise en place d'une composante carbone dans l'assiette des accises énergétiques, et ce afin de prendre en compte la protection de l'environnement et la nécessaire réduction des émissions de gaz à effet de serre. La question de la convergence de taxes entre l'essence et le gazole, figurait dans le projet initial de la Commission européenne. Cette convergence se justifie sur le principe, en raison des impacts sanitaires de l'utilisation du gazole, mais aussi de l'impact économique de la diésélisation importante du parc automobile français. Cette diésélisation contribue au déséquilibre de la balance commerciale, la France raffinant essentiellement de l'essence et devant importer du gazole. Elle incite également les constructeurs à concentrer leurs efforts sur les motorisations diesel, alors que le marché mondial est dominé par les motorisations essence. La convergence des fiscalités devrait, en tout état de cause et compte tenu de ses effets sur l'industrie automobile, être opérée de manière concertée et progressive, sur la base d'une étude d'impact approfondie. C'est dans cet état d'esprit que la France participe aux négociations européennes. Plus généralement, lors de la conférence environnementale des 14 et 15 septembre 2012, le Premier ministre a exprimé sa volonté de mettre en place une fiscalité écologique qui soit juste socialement, favorise l'innovation et la croissance économique et améliore la compétitivité des entreprises. La ministre de l'Ecologie, du Développement durable et de l'Energie a officiellement installé le comité pour la fiscalité écologique le 18 décembre 2012, présidé par Christian de Perthuis. La fiscalité applicable aux carburants fait partie des sujets qui ont vocation à être abordés par ce comité, qui devra formuler un premier train de propositions au printemps 2013, en vue d'inscrire les premières mesures dans le projet de loi de finances pour 2014.

Données clés

Auteur : M. Marcel Bonnot

Type de question : Question écrite

Rubrique : Impôts et taxes

Ministère interrogé : Écologie, développement durable et énergie

Ministère répondant : Écologie, développement durable et énergie

Dates :
Question publiée le 12 mars 2013
Réponse publiée le 16 avril 2013

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