évasion fiscale
Question de :
M. Patrice Carvalho
Oise (6e circonscription) - Gauche démocrate et républicaine
M. Patrice Carvalho attire l'attention de M. le ministre de l'économie et des finances sur l'évasion fiscale pratiquée par de grandes entreprises françaises y compris celles dans lesquelles l'État français possède des intérêts. Certaines regroupent des holdings aux Pays-Bas pour réduire leur charge fiscale sur les bénéfices et investir à l'étranger en profitant des conventions fiscales avantageuses qui lient ce pays à de nombreux États, y compris de l'Union européenne. C'est le cas de Thalès par exemple mais aussi des groupes EDF, GDF-Suez ou France Télécom. Ce dernier, comme la plupart des pensionnaires du CAC 40, use aussi des intérêts notionnels, une niche fiscale belge qui a permis à ces entreprises de soustraire au fisc plus de 2,2 milliards d'euros en deux ans. Et comme si cela ne suffisait pas, bon nombre d'entreprises ayant pignon sur rue pratiquent le « carrousel TVA » dont le principe est celui d'une chaîne de ventes successives entre entreprises liées, qui permet aux acheteurs de bénéficier plusieurs fois du remboursement de la TVA. Cette évasion fiscale, doublée d'une fraude à la TVA, pratiquée par les grandes entreprises au su et vu de l'État français et de l'Union européenne est inadmissible. Elle l'est d'autant plus lorsque ces entreprises sont en partie détenues par l'État français, près de 36 % du capital de GDF-Suez, 27 % de France télécom (Orange), 84,5 % d'EDF..., et que le Gouvernement cherche 6 milliards de recettes nouvelles essentiellement dans le porte-monnaie des familles françaises et des collectivités locales. C'est la raison pour laquelle il lui demande ce que compte faire le Gouvernement pour en finir avec ces pratiques qui privent la France de 60 milliards à 80 milliards d'euros chaque année.
Réponse publiée le 8 octobre 2013
La lutte contre la fraude et l'évasion fiscales est une priorité pour les pouvoirs publics. A cet égard, de nombreuses mesures législatives viennent d'être adoptées à l'initiative du Gouvernement, notamment à l'occasion des deux derniers collectifs de 2012, pour donner des outils renforcés à l'administration fiscale. Dans ce cadre, le Gouvernement partage la préoccupation de l'auteur de la question concernant l'utilisation de schémas mis en oeuvre par les groupes multinationaux qui ont pour effet de soustraire leurs résultats à l'impôt sur les sociétés en France. Face à ces pratiques, la France dispose d'un arsenal juridique, lui permettant de mettre en oeuvre la règle générale de l'abus de droit ou encore les dispositifs anti-abus spécifiques, qu'elle fait évoluer constamment. Elle a notamment soumis au Parlement à l'été 2012, une mesure législative qui renforce les moyens de l'administration, à travers un renversement de la charge de la preuve pour taxer sur le fondement de l'article 209 B du code général des impôts les bénéfices que les entreprises françaises localisent dans des Etats ou territoires hors de l'Union européenne où ils sont soumis à des régimes fiscaux privilégiés. S'agissant de l'action des services de contrôle fiscal, ils sont particulièrement mobilisés sur les problématiques de l'évasion fiscale des groupes multinationaux. Ainsi, les rectifications de prix de transfert se sont élevées à 3,5 milliards d'euros en base en 2012. De plus, dans le cadre du G20, plusieurs Etats dont la France ont pris l'initiative de demander à l'organisation pour la coopération et le développement économiques (OCDE) de présenter des propositions afin de lutter contre l'érosion des assiettes fiscales et les transferts de bénéfices. Un rapport dressant un état des lieux très complet a été soumis aux ministres des finances à l'occasion du sommet de Moscou des 15 et 16 février 2013 et l'OCDE a publié en juillet 2013 un plan d'action sur cette base. A cette occasion, les ministres français, allemands et britanniques ont publiquement rappelé leur détermination pour progresser sur ce dossier. La France a également pris l'initiative d'un ensemble d'actions au niveau international en faveur de la transparence et de l'échange d'informations. Elle préside le comité d'évaluation par les pairs (PRG) au sein du forum mondial sur la transparence et l'échange d'informations, qui a pour mission de mettre en oeuvre un processus d'évaluation des échanges de renseignements mis en place par les différents Etats et territoires, notamment ceux qui ont conclu dernièrement des accords de coopération. Elle poursuit une politique volontariste d'échanges de renseignements avec les anciens Etats et territoires non coopératifs. Enfin, la Commission a présenté, le 6 décembre 2012, son plan d'action pour renforcer la lutte contre la fraude et l'évasion fiscales au sein de l'Union européenne et une recommandation relative à la planification fiscale agressive préconisant aux Etats membres de mener une action commune dans ce domaine. En amont, dans le cadre de l'élaboration de ce plan d'action, le ministre de l'économie et des finances et le ministre délégué chargé du budget avaient d'ores et déjà contribué aux réflexions et fait connaître leurs attentes prioritaires notamment par leur lettre du 21 novembre 2012 adressée aux commissaires respectivement chargés de la fiscalité et du marché intérieur. De même, à la suite de ce plan, la France s'investira avec ses partenaires afin de parvenir à un renforcement du cadre existant en Europe dans ce domaine. Enfin, des mesures ont été prises pour renforcer les moyens de l'administration fiscale afin de lutter contre la fraude fiscale en matière de taxe sur la valeur ajoutée (TVA), et en particulier les formes les plus graves telles que les carrousels. En complément des lourdes sanctions fiscales qu'elle peut appliquer en matière de fraude à la TVA, la direction générale des finances publiques (DGFiP) peut par ailleurs déposer une plainte au pénal, pour fraude fiscale ou escroquerie, délits passibles d'une amende et d'une peine d'emprisonnement pouvant aller jusqu'à cinq ans. Au plan des résultats, les redressements effectués par les services du contrôle fiscal se sont élevés à 3,2 milliards d'euros en 2012. L'administration fiscale a également rejeté 1,3 milliard d'euros de demandes injustifiées de remboursement de crédit de TVA. Pour lutter contre les phénomènes de fraude à la TVA massifs et évolutifs qui peuvent potentiellement toucher tout pays de l'Union européenne, le Conseil européen vient d'adopter, avec le soutien actif de la France, deux directives prévoyant un mécanisme de réaction rapide qui permettra d'introduire des mesures législatives visant à mettre un terme aux risques les plus importants dès qu'ils sont identifiés et l'extension du régime d'autoliquidation à certains biens et services et notamment aux services de communication électroniques et aux livraisons d'électricité et de gaz. Enfin, le Gouvernement a soumis au Parlement un projet de loi ambitieux relatif à la fraude fiscale et à la grande délinquance économique et financière visant notamment à prévoir des sanctions aggravées en cas de fraude fiscale commise en bande organisée et à encadrer la délivrance des numéros de TVA intracommunautaire.
Auteur : M. Patrice Carvalho
Type de question : Question écrite
Rubrique : Impôts et taxes
Ministère interrogé : Économie et finances
Ministère répondant : Économie et finances
Dates :
Question publiée le 30 avril 2013
Réponse publiée le 8 octobre 2013