réglementation
Question de :
M. Guillaume Larrivé
Yonne (1re circonscription) - Les Républicains
M. Guillaume Larrivé interroge M. le ministre de l'intérieur sur l'application de l'article 56 de la loi n° 2011-672 du 16 juin 2011 relative à l'immigration, à l'intégration et à la nationalité, en vertu duquel l'article L. 552-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que "quand un délai de vingt jours s'est écoulé depuis l'expiration du délai de cinq jours mentionné à l'article L. 552-1 et en cas d'urgence absolue ou de menace d'une particulière gravité pour l'ordre public, ou lorsque l'impossibilité d'exécuter la mesure d'éloignement résulte de la perte ou de la destruction des documents de voyage de l'intéressé, de la dissimulation par celui-ci de son identité ou de l'obstruction volontaire faite à son éloignement, le juge des libertés et de la détention est à nouveau saisi". Le juge peut également être saisi lorsque, malgré les diligences de l'administration, la mesure d'éloignement n'a pu être exécutée en raison du défaut de délivrance des documents de voyage par le consulat dont relève l'intéressé ou de l'absence de moyens de transport et qu'il est établi par l'autorité administrative compétente que l'une ou l'autre de ces circonstances doit intervenir à bref délai. Il peut également être saisi aux mêmes fins lorsque la délivrance des documents de voyage est intervenue trop tardivement, malgré les diligences de l'administration, pour pouvoir procéder à l'exécution de la mesure d'éloignement dans le délai de vingt jours mentionné au premier alinéa. Le juge statue par ordonnance dans les conditions prévues aux articles L. 552-1 et L. 552-2. S'il ordonne la prolongation de la rétention, l'ordonnance de prolongation court à compter de l'expiration du délai de vingt jours mentionné au premier alinéa du présent article et pour une nouvelle période d'une durée maximale de vingt jours. "Par dérogation aux dispositions de l'alinéa précédent, si l'étranger a été condamné à une peine d'interdiction du territoire pour des actes de terrorisme prévus par le titre II du livre IV du code pénal ou si une mesure d'expulsion a été prononcée à son encontre pour un comportement lié à des activités à caractère terroriste pénalement constatées, le juge des libertés et de la détention près le tribunal de grande instance de Paris peut, dès lors qu'il existe une perspective raisonnable d'exécution de la mesure d'éloignement et qu'aucune décision d'assignation à résidence ne permettrait un contrôle suffisant de cet étranger, ordonner la prolongation de la rétention pour une durée d'un mois qui peut être renouvelée. La durée maximale de la rétention ne doit pas excéder six mois [...] ". Il souhaite qu'il indique quelle appréciation il porte sur l'application de ce dernier alinéa, que le législateur a prévu afin que des terroristes faisant l'objet d'une mesure d'éloignement n'ayant pu être exécutée à ce stade soient placés, sous une surveillance policière constante, dans un centre de rétention administrative et non pas seulement assignés à résidence.
Réponse publiée le 11 mars 2014
L'article 56 de la loi n° 2011-672 du 16 juin 2011 relative à l'immigration, à l'intégration et à la nationalité a introduit dans le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (quatrième alinéa de l'article L. 552-7) la possibilité de prolonger la rétention administrative au-delà de la durée maximale de droit commun de quarante-cinq jours exclusivement pour les étrangers faisant l'objet d'une interdiction du territoire français prononcée pour des actes de terrorisme prévus par le titre II du livre IV du code pénal ou d'une mesure d'expulsion prononcée pour un comportement lié à des activités à caractère terroriste pénalement constatées en instance d'éloignement. Ces dispositions ont pour objet de donner à l'autorité administrative, compte tenu de l'intérêt particulier qui s'attache à l'éloignement de ces étrangers eu égard à l'exceptionnelle gravité de la menace pour la sécurité publique qu'ils représentent, les moyens de mieux s'assurer qu'ils pourront effectivement être éloignés du territoire lorsque les obstacles à l'éloignement auront été levés. Elles ont été élaborées après consultation du Conseil d'Etat qui, dans son avis du 13 janvier 2011, a admis que le législateur pouvait instaurer pour cette catégorie d'étrangers dont l'éloignement constitue une impérieuse nécessité, une durée maximale de rétention administrative excédant la durée de droit commun, sous réserve du respect des principes dégagés par le Conseil constitutionnel et la Cour européenne des droits de l'homme, ainsi que des dispositions de la directive 2008/115 du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 relative aux normes et procédures communes applicables dans les États membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier : nécessité de la rétention pour l'exécution de la mesure, absence de mesure moins contraignante suffisamment efficace, mise en oeuvre uniquement à l'égard des étrangers dont la présence comporte les risques les plus graves, perspective raisonnable d'exécution de la mesure d'éloignement, intervention de l'autorité judiciaire pour autoriser la prolongation à échéances régulières et fixation d'une durée maximale de rétention. Dans le respect de ce cadre strict, les dispositions de l'article L. 552-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile prévoient donc la possibilité de prolonger, pour ces étrangers uniquement, la période de rétention à la double condition qu'il existe une perspective raisonnable d'exécution de la mesure d'éloignement et qu'aucune décision d'assignation à résidence ne permette un contrôle suffisant de cet étranger. Le régime dérogatoire prend effet lors de la seconde saisine du juge des libertés et de la détention ; il permet d'obtenir une prolongation d'un mois au lieu de vingt jours, puis, le cas échéant, tant que l'éloignement n'a pu être exécuté et sous réserve que les conditions de mise en oeuvre soient toujours réunies, de nouvelles prorogations d'une durée d'un mois. La durée maximale de la rétention ne doit pas excéder six mois, le Conseil constitutionnel ayant censuré, dans sa décision n° 2011-631 DC du 9 juin 2011, les dispositions permettant de prolonger cette durée jusqu'à dix-huit mois au motif qu'elles apportaient à la liberté individuelle une atteinte contraire à l'article 66 de la Constitution. Le décret d'application a été publié le 27 janvier 2012. La rétention de longue durée vise à mieux garantir que ces étrangers particulièrement dangereux restent à la disposition de l'autorité administrative lorsque les démarches préalables à l'éloignement n'ont pu aboutir dans le délai de la durée maximale de rétention de droit commun mais présentent des perspectives assez proches de finalisation. Tel est le cas notamment lorsque l'autorité administrative est dans l'attente de la délivrance d'un laissez-passer consulaire par les autorités du pays dont l'étranger, dépourvu de document de voyage, prétend avoir la nationalité, ou de la décision du directeur général de l'OFPRA sur la demande d'asile présentée par l'étranger. En revanche, et conformément à la directive retour, la rétention de longue durée ne peut être mise en oeuvre s'il n'existe pas de perspective raisonnable d'éloignement dans le délai de six mois, notamment, lorsque l'étranger a déposé un recours, assorti d'un effet suspensif, contre son éloignement auprès de la Cour européenne des droits de l'homme ou qu'il établit être exposé, en cas de renvoi dans son pays, à un risque de traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde de droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950. Dans cette hypothèse, l'étranger est placé sous un régime d'assignation à résidence assorti de contraintes particulièrement strictes (liberté de circulation réduite au périmètre d'une commune, présentation auprès des services de police ou de gendarmerie jusqu'à quatre fois par jour, obligation de demeurer dans les locaux où il réside pendant une plage horaire de dix heures par jour maximum).
Auteur : M. Guillaume Larrivé
Type de question : Question écrite
Rubrique : Étrangers
Ministère interrogé : Intérieur
Ministère répondant : Intérieur
Dates :
Question publiée le 28 mai 2013
Réponse publiée le 11 mars 2014