Question de : M. Jean-Jacques Candelier
Nord (16e circonscription) - Gauche démocrate et républicaine

M. Jean-Jacques Candelier interroge M. le ministre de l'économie et des finances sur la situation financière de certains pays d'Europe et les solutions que la France compte mettre en œuvre. Après la Grèce, l'Irlande et le Portugal, c'est au tour de la quatrième économie de la zone euro, l'Espagne, d'être la cible des marchés financiers. Les ministres des finances de l'eurogroupe et le FMI ont planché sur un plan de sauvetage international. Le rapport du FMI a chiffré les besoins du secteur à au moins 40 milliards, mais la zone euro s'est dite prête à répondre favorablement à une demande d'aide de l'Espagne en faveur de son secteur bancaire et à lui prêter jusqu'à 100 milliards. Jusqu'ici, Madrid s'était refusé à lancer un appel à l'aide de crainte de se voir imposer, comme la Grèce, un programme qui irait de pair avec des conditions strictes dictées par ses bailleurs de fonds internationaux. Il lui demande de bien vouloir lui donner le détail de ce plan, les contreparties qui seront éventuellement imposées, et il lui demande aussi si la France compte avancer des solutions de financement des États qui tournent le dos à la pression des marchés financiers.

Réponse publiée le 27 novembre 2012

Suite au regain des tensions sur les marchés financiers depuis le printemps 2012 ainsi qu'à la persistance des doutes sur l'étendue des pertes du secteur bancaire et la capacité de l'Etat espagnol à lui venir en aide si nécessaire, les autorités espagnoles ont sollicité une assistance financière européenne le 25 juin, à laquelle l'Eurogroupe a donné une réponse de principe favorable le 9 juillet, et dont les modalités ont été approuvées le 27 juillet par l'Eurogroupe. Le programme porte uniquement sur la recapitalisation et la restructuration du secteur bancaire espagnol. Il s'agit du premier programme du Fonds européen de stabilité financière (FESF) limité au secteur bancaire, possibilité créée par les Chefs d'Etat et de Gouvernement de la zone euro lors du Conseil européen du 21 juillet 2011. L'assistance porte sur une enveloppe totale pouvant aller jusqu'à 100 Mds€, qui seront prêtés à l'Etat espagnol pour renforcer son secteur bancaire. Une première tranche de 30 Mds€ est d'ores et déjà disponible et prête à être déboursée si l'Espagne en fait la demande, afin de faire face à d'éventuelles difficultés cet été, dans l'attente des recapitalisations qui ne devraient avoir lieu qu'à partir de l'automne 2012. L'aide sera dans un premiers temps fournie par le FESF, dans l'attente de l'entrée en vigueur du Mécanisme européen de stabilité (MES) à l'automne 2012. L'aide sera administrée par l'Etat espagnol, via le FROB (le Fonds de restructuration bancaire de l'Espagne), qui la remboursera. Toutefois, conformément aux décisions prises lors du Conseil européen des 28 juin 2012, après la création d'un mécanisme unifié de supervision impliquant la Banque centrale européenne (BCE), le MES pourra recapitaliser directement les banques de la zone euro, et pourrait alors éventuellement intervenir en ce sens au bénéfice de l'Espagne, dans une seconde phase. L'enveloppe de 100 Mds€, qui représente le montant maximal de l'assistance, servira à financer les recapitalisations des banques dans l'impossibilité d'accéder aux marchés (via l'achat de nouvelles participations ou de titres hybrides), ainsi que la création d'une structure de défaisance vers laquelle seront transférés les actifs douteux des banques après que celles-ci auront enregistré les pertes correspondantes. S'agissant d'un programme ciblé sur le secteur bancaire, il ne comporte pas, formellement, de nouvelles conditionnalités macroéconomiques et budgétaires. Les engagements européens de l'Espagne dans ces domaines restent cependant traités dans le cadre des procédures européennes traditionnelles, notamment la procédure pour déficit excessif et la procédure pour déséquilibres macroéconomiques, et feront l'objet d'un suivi trimestriel renforcé. En revanche, les banques renforcées via les fonds européens seront soumises à des conditionnalités strictes avant de pouvoir bénéficier d'une aide. En particulier, toutes les banques recevant une aide publique devront préalablement présenter un plan de restructuration détaillé, qui devra être approuvé par la Commission européenne avant tout déboursement. Ce plan devra viser à minimiser les montants d'assistance nécessaires, grâce à l'utilisation des ressources internes des banques (vente de participations et d'actifs connexes, recentrage des activités, interdiction de versement des dividendes, interdiction de nouvelles acquisitions, encadrement des rémunérations des dirigeants et des conseils d'administration, ...) et à une mise à contribution appropriée des actionnaires et des détenteurs de dette junior des banques. Quant aux banques non-viables, elles seront placées en résolution selon les mêmes principes. Le gouvernement espagnol devra également réformer en profondeur l'architecture de son système bancaire, de manière à en renforcer la solidité. Les autorités seront par exemple amenées à revoir le cadre réglementaire relatif aux exigences de provisionnement des banques et de la concentration des risques, ainsi que le cadre de surveillance, en renforçant notamment l'indépendance du régulateur. Les autorités devront également renforcer la protection des consommateurs, certaines banques ayant vendu des instruments financiers risqués dans des conditions peu transparentes. Pour soutenir les Etats membres de la zone euro qui subissent la pression des marchés financiers, dans la foulée de l'octroi du premier plan d'assistance à la Grèce, la zone euro s'est dotée depuis mai 2010 de pare-feu, le MES et le FESF, dont la capacité combinée s'élève à 700 Mds€. Ces mécanismes peuvent être utilisés : (i) pour financer des programmes d'assistance macroéconomique du même type que ceux octroyés à la Grèce, au Portugal et à l'Irlande, (ii) pour fournir des programmes de précaution, (iii) pour effectuer des achats sur le marché primaire de la dette, afin de soutenir les émissions d'un État, dans le cadre d'un prêt ou d'un programme de précaution, ainsi que (iv) pour des interventions sur le marché secondaire pour apaiser les tensions et remédier aux dysfonctionnements de marché. Ils peuvent enfin aider à financer des recapitalisations bancaires, via un prêt à l'Etat membre concerné, comme cela a été fait pour l'Espagne. Les 28 et 29 juin 2012, les dirigeants européens ont réaffirmé leur engagement à utiliser les instruments existants du FESF et du MES de manière flexible, afin de stabiliser les marchés de la dette des Etats membres qui respectent leurs engagements dans le cadre du semestre européen, de la procédure pour déficit public excessif, ainsi que dans le cadre de la procédure pour déséquilibres macroéconomiques. Enfin, la BCE a annoncé le 6 septembre 2012 la mise en place d'un nouvel instrument d'opérations monétaires via l'achat de titres sur les marchés secondaires, portant sur les titres de maturité courte et pour des montants illimités, et qui pourra intervenir dès lors que le FESF ou le MES seront eux-mêmes disponibles pour acheter des titres de l'Etat concerné sur les marchés primaires. Sa mise en oeuvre en complément des instruments existants permettra de soulager considérablement les pressions sur les conditions de financement de certains Etats membres.

Données clés

Auteur : M. Jean-Jacques Candelier

Type de question : Question écrite

Rubrique : Politiques communautaires

Ministère interrogé : Économie et finances

Ministère répondant : Économie et finances

Dates :
Question publiée le 3 juillet 2012
Réponse publiée le 27 novembre 2012

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