médicaments
Question de :
M. Jean-Luc Bleunven
Finistère (3e circonscription) - Socialiste, écologiste et républicain
M. Jean-Luc Bleunven attire l'attention de Mme la ministre des affaires sociales et de la santé sur le syndrome de l'anti-convulsiant. Ce syndrome se développe principalement pendant la grossesse, lorsqu'une mère prend des anti-convulsiants pour contrôler son épilepsie. Il apparaît que les médicaments anti-convulsiants peuvent s'accumuler dans le sang foetal dans des concentrations supérieures à celles de la mère. Le risque de développer le syndrome, et le degré d'atteinte de l'enfant sont proportionnels à la dose prise par la mère, d'où l'adaptation du traitement. Le syndrome se caractérise chez l'enfant par une multitude de handicaps. La molécule semblant être à l'origine de cette pathologie chez les enfants concernés a été identifiée : il s'agit de l'acide volpraïque. Cette molécule exploitée sous le nom commercial de dépakine figure dans la composition de nombreux anti-épileptiques génériques. Bien que cette molécule soit clairement identifiée comme tératogène, il apparaît qu'elle soit toujours prescrite à de nombreuses femmes enceintes. Aussi, il souhaite connaître la position du Gouvernement sur ce dossier.
Réponse publiée le 11 février 2014
L'acide valproïque/valproate de sodium et apparentés (divalproate de sodium et valpromide) sont des substances qui possèdent des indications neurologiques dans le traitement des épilepsies partielles ou généralisées chez l'adulte et l'enfant, ainsi que dans la prévention de la récidive de crises après une ou plusieurs convulsions fébriles, présentant les critères de convulsions fébriles compliquées, en l'absence d'efficacité d'une prophylaxie intermittente par benzodiazépines, chez l'enfant (Dépakine®). Elles possèdent également des indications psychiatriques dans le traitement des épisodes maniaques du trouble bipolaire en cas de contre-indication ou d'intolérance au lithium (Dépakote®, Dépamide®). En France, contrairement à d'autres pays, ces substances ne possèdent pas d'indication dans la migraine. Ces substances ont obtenu leurs premières autorisations de mise sur le marché (AMM) en 1974, puis validées en 1986. Dès la validation de l'AMM, le risque tératogène (malformatif) lié à la prise de ces médicaments au cours de la grossesse a été identifié et mentionné dans le Résumé des caractéristiques du produit (RCP), destiné aux prescripteurs. Ce risque tératogène est également mentionné dans le RCP d'autres anti-épileptiques. Sur la base d'une étude isolée, il a été rapporté que Dépakine® semblait induire préférentiellement des anomalies de fermeture du tube neural, ce qui a conduit à préconiser la mise en route d'une surveillance anténatale spécialisée pour déceler l'éventuelle survenue d'une anomalie. Par ailleurs, il convient de rappeler que dans le cadre du traitement de l'épilepsie chez la femme enceinte, d'une part l'interruption brutale du traitement anti-épileptique peut entraîner une aggravation de la maladie chez la mère, avec notamment le retour de crises épileptiques, qui peut s'avérer préjudiciable pour le foetus, d'autre part le valproate de sodium a montré une réelle efficacité pour équilibrer la maladie chez certains patients épileptiques pour lesquels, les autres substances n'y parviennent pas. C'est pourquoi, même en cas de survenue d'une grossesse, la poursuite du traitement par valproate peut s'avérer nécessaire. Ainsi, lors de la mise sur le marché de ces substances, et malgré leur toxicité potentielle pour le nouveau né exposé in utero, la prescription du traitement chez la femme enceinte était restée possible pour les médecins, tout en portant à leur connaissance les risques liés à cette substance, informations qui par la suite ont été mises à jour régulièrement au regard de l'évolution des connaissances, de même que les conditions de prescription des produits. En effet, les données épidémiologiques ont permis de préciser ce risque tératogène : une augmentation du risque malformatif de 3 à 4 fois supérieure à celui qui existe dans la population générale, ainsi que de nouveaux types de malformations (poly-malformations, dysmorphies faciales, malformations cardiaques, fentes faciales, crâniosténoses, malformations rénales, urogénitales et des membres) ont pu être observés. Au vu de ces nouvelles connaissances, l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) a régulièrement modifié le RCP de ces spécialités. Les informations les plus récentes mentionnent que le valproate de sodium ne doit pas être utilisé pendant la grossesse et chez les femmes en âge de procréer, sauf en cas de réelle nécessité (à savoir en cas d'inefficacité ou d'intolérance aux alternatives médicamenteuses) et a émis des recommandations supplémentaires à l'attention des prescripteurs. Ainsi, lors de l'instauration d'un traitement chez une femme en âge de procréer, ces derniers doivent-ils s'assurer que la patiente n'est pas enceinte et lui prescrire une méthode de contraception efficace avant le début du traitement si nécessaire. Si une grossesse est envisagée, l'intérêt du traitement par valproate de sodium doit être à nouveau pesé et toutes les mesures pour envisager le recours à d'autres thérapeutiques dans le cadre de cette grossesse doivent être mises en oeuvre. Dans le cas où le traitement par valproate doit absolument être maintenu pendant la grossesse du fait de l'absence d'alternative thérapeutique adaptée, il convient d'administrer la dose journalière minimale efficace sans dépasser 1000 mg/j. De plus, une surveillance prénatale spécialisée est requise en vue de détecter d'éventuelles anomalies touchant le tube neural ou d'autres malformations. Enfin, le comité d'évaluation des risques en pharmacovigilance (PRAC) qui siège auprès de l'Agence européenne du médicament (EMA) vient d'initier une ré-évaluation du risque de ces spécialités, spécifiquement en ce qui concerne le risque pour les enfants exposés in utero. Les conclusions de cette évaluation menée à l'échelle européenne permettront de prendre en compte l'ensemble des données scientifiques disponibles et devraient conduire à une harmonisation des informations contenues dans les RCP des différents Etats membres de l'Union européenne. En fonction des conclusions de la réévaluation européenne, l'ANSM pourrait être amenée à prendre de nouvelles mesures afin de modifier les AMM nationales concernées.
Auteur : M. Jean-Luc Bleunven
Type de question : Question écrite
Rubrique : Pharmacie et médicaments
Ministère interrogé : Affaires sociales et santé
Ministère répondant : Affaires sociales et santé
Dates :
Question publiée le 30 juillet 2013
Réponse publiée le 11 février 2014