Question de : Mme Véronique Louwagie
Orne (2e circonscription) - Les Républicains

Mme Véronique Louwagie attire l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur le cerveau et la loi : éthique et pratique du neurodroit (néologisme qui désigne le champ de recherche s'intéressant aux applications juridiques des neurosciences). La loi de bioéthique, par son article 45, admet le recours à l'imagerie cérébrale dans le cadre de l'expertise judiciaire. Deux grands domaines d'intérêt sont identifiés : d'une part l'utilisation de l'imagerie cérébrale comme preuve dans un procès, d'autre part la compréhension des mécanismes délibératifs grâce aux sciences comportementales. Si l'exploitation de la neuroimagerie dans les cours de justice est encore loin d'être une réalité en France, elle se développe toutefois dans d'autres pays, à l'image des États-unis, en suscitant des avis divergents. Pour les uns, il pourrait s'agir du "nouvel ADN". Pour les autres, ce serait soit une illusion, soit un facteur menaçant certains principes fondamentaux de la procédure judiciaire. Le Centre d'analyse stratégique propose de « développer au sein de l'École nationale de la magistrature une formation aux sciences comportementales ». Aussi, souhaite-t-elle connaître quelles sont ses intentions suite à cette proposition.

Réponse publiée le 2 septembre 2014

L'utilisation de l'imagerie cérébrale à des fins judiciaires, pratique émergente dont la validation scientifique n'est pas acquise aujourd'hui, ne fait pas l'objet d'un traitement spécifique par l'Ecole nationale de la magistrature. Certains aspects des sciences comportementales sont cependant abordées tant lors de la formation initiale des auditeurs de justice que lors de certaines sessions de formation continue des magistrats. S'agissant de la formation initiale des futurs magistrats, c'est dans le cadre des enseignements du pôle « communication judiciaire » de l'Ecole nationale de la magistrature (ENM) que les dernières avancées scientifiques sont présentées en matière de détection du mensonge. Aujourd'hui cependant, les aspects liés à l'imagerie médicale ne sont pas évoqués. Par ailleurs, le neuropsychiatre et doyen du pôle « environnement judiciaire » de l'ENM, M. Boris Cyrulnik, aborde les questions des sciences comportementales et de l'imagerie cérébrale, lors de ses interventions sur le principe de l'attachement et les conséquences biologiques, neurologiques, d'un attachement insécure/sécure ou les conséquences d'un choc traumatique sur l'évolution psychique d'une personne. Par ailleurs, cette question est aussi abordée à l'occasion de certaines séquences de formation dédiées à la médecine légale et à la preuve (actions de formation sur les apports de la police technique et scientifique dans le procès pénal, sur l'expertise psychiatrique et psychologique...). Dans le cadre de la formation continue, l'ENM n'a pas en l'état le projet de développer une formation consacrée exclusivement aux sciences comportementales. Toutefois, cette approche peut être abordée dans le cadre des nombreuses formations qu'elle propose, dédiées à la médecine et à la preuve qui peuvent également évoquer l'imagerie médicale (justice et médecine légale, preuve et progrès scientifique, psychiatrie criminelle, l'expertise psychiatrique, bioéthique et droit, psychiatrie et justice pénale, approche de la criminologie...). Un colloque sur la vérité judiciaire avait été organisé le 24 octobre 2011 à l'Ecole nationale de la magistrature à Bordeaux, et a notamment traité des biais de perception auxquels les magistrats peuvent être soumis, notamment dans le cadre d'une situation de stress (intervention du Pr A. BERTHOZ, Neurophysiologiste, Collège de France - Le regard : un problème de point de vue ? Données récentes des neurosciences cognitives).

Données clés

Auteur : Mme Véronique Louwagie

Type de question : Question écrite

Rubrique : Bioéthique

Ministère interrogé : Justice

Ministère répondant : Justice

Dates :
Question publiée le 26 novembre 2013
Réponse publiée le 2 septembre 2014

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