baux d'habitation
Question de :
M. Franck Riester
Seine-et-Marne (5e circonscription) - Les Républicains
M. Franck Riester attire l'attention de Mme la ministre de l'égalité des territoires et du logement sur la question de l'équilibre entre les droits des locataires et ceux des bailleurs. Il paraît en effet tout à fait concevable, au nom des exigences de justice sociale et de fraternité, que la loi protège, temporairement, un locataire confronté à un accident de la vie, qui ne peut plus payer son loyer. Toutefois, nos règles juridiques n'opèrent pas de distinction avec un locataire qui obtient un logement sur la base de fausses déclarations, sur la base de documents falsifiés ou qui ne paie pas son loyer en dépit de ressources financières suffisantes. Cette configuration de notre droit crée ainsi des situations insupportables pour les bailleurs, qui se considèrent victimes de véritables escroqueries. Ces situations sont d'autant plus pénibles à vivre que les bailleurs ne peuvent récupérer leurs biens, parfois fortement dégradés, ou obtenir le paiement des loyers impayés, qu'au prix de longues années de procédures judiciaires coûteuses. Aussi, il lui demande quels sont les moyens dont disposent les bailleurs pour obtenir le paiement des loyers impayés et l'expulsion des locataires en faute, et si des mesures sont étudiées afin de sanctionner plus sévèrement et plus rapidement les locataires qui, délibérément, refusent de respecter les clauses d'un contrat de location.
Réponse publiée le 16 octobre 2012
La recherche d'un meilleur équilibre dans les rapports entre bailleurs et locataires lors d'impayés de loyers, et la mise en place de moyens pour sanctionner plus sévèrement et rapidement les locataires qui organiseraient leur insolvabilité jusqu'à épuisement des recours prévus par la procédure relative aux expulsions sont une nécessité. Aussi, des moyens de coordination des instances ont été développés afin d'intervenir dès le constat de l'impayé locatif et de prévenir les expulsions. Le rôle des Caisses d'allocations familiales et des commissions de coordination des actions de prévention des expulsions locatives (CCAPEX) est prépondérant mais l'efficacité de la procédure dépend aussi de la rapidité du bailleur à agir et de la communication de l'impayé à ces organismes. Or, dans la pratique, le bailleur peut s'avérer négligent ou méconnaître simplement la procédure. La législation, dans le livre IV du code des procédures civiles d'exécution (CPCE) relatif à l'expulsion, encadre la procédure d'expulsion tant dans sa phase pré-contentieuse (constat de l'impayé, commandement de payer, assignation en vue de la résiliation du bail, enquête financière et sociale précédant l'audience) que dans sa phase contentieuse (audience, décision de justice, résiliation du bail, commandement de libérer les lieux, éventuellement recours à la force publique) dans des délais indispensables à une instruction rigoureuse des dossiers. Cette procédure traduit la volonté de maintenir l'équilibre dans les rapports locatifs entre bailleur et locataire tout en tenant compte du contexte socio-économique. Lorsque la décision d'expulsion a été ordonnée judiciairement, si le juge peut accorder aux occupants des délais, qui ne peuvent en aucun cas excéder un an, c'est en tenant compte « de leur bonne ou mauvaise volonté » dans l'exécution de leurs obligations, mais aussi notamment de leur âge, état de santé, situation de fortune et des diligences que l'occupant justifie avoir faites en vue de son relogement (article L. 412-4 du CPCE). S'agissant du délai suivant le commandement à libérer les locaux, l'article L. 412-1 du CPCE prévoit aussi, dans certains cas, la possibilité pour le juge de réduire ou de supprimer ce délai. La bonne foi est une notion toujours appréciée au cas par cas par le juge, étant précisé qu'elle est présumée. Il convient de souligner par ailleurs que si l'indélicatesse de certains locataires malhonnêtes est avérée, ces derniers ne représentent qu'une minorité de locataires en situation d'impayés. En outre, la Cour de cassation considère que la bonne foi est une notion évolutive, et que la déloyauté d'un débiteur peut n'être qu'occasionnelle. En effet, certains ménages en difficulté « perdent pied » dans la gestion du budget et finissent par ne plus rien payer sans pour autant faire preuve de mauvaise foi. Enfin, s'agissant des cas de fausses déclarations ou de falsifications de documents avérées, mentionnés dans la question, selon l'article 441-1 du code pénal, « constitue un faux toute altération frauduleuse de la vérité, de nature à causer un préjudice et accomplie par quelque moyen que ce soit, dans un écrit ou tout autre support d'expression de la pensée qui a pour objet ou qui peut avoir pour effet d'établir la preuve d'un droit ou d'un fait ayant des conséquences juridiques. Le faux et l'usage de faux sont punis de trois ans d'emprisonnement et de 45 000 euros d'amende ». En conséquence, le bailleur, s'il est en mesure de prouver la fraude, peut également porter plainte contre son locataire indélicat. Soucieux de faire progresser l'ensemble des rapports entre bailleurs et locataires, le Gouvernement lancera avant la fin de l'année 2012 une large concertation avec toutes les parties prenantes pour voir comment améliorer ces rapports en sécurisant mieux les locataires et les propriétaires.
Auteur : M. Franck Riester
Type de question : Question écrite
Rubrique : Baux
Ministère interrogé : Égalité des territoires et logement
Ministère répondant : Égalité des territoires et logement
Dates :
Question publiée le 10 juillet 2012
Réponse publiée le 16 octobre 2012