maladies professionnelles
Question de :
Mme Dominique Nachury
Rhône (4e circonscription) - Les Républicains
Mme Dominique Nachury appelle l'attention de Mme la ministre des affaires sociales et de la santé sur une étude publiée le 22 janvier 2014 laquelle il ressort que plus de 3 millions d'actifs ont un risque élevé de « burn-out ». Technologia, cabinet d'experts auteurs de cette enquête, s'est fondé sur un sondage mené auprès de 1 000 actifs. Il en ressort que 12,6 % d'entre eux encourent un burn-out, ce qui, rapporté à l'ensemble de la population, porte le nombre de personnes concernées à 3,2 millions d'actifs. Ce cabinet d'experts, qui est notamment intervenu chez France Télécom après la vague de suicides de 2008-2009, relève que le risque de burn-out, caractérisé par un travail excessif et compulsif, est particulièrement élevé chez les agriculteurs (23,5 %), devant les artisans, commerçants et chefs d'entreprise (19,7 %) et les cadres (19 %). Viennent ensuite les ouvriers (13,2 %), les professions intermédiaires (9,8 %) et les employés (6,8 %). Cette affection touche des personnes sans antécédents psychiques et les pathologies « ne concernent que la sphère professionnelle ». Toujours selon Technologia, le lien « direct et essentiel » avec le travail est établi. Or le cabinet note que ces affections sont « très difficilement reconnues » vu l'imprécision de la définition clinique de ce syndrome et l'absence de tableaux de maladies professionnelles spécifiques. À l'heure actuelle, le burn-out peut être reconnu au titre de l'article L. 461-1 du code de la sécurité sociale, mais uniquement si la maladie justifie une incapacité permanente de travail de plus de 25 % et si un lien « direct et essentiel » avec le travail a été mis en évidence par un comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles. Ainsi, seules quelques dizaines de cas sont reconnus chaque année. Technologia a donc lancé un appel « appel-burnout.fr » pour la reconnaissance par la sécurité sociale du « burn-out » par la création de trois nouveaux tableaux de maladies professionnelles : dépression d'épuisement, état de stress répété et anxiété généralisée. Ce cabinet avait déjà été à l'origine d'un appel visant à créer un observatoire du suicide, alors que la France affiche l'un des taux les plus élevés en Europe (plus de 10 000 par an). Cet appel avait été suivi d'effet puisqu'en septembre 2013 le Gouvernement avait lancé son observatoire national du suicide. C'est pourquoi elle souhaiterait connaître aujourd'hui les intentions du Gouvernement dans ce domaine.
Réponse publiée le 29 décembre 2015
Les pathologies psychiques telles que le burn out peuvent être reconnues d’origine professionnelle par les comités régionaux de reconnaissance des maladies professionnelles (CRRMP). Afin d’améliorer la reconnaissance des maladies professionnelles, la loi no 93-121 du 27 janvier 1993 a en effet instauré, en complément du système de tableaux, une procédure de reconnaissance par les CRRMP fondée sur une expertise individuelle. Cette procédure intervient notamment lorsqu’il est établi qu’une maladie, non désignée dans un tableau, est essentiellement et directement causée par le travail habituel de la victime et qu’elle entraîne le décès de celle-ci ou une incapacité permanente d’un taux au moins égal à 25 % (article L. 461-1 alinéa 4 du code de la sécurité sociale). Une reconnaissance de ces pathologies dans le cadre du système des tableaux de maladies professionnelles apparaît en effet inadaptée, compte tenu de la difficulté pour ces pathologies de fixer les critères (désignation de la maladie, délai de prise en charge, liste des travaux) prévus par le législateur afin de permettre une reconnaissance par présomption d’origine. Dans le souci de mieux prendre en charge les pathologies psychiques, la commission spécialisée relative aux pathologies professionnelles du conseil d’orientation sur les conditions de travail (COCT) a créé le 9 avril 2010 un groupe de travail sur les pathologiques psychiques d’origine professionnelle. Ce groupe avait pour mandat de réaliser une typologie descriptive des pathologies d’origine psychique susceptibles d’être examinées par les CRRMP ; de préciser, pour ces pathologies, les critères de stabilisation permettant de fixer un taux d’incapacité permanente et de définir le niveau de gravité à partir duquel il est possible de fixer un taux d’incapacité permanente au moins égal à 25 % ; de formuler des recommandations afin d’aider les CRRMP à apprécier le lien entre ces pathologies et l’activité professionnelle et, enfin, d’examiner d’autres voies d’amélioration de la prise en charge des pathologies psychiques liées à l’activité professionnelle. Le rapport final du groupe de travail a été présenté lors de la réunion de la commission spécialisée relative aux pathologies professionnelles du 3 mai 2012. Les recommandations aux CRRMP qu’il comprend ont été intégrées au guide destiné aux membres des CRRMP. Concernant l’amélioration de la prise en charge des pathologies psychiques, il a ainsi été demandé aux caisses d’assurance maladie, sur proposition du groupe du travail, de retenir une interprétation souple de l’article L. 461-1 alinéa 4 permettant de fixer un taux d’incapacité « prévisible » à la date de la demande sans exiger que l’état de la victime soit stabilisé (lettre ministérielle du 13 mars 2012). Le groupe de travail a par ailleurs récemment émis des recommandations sur les documents nécessaires à l’évaluation du lien de causalité entre une affection psychique et les conditions de travail par les CRRMP. Ce document, pragmatique, précise le contenu et l’intérêt de chacune des sources d’information (en provenance du demandeur et de son employeur, du médecin-conseil de la sécurité sociale et du médecin du travail) à disposition des CRRMP afin d’apprécier ce lien de causalité. Ces recommandations ont été diffusées par la Caisse nationale d’assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS) à l’ensemble de son réseau (CPAM, CARSAT et médecins conseils) par circulaire du 12 juin 2014. Ces mesures ont permis d’améliorer la reconnaissance des pathologies psychiques comme maladies professionnelles, puisqu’a été constaté un quadruplement du nombre de reconnaissances entre 2012 et 2014 : 90 reconnaissances en 2012, 239 en 2013, 339 en 2014. Le lien direct et essentiel entre la pathologie et l’activité professionnelle a été reconnu dans 47 % des situations. Le Gouvernement souhaite poursuivre l’action ainsi entreprise. L’article 27 de la loi no 2015-994 du 17 août 2015 relative au dialogue social et à l’emploi inscrit à cet effet le principe de la reconnaissance des pathologies psychiques par les CRRMP au niveau de la loi et prévoit l’instauration de modalités spécifiques de traitement pour ces dossiers. Des modalités adaptées, comme l’appui en tant que de besoin d’un médecin psychiatre, seront prochainement précisées par décret. Sur cette question, la priorité du Gouvernement reste le renforcement de la prévention. C’est pourquoi les risques psychosociaux (RPS) sont inscrits comme risque prioritaire dans le troisième Plan santé au travail (PST3). La caisse nationale d’assurance vieillesse des travailleurs salariés (CNAMTS) s’est par ailleurs engagée avec l’Etat, dans le cadre de sa convention d’objectif et de gestion 2014-2017, à rationaliser l’offre globale en matière de prévention des RPS tant au plan national qu’au plan local afin d’éviter les redondances parfois observées. Elle s’appuiera sur l’Institut national de recherche et de sécurité (INRS) pour piloter ces évolutions. Au niveau régional, des interventions coordonnées, notamment avec le réseau des associations régionales pour l’amélioration des conditions de travail (ARACT) et les services de santé au travail, seront mises en œuvre.
Auteur : Mme Dominique Nachury
Type de question : Question écrite
Rubrique : Risques professionnels
Ministère interrogé : Affaires sociales et santé
Ministère répondant : Affaires sociales, santé et droits des femmes
Dates :
Question publiée le 4 février 2014
Réponse publiée le 29 décembre 2015