Question de : Mme Virginie Duby-Muller
Haute-Savoie (4e circonscription) - Les Républicains

Les retards de paiement entre entreprises se sont de nouveau aggravés en 2013 et seront vraisemblablement de nouveau cette année encore à l'origine de faillites évitables. Aussi, alors qu'un nouveau rapport de l'Observatoire annuel des délais de paiement vient d'être remis à M. le ministre de l'économie et des finances, Mme Virginie Duby-Muller l'interroge sur les mesures qu'il compte prendre pour lutter contre ce fléau de l'économie française qui prive les PME et ETI de 12 milliards d'euros de trésorerie nette par an. Elle lui demande également si, afin de donner un signal fort, il ne serait pas intéressant de réduire le délai légal à trente jours et de faire en sorte que le respect de délai de paiement devienne une contrainte légale a priori des entreprises en faisant par exemple figurer la facturation des intérêts de retard parmi les obligations comptables sous peine de ne pas voir ses comptes certifiés. Enfin, l'État ne pourrait-il pas après quelques mois d'impayés par exemple se porter créancier par substitution auprès des mauvais payeurs ce qui serait dissuasif ? Elle l'interroge sur ces propositions d'action peut-être plus efficaces qu'une nouvelle « instance de conciliation ».

Réponse publiée le 17 février 2015

Les entreprises débitrices sont souvent tentées de recourir prioritairement au crédit interentreprises (délais de paiement que les entreprises s'accordent entre elles dans le cadre de leurs relations commerciales d'achat et de vente), source de financement gratuite, et de différer, parfois à l'excès, le paiement de leur dette. Ces retards de paiement sont préjudiciables à la compétitivité et à la rentabilité des entreprises créancières parce qu'ils leur imposent d'obtenir des financements de court terme auprès de leur banque. Les délais de paiement constituent donc un enjeu important pour le financement des entreprises. La Cour des comptes, dans son rapport public thématique sur l'État et le financement de l'économie, publié en juillet 2012 estime que la loi n° 2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l'économie (LME), en introduisant le principe d'un plafonnement des délais de paiement convenus entre les parties à 45 jours fin de mois ou 60 jours date d'émission de la facture, a permis une amélioration conjoncturelle des délais de paiement. Le rapport de l'observatoire des délais de paiement de 2013 fait état d'une légère réduction des délais de paiement moyen en 2012 : 43,7 jours pour les délais clients (44,3 en 2011), 52 jours pour les délais fournisseurs (54 jours en 2011). La France est ainsi dans une situation intermédiaire en Europe (entre les pays nordiques ou anglo-saxons : entre 30 et 40 jours selon les pays) et les pays du sud (85 jours en Espagne, 96 jours en Italie). Pour favoriser une nouvelle réduction des délais de paiement moyens, le Gouvernement a annoncé le 6 novembre 2012 dans le « pacte national pour la croissance, la compétitivité et l'emploi » et dans le plan « pour le renforcement de la trésorerie des entreprises », sa ferme volonté de lutter contre l'allongement des délais de paiement. L'un des axes principaux de cette politique est le renforcement de l'efficacité de la loi pour réduire les délais de paiement. Dans ce cadre, le ministre chargé de l'économie a fait du contrôle des délais de paiement une mission prioritaire de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) et a fixé l'objectif d'effectuer au moins 2 500 contrôles en 2014. Pour renforcer l'efficacité de ces contrôles, la loi n° 2014-344 du 17 mars 2014 relative à la consommation a inséré dans le code de commerce de nouvelles dispositions visant à lutter contre les délais de paiement abusifs. Ces dispositions sont entrées en vigueur le lendemain de la publication de la loi. Un nouveau pouvoir est ainsi conféré à l'administration, qui lui permettra d'enjoindre au professionnel de se conformer à ses obligations ou de cesser tout agissement illicite. L'administration est aussi dotée d'un pouvoir de sanction renforcé pour sanctionner plus strictement les retards de paiement par le prononcé d'amendes administratives, en remplacement des sanctions civiles et pénales auparavant en vigueur. Le dispositif prévu permettra aux services chargés de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, après constat, par procès-verbal des agents habilités, d'un manquement aux règles relatives aux délais de paiement, de prononcer une amende administrative, dont le montant maximum sera de 75 000 € pour une personne physique et de 375 000 € pour une personne morale. La procédure préalable au prononcé des amendes sera contradictoire et permettra à l'entreprise concernée de présenter ses observations. Les sanctions prononcées seront soumises au contrôle du juge administratif. L'article 123 de la loi n° 2014-344 du 17 mars 2014 relative à la consommation a aussi modifié l'article L. 441-6- 1 du code de commerce, afin d'imposer des obligations supplémentaires de transparence aux entreprises et de confier aux commissaires aux comptes un rôle d'alerte du ministre chargé de l'économie des retards de paiement répétés et significatifs. Le nouvel article L. 441-6-1 du code de commerce précise désormais que l'information à fournir concerne cumulativement les dettes fournisseurs et les créances clients et donne pour mission au commissaire aux comptes d'attester de la sincérité et de la fiabilité des informations produites. Cette disposition doit être précisée au niveau réglementaire, notamment afin que soit améliorée la qualité des informations publiées sur les délais de paiement, pour que celles-ci soient plus fidèles à la réalité du comportement de l'entreprise tout au long de l'année concernée. A ce sujet, plusieurs fédérations professionnelles concernées sont pleinement associées aux travaux de rédaction du décret d'application. Ainsi, un renforcement du dispositif de sanctions en cas de dépassement des plafonds légaux ainsi qu'une modification des modalités de contrôle des commissaires aux comptes pour les entreprises soumises à l'obligation de certification de leurs comptes, tel que prévu par la loi relative à la consommation de 2014, ont paru être adapté au diagnostic de la situation des délais de paiement en France. En revanche, la réduction générale des délais de paiement à 30 jours constituerait une contrainte supplémentaire sur la trésorerie des entreprises, y compris les très petites entreprises et les petites et moyennes entreprises. En outre, cette réduction des délais de paiement à 30 jours et son application indépendamment des spécificités de chaque secteur économique pourrait être à l'origine de difficultés.

Données clés

Auteur : Mme Virginie Duby-Muller

Type de question : Question écrite

Rubrique : Entreprises

Ministère interrogé : Économie et finances

Ministère répondant : Commerce, artisanat, consommation et économie sociale

Dates :
Question publiée le 25 février 2014
Réponse publiée le 17 février 2015

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