intérieur : personnel
Question de :
M. Élie Aboud
Hérault (6e circonscription) - Les Républicains
M. Élie Aboud alerte M. le ministre de l'intérieur sur les moyens à la disposition de la police judiciaire. Les syndicats dénoncent l'inflation législative. Ou plutôt, ils se plaignent de ne pas disposer des moyens nécessaires pour mettre en place les décisions législatives. Ainsi, les parlementaires votent des lois non mises en application puisque la police judiciaire ne dispose pas des équipements nécessaires à leur effectivité. Et quand bien même, les réformes seraient appliquées, les moyens manquent pour les évaluer. On ne peut demander à la police judiciaire de s'adapter aux réformes successives et de juger de l'efficacité des dites réformes, si elle n'en a pas la capacité matérielle. C'est pourquoi il lui demande de bien vouloir lui préciser l'état de sa réflexion à cet égard.
Réponse publiée le 9 juin 2015
Lutter contre les formes les plus violentes et les plus organisées de criminalité constitue une priorité du ministère de l'intérieur, qui incombe à titre principal à la direction centrale de la police judiciaire et à la direction de la police judiciaire de la préfecture de police de Paris. Pour faire face aux défis d'une criminalité innovante, violente, et souvent transfrontière, il est indispensable que les services de police judiciaire disposent, comme l'ensemble des forces de police et de gendarmerie, des moyens de travailler efficacement. De ce point de vue, il doit être rappelé que, dans un contexte budgétaire pourtant contraint par la nécessaire maîtrise des dépenses publiques, d'importants efforts sont consentis pour renforcer les moyens humains. Après les 13 700 suppressions d'emplois de policiers et de gendarmes décidées dans le cadre de la révision générale des politiques publiques, 500 emplois supplémentaires de policiers et de gendarmes sont désormais créés chaque année, et tous les départs à la retraite sont remplacés poste pour poste. Par ailleurs, les crédits de fonctionnement et d'investissement des forces de sécurité de l'Etat ont été préservés en 2014 et 2015 et sont même en augmentation pour la première fois depuis plusieurs années. Pour autant, l'efficacité des politiques publiques ne saurait en tout état de cause dépendre des seuls moyens. Les organisations, les stratégies et les modes d'action sont aussi importants. Il en est de même des moyens juridiques, et de ce point de vue le législateur a voté des textes importants pour le travail des services d'enquête (loi du 21 décembre 2012 relative à la sécurité et à la lutte contre le terrorisme, loi du 28 mars 2014 relative à la géolocalisation, loi du 13 novembre 2014 renforçant les dispositions relatives à la lutte contre le terrorisme). Tout est fait pour optimiser les organisations et les méthodes, pour les adapter chaque fois que nécessaire aux évolutions de la criminalité et à ses spécificités territoriales. Il en est ainsi pour la police judiciaire comme pour l'ensemble des forces de police et de gendarmerie. De nouvelles stratégies et des moyens supplémentaires ont ainsi été mis en oeuvre dans les secteurs les plus fortement exposés à la délinquance, notamment à Marseille, mais également en Corse avec la création d'une brigade nationale de lutte contre la criminalité organisée corse au sein de la direction centrale de la police judiciaire. Une impulsion nouvelle a été donnée à la lutte contre plusieurs formes graves de criminalité, menée en particulier par les services de la direction centrale de la police judiciaire et de la préfecture de police de Paris : cambriolages et vols à main armée, avec la mise en oeuvre d'un plan d'action national spécifique depuis septembre dernier ; trafic de drogue, avec par exemple la création au cours des dernières années d'antennes de l'Office central pour la répression du trafic illicite de stupéfiants à Lille, Marseille, Fort-de-France et Bordeaux (qui dispose d'un détachement à Bayonne). Face aux cybermenaces croissantes pour les particuliers comme pour les entreprises et les services publics, une sous-direction dédiée à la lutte contre la cybercriminalité a récemment été créée au sein de la direction centrale de la police judiciaire. Au regard des enjeux de justice et de cohésion sociale qui s attachent à la lutte contre la fraude fiscale et la corruption, les moyens de la police judiciaire ont été renforcés avec la création d'un Office central de lutte contre la corruption et les infractions financières et fiscales. Les liens avec l'autorité judiciaire, particulièrement essentiels dans le domaine de la police judiciaire, ont également été resserrés pour assurer la cohérence et l'efficacité de la chaîne pénale. Par ailleurs, il doit être souligné que dans le cadre des mesures exceptionnelles pour lutter contre la menace terroriste annoncées par le Premier ministre le 21 janvier dernier, il a été décidé, au titre du renforcement des moyens humains des services chargés de la lutte contre le terrorisme, de créer 106 emplois supplémentaires au sein de la direction centrale de la police judiciaire au cours des trois prochaines années (2015-2017). Il doit également être rappelé que, dans le cadre de la nouvelle architecture de présentation statistique et de pilotage de l'activité mise en place en 2013, de nouveaux indicateurs ont été créés, notamment un agrégat consacré à la grande criminalité afin de suivre, dans la durée, les crimes et délits les plus graves (homicides, règlements de comptes, grands trafics de stupéfiants). Cette nouvelle rubrique permet de rendre compte de l'acticité des services face à cette délinquance, puisque la plupart des faits qui y sont recensés proviennent de l'initiative des policiers et des gendarmes. La hausse de la « grande criminalité » en 2014 (+ 6 %) témoigne ainsi de l'engagement des forces de sécurité. Cette réforme s'est aussi traduite par la mise en place de nouveaux indicateurs d'activité et d'efficacité. Ils font, par exemple, apparaître une hausse de près de 3,48 % du taux d élucidation des homicides en 2014 et une augmentation de 6 % du taux d'élucidation des vols à main armée cette même année. Ces nouveaux outils sont autant de moyens d'évaluation et de pilotage, indispensables aussi bien pour assurer une direction efficace des services que pour en garantir une gestion optimale. Si ces indicateurs permettent de mesurer, d'évaluer et d'orienter l'activité, et s'il va de soi qu'il revient aux départements ministériels, grâce aux outils dont ils disposent (outils statistiques, réseau des services déconcentrés), d'évaluer l'efficacité de leur action, il convient également de rappeler, concernant le jugement « de l'efficacité des dites réformes » évoqué dans la question écrite, que l'évaluation de la loi, votée par le Parlement, appartient aussi au Parlement qui est chargé en application de l'article 24 de la Constitution d'évaluer les politiques publiques.
Auteur : M. Élie Aboud
Type de question : Question écrite
Rubrique : Ministères et secrétariats d'état
Ministère interrogé : Intérieur
Ministère répondant : Intérieur
Dates :
Question publiée le 24 juin 2014
Réponse publiée le 9 juin 2015