Question de : M. Alain Bocquet
Nord (20e circonscription) - Gauche démocrate et républicaine

M. Alain Bocquet attire l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur les conséquences de la loi relative à la répartition des contentieux et à l'allègement des procédures qui supprime la juridiction de proximité à compter du 1er janvier 2013. Les juges de proximité maintenus, mais désormais rattachés aux tribunaux de grande instance, ne traiteront donc plus la part importante du contentieux civil autrefois dévolue aux juges d'instance qui leur avait été déléguée. Le syndicat de la magistrature est préoccupé par les conséquences du transfert aux juges d'instance de ce contentieux. La refonte de la carte judiciaire a déjà abouti à la suppression de près de la moitié des tribunaux d'instance et s'est accompagnée de pertes d'effectifs, alourdissant la tâche des magistrats contraints de parcourir des distances toujours plus longues pour assurer leurs missions de proximité, au premier rang desquelles celle du juge des tutelles. Ces missions ont été accrues de manière considérable par la loi du 5 mars 2007 prescrivant la révision obligatoire de toutes les mesures prises avant le 1er janvier 2009, ainsi que celle des nouvelles mesures, dont la durée initiale ne peut excéder cinq ans et en renforçant les droits de la personne protégée, entrée en vigueur à effectifs constants voire réduits. Le syndicat de la magistrature souligne qu'en contrepartie le nombre de demandes de mesures de protection est passé de 137 954 en 2007 à 181 279 en 2010. La Cour des comptes, dans un rapport du 1er février 2012, conclut qu'au vu de la situation des tribunaux « la personnalisation des mesures est difficile à mettre en oeuvre, que les délais sont accrus et que les retards s'accumulent ; qu'il n'est pas certain que les renouvellements systématiques pourront être faits dans les délais prévus par la loi ». Elle précise qu'il convient « de prendre en compte, dans les conséquences sur la situation des majeurs protégés, les risques de caducité des mesures qui n'auraient pas été révisées ». L'échéance de caducité des mesures de tutelle non révisées étant prévue pour le 31 décembre 2013, l'inquiétude est grande et les conséquences seraient dramatiques pour des milliers de personnes fragilisées et malades. Dans ce contexte, la nécessité pour les juges d'instance de reprendre le contentieux civil traité par les juges de proximité, sans effectif supplémentaire, n'est pas concevable, les juges d'instance étant très souvent intégrés dans le service général de ces juridictions afin de colmater les brèches découlant de la politique de recrutement menée ces dernières années. Il lui demande les prolongements que le Gouvernement entend apporter aux légitimes revendications du syndicat de la magistrature et de prendre toutes mesures pour procéder aux recrutements nécessaires.

Réponse publiée le 15 janvier 2013

La loi n° 2011-1862 du 13 décembre 2011 relative à la répartition des contentieux et à l'allègement de certaines procédures juridictionnelles prévoyait la suppression des juridictions de proximité à compter du 1er janvier 2013. En application de cette loi, les juges d'instance devaient se trouver déchargés du contentieux des injonctions de payer au-delà du seuil de 4 000 euros et se voir affecter l'ensemble du contentieux en matière civile relevant du tribunal d'instance. La création de 110 emplois de juge d'instance aurait été nécessaire pour absorber l'ensemble de ce transfert de charge. L'Assemblée nationale a adopté à l'unanimité le 12 décembre 2012, et dans les mêmes termes que le Sénat qui l'avait adoptée le 23 novembre 2012, la proposition de loi dont l'objet est de reporter au 1er janvier 2015 la suppression des juridictions de proximité et les modifications de compétences confiées aux juges de proximité par les articles 1 et 2 de la loi du 13 décembre 2011 précitée. La promulgation de cette loi neutralisera donc dans l'immédiat les incidences en termes d'effectifs de juges d'instance, lesquels conserveront leurs attributions actuelles et n'auront pas à traiter du contentieux de proximité. La période transitoire qui va ainsi s'ouvrir permettra d'aborder la place et le rôle des juges de proximité dans l'organisation judiciaire et de mener une réflexion d'ensemble sur l'organisation de la justice de première instance, comme l'avait souhaité le président de la République. A cette fin, la garde des sceaux a mis en place deux groupes de travail avec la direction des services judiciaires chargés, pour le premier, de réfléchir aux missions confiées notamment aux juges de proximité et, pour le second, de faire des propositions sur l'organisation judiciaire notamment de première instance. Concernant l'application de la loi du 5 mars 2007 portant l'exigence d'une révision des mesures de protection, la garde des sceaux a annoncé qu'elle prendrait l'initiative si nécessaire d'un projet de loi portant report de son entrée en vigueur au 1er janvier 2014 afin d'assurer une parfaite sécurité juridique des mesures de tutelles. D'après l'évaluation effectuée par les services de la chancellerie, 75 % des mesures devraient être renouvelées au 31 décembre 2012 grâce au travail substantiel mené par les juridictions concernées.

Données clés

Auteur : M. Alain Bocquet

Type de question : Question écrite

Rubrique : Justice

Ministère interrogé : Justice

Ministère répondant : Justice

Dates :
Question publiée le 10 juillet 2012
Réponse publiée le 15 janvier 2013

partager