Question de : M. Patrice Carvalho
Oise (6e circonscription) - Gauche démocrate et républicaine

M. Patrice Carvalho attire l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur les procédures engagées par les victimes de l'amiante à propos des responsabilités pénales des entreprises qui les ont employées. Le tribunal de Turin a condamné en février 2012 deux dirigeants de la société Eternit en Italie à des peines de prison et à verser des indemnisations conséquentes à plus de 6 000 victimes italiennes de l'amiante et leurs familles. Ce procès a ouvert une brèche et a constitué un espoir pour les victimes françaises qui attendent un tel jugement pénal depuis des années, notamment depuis le dépôt des premières plaintes en 1996. À l'exemple italien, les obstacles à la tenue d'un procès pénal de l'amiante dans notre pays doivent être levés et il convient de donner les moyens à la justice française de mener les enquêtes nécessaires. Il rappelle que l'atteinte à la santé par l'amiante est avérée depuis de nombreuses années et que les employeurs avaient une parfaite connaissance des risques encourus. Après l'arrêt de la Cour de cassation du 26 juin 2012 qui a cassé l'arrêt de la cour d'appel de décembre 2011 qui avait prononcé l'annulation des mises en examen de la société Eternit, il lui demande les évolutions que le Gouvernement envisage de donner à ce dossier afin que les victimes et leurs familles puissent espérer voir aboutir un procès pénal en France.

Réponse publiée le 25 décembre 2012

Il importe à la garde des sceaux que les procédures judiciaires engagées à la suite de la contamination de personnes au contact de l'amiante soient traitées avec toute l'efficacité et toute la célérité requises, de manière à aboutir dans les meilleurs délais à une solution juridiquement incontestable et humainement compréhensible. Si plusieurs informations judiciaires sont en cours, l'organisation en France d'un « grand procès de l'amiante », à l'image de celui qui s'est tenu récemment en Italie, ne peut être envisagée en l'état. En effet, il semble difficile, compte tenu de l'absence de lien de connexité entre les différentes procédures en cours, d'ordonner une jonction de l'ensemble des dossiers. Il n'existe pas une affaire mais de multiples affaires d'amiante. Si la substance incriminée est la même, les affaires sont nettement distinctes au regard de la diversité des types d'expositions, des périodes de faits et des sites concernés, ainsi que de l'état d'avancement des dossiers qui, pour certains, sont atteints par la prescription de l'action publique et qui, pour d'autres, ont déjà fait l'objet de jugements. Ainsi, à supposer qu'une jonction des procédures soit juridiquement possible, ce regroupement risquerait de retarder l'issue des procédures en cours, ce qui ne peut répondre aux souhaits des victimes. L'impossibilité juridique de tenir ce grand procès n'enlève cependant rien aux importants moyens mis en oeuvre, dans un souci de bonne administration de la justice, pour aboutir au traitement des plaintes déposées par les victimes de l'amiante, et que la garde des sceaux entend renforcer. Ainsi, le pôle de santé publique de Paris, lequel regroupe la majorité des dossiers ouverts en cette matière, a vu depuis son installation au 1er septembre 2003, augmenter ses moyens de manière constante. Initialement trois, les magistrats instructeurs affectés à ce Pôle sont désormais au nombre de cinq depuis le mois de septembre 2012, de même que les assistants spécialisés (deux médecins inspecteurs de santé publique, un pharmacien et un vétérinaire) rejoints également en septembre 2012 par un inspecteur du travail, dont la compétence technique pourra être particulièrement mise à profit dans ces dossiers. En outre, l'Office central de lutte contre les atteintes à l'environnement et à la santé publique, principal service d'enquête saisi sur ce contentieux et au sein duquel a été créée une « cellule amiante » spécialement dédiée, s'est également vu doter en septembre 2012 d'une dizaine de gendarmes supplémentaires. Pour autant, malgré les moyens importants engagés dans ces procédures, le traitement de ces dossiers complexes, tant en fait qu'en droit, reste particulièrement lourd. S'agissant du dossier Eternit, le principe constitutionnel d'indépendance des magistrats du siège interdit au garde des sceaux de commenter la décision rendue par la cour de cassation le 26 juin dernier. Conformément aux orientations définies dans la circulaire de politique pénale du 19 septembre 2012, l'intervention du garde des sceaux dans les procédures en cours ne saurait consister en des instructions individuelles adressées aux parquets. En revanche, les instructions générales données dans le domaine du traitement du contentieux de l'amiante conservent toute leur pertinence, en particulier celles tendant des regroupements de procédures lorsque ceux-ci sont possibles, dans le souci d'une bonne administration de la justice.

Données clés

Auteur : M. Patrice Carvalho

Type de question : Question écrite

Rubrique : Risques professionnels

Ministère interrogé : Justice

Ministère répondant : Justice

Dates :
Question publiée le 16 octobre 2012
Réponse publiée le 25 décembre 2012

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