Question de : M. Jean-Louis Christ
Haut-Rhin (2e circonscription) - Les Républicains

M. Jean-Louis Christ appelle l'attention de Mme la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie sur les conclusions d'un rapport d'enquête du Fonds international pour la protection des animaux (IFAW), consacré au commerce en ligne des animaux sauvages. Cette enquête a porté sur une durée de 6 semaines en 2014 et a couvert 280 sites de ventes en ligne dans 16 pays. Elle a permis de recenser plus de 33 000 spécimens (animaux vivants, parties de corps et produits dérivés) d'espèces sauvages menacées, inscrites aux annexes I et II de la Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d'extinction (CITES), mis en vente par près de 10 000 annonceurs, pour un montant avoisinant les 8 millions d'euros. Les ivoires, les reptiles et les oiseaux étaient les « objets » les plus fréquemment proposés. Considérant l'ampleur de ce phénomène et les difficultés liées à la fois à son contrôle et à la capacité juridique de poursuivre les contrevenants, il lui demande quelles mesures le Gouvernement entend adopter pour faire appliquer, dans le domaine de la commercialisation sur internet, la réglementation sur la protection des animaux sauvages.

Réponse publiée le 7 juillet 2015

Depuis bientôt 40 ans, la convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d'extinction, dite CITES, encadre les mouvements transfrontaliers de plusieurs dizaines de milliers d'espèces animales et végétales au moyen de permis certifiant que chaque transaction ne porte pas préjudice à l'état de conservation de l'espèce considéré et concerne des spécimens dont l'acquisition licite a été dûment établie. Douze millions de transactions ont ainsi été enregistrées sur la base des rapports nationaux transmis par les États parties à la CITES. Ce commerce licite et strictement encadré représente au plan mondial plus de 500 millions de dollars par an et une partie de ces transactions légales s'effectue par l'intermédiaire d'internet. Toutefois, ce vecteur est également utilisé par des négociants peu scrupuleux et a facilité l'extension des trafics. Il convient donc d'apporter un soin tout particulier à la surveillance du commerce en ligne. La réglementation actuelle qui encadre le commerce des spécimens d'espèces sauvages s'applique quel que soit le support technique utilisé pour la mise en vente et concerne donc d'ores et déjà le commerce en ligne (Cass. crim. 12 janvier 2010, n° 09-82138). S'agissant des espèces les plus menacées, la mise en vente des spécimens est subordonnée dans l'Union européenne à l'obtention préalable d'un certificat autorisant spécifiquement cette vente. Pour les antiquités dérogeant à l'obligation de certificat, la réglementation en vigueur prévoit que le vendeur soit en mesure d'apporter la démonstration de l'ancienneté de l'objet. S'agissant enfin d'espèces moins menacées, cette réglementation impose que le vendeur soit en mesure de démontrer la preuve d'acquisition ou d'importation licite dans l'Union européenne. De même, les actions des services de contrôle à l'expédition et à la réception des marchandises sont mises en oeuvre de la même manière, que celles-ci aient été achetées sur internet ou commandées par des moyens plus traditionnels. Le projet de loi pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages qui a été débattu au Parlement prévoit que les amendes encourues en cas d'infraction simple soient décuplées (passage de 15 000 à 150 000 euros) et multipliées par cinq en cas de trafic en bande organisée (passage de 150 000 à 750 000 euros). La circulaire du 16 décembre 2013 relative aux trafics d'espèces protégées appelle d'ores et déjà l'attention des procureurs sur la nécessité d'apporter une réponse pénale à la hauteur des enjeux. Dans le cadre du plan national d'actions « lutte contre le braconnage d'éléphants et contre le trafic d'ivoire et d'autres espèces protégées », les pouvoirs des officiers de police judiciaire seront considérablement renforcés. Un nouvel article du code pénal permet d'ores et déjà l'emploi de certaines techniques spéciales d'enquête, entre autres l'infiltration et la captation de données informatiques, pour certaines infractions commises en bande organisée. Le ministère de l'intérieur a, en ce qui le concerne, mis en place plusieurs dispositifs de veille spécialisés en cybercriminalité. Leur champ d'action est large et englobe le commerce illicite de spécimens CITES. L'Office central de lutte contre les atteintes à l'environnement et la santé publique dispose d'une équipe spécialement chargée de la lutte contre le commerce illicite des espèces menacées, d'une équipe de cyber-enquêteurs (dont une partie de l'activité est dédiée au commerce illicite en ligne des espèces menacées), ainsi que d'un conseiller technique mis à disposition à temps plein par l'Office national de la chasse et de la faune sauvage (ONCFS). Un groupe d'enquêteurs financiers et un groupe d'enquêteurs spécialistes de la coopération policière internationale concourent également à ce type d'enquêtes. Un site web dédié et doté d'une connexion sécurisée doit être créé prochainement sous l'égide d'interpol pour faciliter le partage au plan international des informations sur les tendances du commerce sur internet, les méthodes d'expédition et les codes de bonne conduite. Une meilleure implication des principaux acteurs et des fournisseurs de services internet a d'ores et déjà pu être obtenue grâce à des codes de bonne conduite et des dispositifs visant à mieux contrôler l'usage qui est fait de leur plate-forme d'échanges. Toutefois, selon une jurisprudence constante, l'opérateur (hébergeur, fournisseur d'accès, fournisseur de service...) n'est pas responsable pénalement, sauf s'il n'a pris aucune mesure appropriée suite à un signalement précis, circonstancié et ponctuel (retrait de la petite annonce, mise hors ligne du site web, etc.). L'opportunité de prévoir des évolutions réglementaires dans ce domaine, lesquelles ne relèvent pas de la seule compétence du ministère en charge de l'écologie, pourra être examinée par le comité national CITES de coordination interservices qui doit être mis en place dans le cadre du plan national susmentionné. La France préconise au plan européen une mise en cohérence de la nomenclature douanière internationale avec les annexes de la convention de Washington, ainsi que le développement de mécanismes de coopération internationale permettant de réaliser des livraisons contrôlées pour lutter contre les trafics d'espèces protégées. Pour une meilleure information des usagers concernant leurs obligations en tant que vendeurs et acheteurs de ces spécimens, le site internet du ministère de l'écologie vient d'être mis à jour afin de dispenser au plus grand nombre une information à la fois détaillée, précise et complète sur les règles et procédures applicables à ce commerce. Le volume considérable du trafic de l'ivoire qui menace désormais directement la survie de certaines populations d'éléphants est préoccupante. Le ministère soutient donc activement toute action de nature à réduire ce fléau, et notamment les initiatives en faveur de la réduction de la demande. C'est pourquoi il a été décidé de mettre un terme à toutes les exportations d'ivoire brut, et cela même si les certificats CITES délivrés jusqu'à présent par la France ne concernaient que des défenses d'éléphants dont l'ancienneté sur le territoire européen était dûment établie. La France invite les autres États membres de l'Union européenne à faire de même.

Données clés

Auteur : M. Jean-Louis Christ

Type de question : Question écrite

Rubrique : Ventes et échanges

Ministère interrogé : Écologie, développement durable et énergie

Ministère répondant : Écologie, développement durable et énergie

Dates :
Question publiée le 10 février 2015
Réponse publiée le 7 juillet 2015

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