économie, industrie et numérique : personnel
Question de :
M. Olivier Dussopt
Ardèche (2e circonscription) - Socialiste, écologiste et républicain
M. Olivier Dussopt alerte M. le ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique sur la situation des agents du groupe La Poste et du groupe Orange (anciennement France Télécom) qui avaient décidé en 1993 de conserver leur grade initial de fonctionnaire et de refuser les nouvelles grilles de classification. Ces agents dits « reclassés » seraient un peu plus de 6 000 aujourd'hui dans les deux entreprises. Sur le bassin d'Annonay, une dizaines d'agents d'Orange sont concernés. La loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 relative à l'organisation du service public de la poste et des télécommunications a supprimé la Direction générale des télécommunications (DGT) et la Direction générale de la poste (DGP) pour créer deux exploitants autonomes de droit public : La Poste et France Télécom. Cette réforme s'est accompagnée d'un volet social comportant deux axes. Le premier, mis en œuvre en 1991 et 1992, consistait en des mesures de reclassement des personnels fonctionnaires dans de nouvelles échelles indiciaires. Le second volet, appliqué progressivement à partir de 1993, correspondait à une réorganisation des « classifications » des personnels. Toutefois, face au refus de certains agents de se voir appliquer un nouveau régime statutaire potentiellement moins favorable, les directions de La Poste et de France Télécom ont donné un droit d'option à tous leurs fonctionnaires : soit ces derniers continuaient leur carrière sur leurs grades initiaux, soit ils intégraient les nouvelles classifications. Dans tous les cas, le gouvernement de l'époque s'était engagé à ce qu'aucun agent ne soit pénalisé en raison de son choix. Or plus de vingt ans après cette vaste réorganisation sociale, force est de constater que les agents dits « reclassés » ont subi une stagnation de leur carrière professionnelle. Cette situation s'est notamment traduite par une impossibilité pour ces agents de bénéficier de promotions ou d'avancements dans les grades de reclassement, par des inégalités de traitement dans le travail et donc par des pertes salariales. La Poste et France Télécom, comme les pouvoirs publics, ont été alertés à de très nombreuses reprises sur cette question par les agents concernés, les syndicats, mais aussi par les élus locaux et les parlementaires. Le Conseil d'État, par un arrêt daté du 11 décembre 2008, a d'ailleurs enjoint à l'État et à France Télécom de « procéder à des reconstitutions de carrière et d'offrir aux agents reclassés les voies de promotion interne conformes aux dispositions statutaires les concernant ». Les décisions prises par les deux entreprises à la suite de cet arrêt se sont révélées être toutefois insuffisantes. Par ailleurs, lors de ses auditions devant les deux chambres parlementaires en septembre 2013, précédant sa nomination à la tête du Groupe La Poste, l'actuel président-directeur général s'était engagé à entamer des négociations avec les représentants des fonctionnaires reclassés. À ce jour, aucune négociation n'a débuté. Aussi, il lui serait reconnaissant de bien vouloir étudier la possibilité de mettre en place des plans de revalorisation de carrière pour l'ensemble des agents « reclassés », afin de mettre un terme à ces situations d'injustice.
Réponse publiée le 2 juin 2015
En dépit du statut de société anonyme de La Poste et de France Télécom, la loi du 2 juillet 1990 portant organisation du service public de La Poste et à France Télécom a prévu que l'ensemble des fonctionnaires des entreprises continuent à y exercer leurs fonctions dans le cadre du statut général des fonctionnaires, qu'ils soient fonctionnaires dits reclassés ou fonctionnaires dits reclassifiés. La situation de l'ensemble des fonctionnaires de La Poste et de France Télécom est ainsi régulière et identique, tous relevant de la loi du 2 juillet 1990 et des titres 1 et 2 du statut général des fonctionnaires. En l'absence de recrutement externe dans les corps de reclassement et en raison de l'existence de quotas statutaires, les possibilités de promotions se sont trouvées très réduites au sein des corps de reclassement (tout en étant réalisables vers les corps dits de classification) et cette situation a suscité des actions contentieuses de certains fonctionnaires reclassés, en dépit du fait qu'ils pouvaient poursuivre leur carrière dans les corps dits de classification sans aucune difficulté statutaire, ce que de nombreux « reclassés » ont d'ailleurs accepté. Le décret n° 2004-1300 du 26 novembre 2004, relatif aux dispositions statutaires applicables à certains corps de fonctionnaires de France Télécom, a supprimé les obstacles statutaires qui ne permettaient plus la promotion interne dans les corps de reclassement de France Télécom, suite à l'arrêt du recrutement de fonctionnaires par l'opérateur, à compter du 1er janvier 2002, confirmé par la loi n° 2003-1365 du 31 décembre 2003 relative aux obligations de service public des télécommunications et à France Télécom. S'agissant de La Poste, suite à une décision du Conseil d'Etat du 11 décembre 2008, la promotion dans les corps de fonctionnaires dits « reclassés » de La Poste a été relancée par le décret n° 2009-1555 du 14 décembre 2009 relatif aux dispositions statutaires applicables à certains corps de fonctionnaires de La Poste : celui-ci permet de réaliser des promotions dans l'ensemble des corps dits de « reclassement » de l'opérateur. Toutefois, la décision du Conseil d'Etat du 11 décembre 2008 n'a pas enjoint au Gouvernement de procéder à la reconstitution de carrière des agents pouvant être concernés par le décret à une promotion. La Haute Cour a explicitement précisé, dans une décision du 18 novembre 2011, que l'exécution de sa décision du 11 décembre 2008 n'impliquait pas que les mesures réglementaires nouvelles soient dotées d'un effet rétroactif. Les fonctionnaires dits reclassés ont donc pu opter pour une évolution de carrière soit au sein des corps de classification dès 1993, sans perte d'identité statutaire, soit pour une promotion au sein des corps de reclassement depuis 2004 à France Télécom et depuis 2009 à la Poste. Une reconstitution de carrière collective est difficilement concevable car elle conduirait à une promotion automatique, ce que les juridictions administratives excluent, s'attachant à déterminer, au cas par cas, si les requérants avaient fait preuve d'une chance sérieuse de promotion alors même qu'ils auraient rempli les conditions statutaires pour être promus. Le Comité européen des droits sociaux, dans sa décision n° 73-2011 du 12 septembre 2012, a lui-même considéré qu'en ce qui concernait les questions relatives aux droits acquis des différentes catégories d'agents ou un manque de reconstitution de carrière, il appartenait aux fonctionnaires « reclassés » de faire valoir leurs droits à réparation devant les juridictions internes. Par ailleurs, il convient d'observer que la reconstitution de carrière est un acte administratif extrêmement rare qui n'est intervenu par le passé que pour réparer des préjudices de carrière imputables à des faits de guerre. En outre, une telle mesure risquerait de créer une inégalité de traitement avec les fonctionnaires qui ont accepté la classification mais n'ont pas davantage connu d'évolution de carrière, compte tenu des taux de promotion en vigueur à La Poste et à Orange, s'agissant de promotions au choix. En tout état de cause, la question d'une reconstitution de carrière relève d'une décision éventuelle des présidents de La Poste et d'Orange qui seuls détiennent les pouvoirs de gestion à l'égard de l'ensemble des fonctionnaires en fonctions dans leurs services.
Auteur : M. Olivier Dussopt
Type de question : Question écrite
Rubrique : Ministères et secrétariats d'état
Ministère interrogé : Économie, industrie et numérique
Ministère répondant : Économie, industrie et numérique
Dates :
Question publiée le 14 avril 2015
Réponse publiée le 2 juin 2015