CSG et CRDS
Question de :
M. Jacques Cresta
Pyrénées-Orientales (1re circonscription) - Socialiste, écologiste et républicain
M. Jacques Cresta attire l'attention de M. le ministre des finances et des comptes publics sur les conséquences pour les recettes fiscales de la France de la décision de la Cour de justice de l'Union européenne dite « de Ruyter » le 26 février 2015. En effet l'administration fiscale considérait que des prélèvements sociaux étaient dus sur les revenus fonciers par les travailleurs transfrontaliers (demeurant en France mais travaillant dans un pays de l'Union européenne) et par les non-résidents et expatriés français (demeurant et travaillant à l'étranger mais ayant un patrimoine immobilier en France). Cette recette fiscale était estimée à 250 millions d'euros. Or par cette décision la Cour estime que la CSG et la CRDS sont des cotisations aux régimes sociaux français et pas des taxes, ainsi les personnes qui ne sont pas affiliées aux régimes obligatoires de sécurité sociale n'ont pas à les payer. Il souhaiterait connaître la position de l'État suite à cette décision.
Réponse publiée le 5 juillet 2016
La Cour de justice de l'Union européenne (CJUE), saisie d'une question préjudicielle introduite par le Conseil d'Etat, a jugé, dans son arrêt « de Ruyter » du 26 février 2015, que les contributions et prélèvements sociaux prélevés sur des revenus patrimoniaux relèvent du champ d'application du règlement européen no 1408/71, auquel a succédé le règlement no 883/2004 portant sur la coordination des systèmes de sécurité sociale, dès lors qu'ils sont affectés au financement des régimes obligatoires de sécurité sociale et présentent un lien direct et pertinent avec certaines des branches de sécurité sociale énumérées à l'article 4 de ce même règlement. La territorialité des prélèvements en cause ne doit donc plus dépendre du critère de résidence du contribuable, mais de son affiliation à un régime obligatoire de sécurité sociale dans le champ du règlement précité et de l'affectation des sommes prélevées. Le Conseil d'Etat, dans une décision du 27 juillet 2015, a tiré les conséquences de cette réponse de la CJUE. Il a remis en cause la possibilité d'imposer au titre des prélèvements sociaux sur leurs revenus du patrimoine les personnes affiliées à un régime de sécurité sociale dans un autre État membre de l'Union européenne (UE), de l'Espace économique européen (EEE) ou en Suisse. Les principes dégagés par ces deux décisions sont transposables à l'ensemble des revenus du capital, qu'il s'agisse de revenus du patrimoine ou de produits de placements. Ces décisions ne sont en revanche applicables qu'aux personnes -qu'elles soient domiciliées ou non en France et quelle que soit leur nationalité- qui relèvent du champ d'application du règlement no 883/2004 précité, c'est-à-dire aux personnes affiliées à un régime obligatoire de sécurité sociale dans un État partie à ce même règlement autre que la France. En pratique, sont donc uniquement visées les personnes affiliées à un régime obligatoire de sécurité sociale dans un État de l'EEE autre que la France (autre pays de l'UE, Islande, Liechtenstein ou Norvège) ou en Suisse, au titre : - pour les personnes domiciliées en France : des prélèvements sociaux portant sur l'ensemble des revenus du capital imposables en France (produits de placement et revenus du patrimoine) ; - pour les personnes domiciliées hors de France : des prélèvements sociaux appliqués aux revenus immobiliers (plus-values immobilières et revenus fonciers) tirés de biens situés en France. En revanche, les personnes affiliées à un régime de sécurité sociale en France et celles affiliées à un régime de sécurité sociale hors de l'EEE et de la Suisse, demeurent assujetties aux prélèvements sociaux au titre : - pour les personnes domiciliées en France : de l'ensemble de leurs revenus du capital imposables en France (produits de placements et revenus du patrimoine) ; - pour les personnes domiciliées hors de France : de leurs revenus immobiliers (plus-values immobilières et revenus fonciers) tirés de biens situés en France conformément aux dispositions de l'article 29 de la loi no 2012-958 du 16 août 2012 de finances rectificative pour 2012. Il est à noter que le prélèvement de solidarité de 2 % dû avant le 1er janvier 2015, dans la mesure où il ne finançait pas les branches de la sécurité sociale, n'est pas concerné par la décision « de Ruyter ». Il ne fera donc pas l'objet d'une restitution. Comme il s'y était engagé et sur la base de la décision de justice rendue par le Conseil d'Etat le 27 juillet 2015, le Gouvernement a arrêté des modalités simples pour permettre aux personnes concernées de demander la restitution des impositions acquittées à tort. Ces modalités sont précisées sur le site internet de la direction générale des finances publiques (DGFiP) (http://www.impots.gouv.fr). Enfin, il est précisé que l'article 15 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2016 a pour objet de mettre en conformité avec le droit de l'UE les contributions et prélèvements sociaux en cause. Ainsi, à compter du 1er janvier 2016, les prélèvements concernés, dont le produit aura fait l'objet d'une affectation à des entités placées hors du champ du règlement no 883/2004, s'appliqueront, quel que soit le régime d'affiliation du contribuable, sans contrariété avec la réglementation européenne.
Auteur : M. Jacques Cresta
Type de question : Question écrite
Rubrique : Sécurité sociale
Ministère interrogé : Finances et comptes publics
Ministère répondant : Finances et comptes publics
Dates :
Question publiée le 16 juin 2015
Réponse publiée le 5 juillet 2016