drogue
Question de :
M. Gabriel Serville
Guyane (1re circonscription) - Gauche démocrate et républicaine
M. Gabriel Serville alerte, une nouvelle fois, M. le ministre de l'intérieur sur l'impasse dans laquelle se trouve la Guyane en matière de trafic de stupéfiants. Les derniers chiffres sont alarmants puisque le nombre fatidique de dix arrestations de mules par semaine à l'aéroport de Cayenne a été désormais franchi. Cela fait une moyenne d'exactement une arrestation par vol à destination de Paris. Dernière prise record la semaine dernière où les douaniers ont découvert 27 kilos de cocaïne dissimulées dans les valises d'un officier de l'armée française. La Guyane est ainsi devenue, en quelques années, la plus mauvaise élève française en matière de trafic de stupéfiant en se muant en véritable plaque tournante de la drogue transitant d'Amérique du sud vers le marché européen. Les externalités négatives locales sont désormais insupportables et participent aux taux records de délinquance observés sur le territoire. Il lui demande donc de lui donner des informations quant aux mesures prises par le Gouvernement et les renforcements éventuels des moyens mis à disposition des autorités locales pour faire face à ce fléau et permettre ainsi à la société guyanaise d'envisager l'avenir avec plus de sérénité.
Réponse publiée le 31 mai 2016
La Guyane est confrontée à d'importants problèmes d'usage et de trafic de stupéfiants. Par la perméabilité de ses frontières, par sa proximité avec les pays producteurs de cocaïne (Pérou, Colombie, Bolivie) et avec un pays de transit (Suriname), la Guyane est une zone de transit du trafic vers le marché européen, notamment dans le cadre d'un trafic dit de « fourmis » vers les aéroports métropolitains, s'appuyant sur des passeurs transportant le produit in corpore ou dans leurs bagages. Cette situation se traduit depuis plusieurs années par une recrudescence du nombre de passeurs transportant de la cocaïne in corpore ainsi que par l'envoi de cocaïne dans des colis postaux. Un fort accroissement des interpellations et des remises douanières de passeurs depuis le début de l'année 2015 confirme ce constat et témoigne surtout de la très importante mobilisation policière. Les enquêtes judiciaires révèlent que la majorité de ces passeurs sont des individus de nationalité française, effectuant l'aller-retour depuis la métropole dans le cadre de prétendues vacances, et que la marchandise est destinée dans 85 % des cas à la métropole. Afin de lutter contre ce phénomène, les services du ministère de l'intérieur ont pris de nombreuses dispositions en liaison avec l'autorité judiciaire. L'antenne de police judiciaire de Cayenne, rattachée à la direction interrégionale de la police judiciaire de Pointe-à-Pitre, emploie quasiment à temps plein ses seize fonctionnaires afin de lutter contre l'augmentation du trafic de drogue. Elle est soutenue dans son action par l'antenne Caraïbes de l'Office central pour la répression du trafic illicite des stupéfiants (OCRTIS) de la direction centrale de la police judiciaire, qui agit sur l'ensemble de l'arc antillais. Le nombre de passeurs interpellés est ainsi passé de 152 en 2014 à 118 pour le seul premier semestre 2015. Les saisies de cocaïne sont quant à elles en forte hausse, celles du premier semestre 2015 enregistrant une augmentation de 398 % par rapport à la même période de 2014 (216 kg contre 43 kg). Cette action menée en Guyane se prolonge efficacement en métropole avec l'appui d'une antenne de l'OCRTIS implantée à l'aéroport de Paris-Charles-de-Gaulle et chargée des affaires de trafic de stupéfiants sur les plates-formes aéroportuaires parisiennes. Le nombre de passeurs en provenance de Guyane interpellés dans les deux aéroports parisiens à leur arrivée sur le territoire métropolitain atteint ainsi pour le premier semestre 2015 un niveau quasiment équivalent à celui de l'année 2014 (45 au premier semestre 2015, 46 en 2014). Les autres services de police et de gendarmerie sont également mobilisés. Les services territoriaux de la direction centrale de la sécurité publique ont augmenté leur activité dans ce domaine, enregistrant en 2014 des hausses conséquentes de saisies par rapport à l'année précédente (+ 341,37 % pour la cocaïne et + 152,08 % pour le cannabis). Afin d'accroître ses capacités opérationnelles, la direction départementale de la sécurité publique de Guyane a prévu de doubler les effectifs de sa brigade des stupéfiants d'ici au mois d'octobre 2015. La direction départementale de la police aux frontières a effectué pendant le seul premier semestre 2015 un nombre d'interpellations de passeurs quasiment équivalent à celui de 2014 (8 personnes interpellées cette année, contre 9 pour l'ensemble de l'année précédente). Les services de la direction générale de la gendarmerie nationale ont également intensifié leur action, avec une augmentation de 45 % des trafics démantelés sur le premier semestre 2015 par rapport à l'année précédente. Par ailleurs, sur décision des autorités judiciaires locales, il a été décidé d'accroître l'implication de la gendarmerie dans la lutte contre les trafics. Afin de soutenir les effectifs de la police judiciaire de Cayenne, les saisies réalisées à l'ouest du département sont ainsi désormais confiées à la gendarmerie. Les capacités de traitement des enquêtes ont par conséquent été accrues avec le renfort de douze officiers de police judiciaire détachés d'unités de gendarmerie départementale de métropole. Par ailleurs, les moyens matériels des forces de l'ordre ont été renforcés ces dernières années, notamment par l'apport essentiel des crédits issus du fonds de concours "drogue" (matériel d'observation, moyens d'investigations téléphoniques). Cette année, des crédits spécialement mis à disposition par la direction générale de la police nationale et la Mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives permettront l'installation dans les locaux de l'hôpital de Cayenne de toilettes spécifiquement conçues pour améliorer les conditions de récupération des « boulettes » ou « ovules » transportées par les passeurs. Enfin, sur le plan international, des négociations sont en cours avec les autorités du Suriname afin de créer un centre de coopération policière et douanière, une partie importante de la cocaïne transitant par ce pays avant d'arriver en Guyane.
Auteur : M. Gabriel Serville
Type de question : Question écrite
Rubrique : Outre-mer
Ministère interrogé : Intérieur
Ministère répondant : Intérieur
Dates :
Question publiée le 23 juin 2015
Réponse publiée le 31 mai 2016