aides à domicile
Question de :
M. Bernard Brochand
Alpes-Maritimes (8e circonscription) - Les Républicains
M. Bernard Brochand attire l'attention de M. le ministre de l'économie et des finances sur une des dispositions du projet de loi de financement de la sécurité sociale concernant les services à la personne. Si l'effet vertueux des dispositifs fiscaux de l'État en faveur des services à domicile n'est pourtant plus à démontrer, le PLFSS prévoit de supprimer la possibilité pour le particulier employeur d'acquitter les cotisations sociales sur une base forfaitaire. Ceci constitue une réelle méconnaissance des limites contributives de la très grande majorité des Français ayant recours à ce type de services : cette disposition augmenterait en effet le prix moyen d'une heure de service à domicile de 20 %, alors que les Français indiquent qu'ils ne seraient que 14 % à conserver leur niveau de recours auxdits services dans le cas d'une seule augmentation de 10 %. Avec une croissance de 6 % en moyenne par an depuis 2005, les services à la personne représentent 1,1 % du PIB national, soit 17,3 milliards d'euros, et surtout près de 6 % de l'emploi en France. Plus de 3,6 millions de ménages ont ainsi recours chaque année aux services à la personne. L'impact d'une telle disposition serait donc très néfaste, à la fois pour les ménages qui ont besoin de ce dispositif, et surtout pour les salariés et les entreprises du secteur, et ce d'autant plus dans un contexte de crise, l'aide à la personne constituant de plus en plus un levier fondamental de bien-être, de solidarité et d'intégration. 70 % des personnes recrutées dans ce secteur étaient en effet allocataires de minima sociaux avant leur embauche ou percevaient une indemnité chômage, et beaucoup travaillaient aussi « au noir ». Dans le même temps, une personne dépendante coûte 2,8 fois plus cher à la collectivité lorsqu'elle est accueillie en institution que maintenue à son domicile. La moindre dégradation fiscale ne permettra donc pas le développement de l'offre de ce marché qui doit pourtant continuer de correspondre à une forte dynamique des besoins liée aux évolutions sociodémographiques de notre société. Celle-ci fait face à des besoins croissants en garde d'enfants, prise en charge des personnes dépendantes vivant à leur domicile, mais aussi lutte contre l'échec scolaire et entretien de la maison au regard du développement des ménages biactifs. Il lui demande donc de bien vouloir réfléchir aux mesures qui préviendraient les effets néfastes de cette décision susceptible de nuire à la cohésion nationale en provoquant la suppression de plus de 85 000 emplois. Il est important de rappeler en ce sens que l'esprit de la loi du 26 juillet 2005 relative aux services à la personne vise avant tout « le bien-être des individus à leur domicile ». L'effort de structuration de l'offre de services à la personne se doit d'être consolidé dans notre pays et sécurisé par la sauvegarde de la dynamique de l'emploi, la nécessaire stabilisation du cadre fiscal et l'élimination des distorsions existantes entre les acteurs qui le constituent. Une telle mesure pour les comptes de l'État serait en outre évaluée à 764 millions d'euros annuels. Il souhaiterait en conséquence à terme que l'ensemble de ces revendications puisse créer les conditions d'un échange entre le Gouvernement et les entrepreneurs de ce secteur, ces derniers étant un atout essentiel de notre efficacité économique et sociale.
Réponse publiée le 29 janvier 2013
L'option pour l'assiette forfaitaire ouverte au bénéfice des particuliers employeurs que le Gouvernement a proposé de supprimer à l'article 15 du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2013 est un dispositif critiquable à plusieurs égards. Il réduit les prélèvements sociaux par rapport à ce qui devrait être acquitté, et ce de façon croissante avec la rémunération : il ne s'agit donc nullement d'un dispositif visant à réduire le coût du travail peu qualifié. Ce dispositif a été jugé « peu efficient » au regard de son bilan coût-avantage par le comité d'évaluation des dépenses fiscales et des niches sociales, dans son rapport de 2011. Ce dispositif bénéficie peu aux ménages ayant les besoins d'aide à domicile les plus importants (personnes âgées dépendantes, personnes en situation de handicap, garde d'enfant en bas âge) qui bénéficient d'autres dispositifs (exonération totale de cotisations ou prise en charge par la branche famille) qui réduisent fortement l'intérêt de l'assiette forfaitaire. Il est pénalisant pour les salariés concernés, puisqu'il réduit les cotisations versées par l'employeur et, par voie de conséquence, les droits sociaux contributifs acquis (retraite, indemnités journalières, chômage). Par exemple, pour une femme née en 1960, ayant effectué toute sa carrière dans les services à la personne, en étant rémunérée à 1,1 SMIC, maintenir le forfait pour les 10 ans à venir revient à réduire sa pension future de 135 € par mois. Il s'agit d'une possibilité unique donnée à l'employeur de choisir le niveau de sa participation au financement de la protection sociale et le niveau de la couverture sociale de son salarié, ce qui est à rebours de la volonté du Gouvernement de rapprocher les conditions de travail et d'emploi des salariés à domicile de celles du reste du monde du travail. C'est pour mettre fin à un dispositif réduisant à la fois les recettes sociales et les droits des salariés que le Gouvernement a proposé de supprimer cette possibilité de cotiser sur assiette forfaitaire. Cela était d'autant plus nécessaire que l'abattement de 15 points pour les employeurs cotisant sur assiette réelle avait été supprimé sous la législature précédente, ce qui créait une incitation à passer au forfait. Pour modérer le coût du travail, de façon plus ciblée sur les emplois à bas salaire, et ainsi compenser la suppression de l'abattement de 15 points, le dispositif prévu par l'article 15 du PLFSS a été complété, en première lecture, à l'Assemblée nationale, d'un mécanisme d'abattement forfaitaire sur les cotisations dues par les particuliers employeurs. Cet abattement est de 0,75 € pour chaque heure effectuée, soit l'équivalent de 8 points de cotisations au niveau du SMIC. Ce dispositif permet de réduire le coût du travail pour l'intégralité des particuliers employeurs qui déclaraient au réel (à l'exception des « personnes fragiles » bénéficiant d'une exonération totale). Le Gouvernement ne partage pas les chiffrages avancés par l'étude Wyman sur l'effet sur l'emploi de ces mesures. En effet, ces chiffrages comportent des approximations et reposent sur des hypothèses radicales et peu réalistes d'adaptation de la demande de travail au prix. Le risque de passage au travail dissimulé est limité par le maintien intégral du dispositif de crédit ou réduction d'impôt de 50 % sur les emplois à domicile. En effet, ce dispositif a pour effet de rendre moins coûteux, pour l'employeur, de déclarer le salarié et ainsi pouvoir bénéficier du crédit d'impôt, que de choisir le travail dissimulé sans bénéficier du crédit d'impôt. La réforme, dans sa globalité, permet donc à la fois de consolider les droits des salariés, d'améliorer les recettes de la protection sociale et de soutenir l'emploi.
Auteur : M. Bernard Brochand
Type de question : Question écrite
Rubrique : Professions sociales
Ministère interrogé : Économie et finances
Ministère répondant : Budget
Dates :
Question publiée le 30 octobre 2012
Réponse publiée le 29 janvier 2013